« mercenaire », définition dans le dictionnaire Littré

mercenaire

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mercenaire

(mèr-se-nê-r') adj.
  • 1Qui se fait seulement pour le salaire. Œuvre mercenaire, Rotrou, Vencesl. III, 6. L'esprit mercenaire [suivant les quiétistes], c'est-à-dire le désir des récompenses, Bossuet, 5e écrit, 2. Et font d'un art divin [la poésie] un métier mercenaire, Boileau, Artp. IV. De là vint cet amas d'ouvrages mercenaires, Stances, odes, sonnets, épîtres liminaires, Boileau, Ép. IX.

    Fig. et en mauvaise part. Le véritable amour jamais n'est mercenaire, Il n'est jamais souillé de l'espoir du salaire, Il ne veut que servir, et n'a point d'intérêt Qu'il n'immole à celui de l'objet qui lui plaît, Corneille, Perth. I, 1. Loin de nous une piété faible et mercenaire ! attachons-nous à Dieu pour Dieu même, Fénelon, t. XVII, p. 347. Ici le cœur fait tout, ici l'on vit pour soi ; D'un mercenaire hymen on ignore la loi, Voltaire, Scyth. II, 2. Ils pourront aujourd'hui Vendre au fils de Pompée un mercenaire appui, Voltaire, Triumv. IV, 3.

  • 2En parlant des personnes, qui travaille pour de l'argent. N'employons point les mains d'un soldat mercenaire, Voltaire, Olymp. IV, 2.

    Troupes mercenaires, troupes étrangères dont on achète le service.

    Fig. À qui l'on fait faire tout ce qu'on veut pour de l'argent. Cet homme est mercenaire. C'est [une armée] une multitude d'âmes pour la plupart viles et mercenaires qui, sans songer à leur propre réputation, travaillent à celle des rois et des conquérants, Fléchier, Turenne. Gorgé de honte et d'or, un impudent Maurice, Du pouvoir, quel qu'il soit, adorant le caprice, De tout parti vaincu mercenaire apostat, Peut vendre ses amis comme il vendit l'État, Chénier M. J. Essai sur la satire.

  • 3 S. m. Ouvrier, artisan qui travaille pour de l'argent. Celui qui répand le sang et celui qui prive le mercenaire de sa récompense sont frères, Sacy, Bible, Ecclésiastiq. XXXIV, 27. Faire propriétaire, sans dépouiller personne, l'homme qui n'est que mercenaire, donner la terre au laboureur, c'est le plus grand bien qui se puisse faire en France, depuis qu'il n'y a plus de serfs à affranchir, Courier, Lettre V.

    Travailler comme un mercenaire, travailler beaucoup.

  • 4En général, tout homme qui travaille pour de l'argent, mais avec l'idée dépréciative qu'il n'a aucune indépendance de caractère. Dieu nous préserve de penser que vous sacrifiez la vérité à un vil intérêt ; que vous êtes du nombre de ces malheureux mercenaires qui combattent par des arguments, pour assurer et pour faire respecter les immenses fortunes de leurs maîtres, Voltaire, Philos. Cons. à M. Bergier, XX. Je ne vous ai point abandonné au soin du mercenaire ; je vous ai appris moi-même à parler, à penser, à sentir, Diderot, Père de famille, II, 6. Des esclaves et des mercenaires ne sont pas faits pour élever des Spartiates ; c'est la patrie elle-même qui remplit cette fonction importante, Barthélemy, Anach. ch. 43.
  • 5Nom donné aux étrangers qui servent dans une armée pour de l'argent. Pour t'en donner avis ce lâche mercenaire S'en vint dedans ton camp en faveur de la nuit, Mairet, Mort d'Asdr. III, 3.

    Guerre des mercenaires, guerre terrible que Carthage eut à soutenir contre les troupes étrangères à sa solde, entre la première guerre punique et la seconde.

  • 6 Fig. Homme intéressé et facile à corrompre pour de l'argent. C'est un vil mercenaire.

HISTORIQUE

XIIe s. Vus estes merceniers : des verais poi i a ; Li reis le veit très bien : plus vils vus en aura, Th. le mart. 29.

XIVe s. Mercenaires qui labourent pour loyer, comme sont recouvreurs de maisons, vignerons et teles gens, Oresme, Thèse de MEUNIER. Jehan Adam, prestre, chappellain mercemnaire de Rhetet, Du Cange, mercenarius. Le mercenaire est digne de son loyer, Songe du verg. I, 16.

XVe s. Là furent ordonnés le sire de… messire Henri de Kakeren, un chevalier mercenaire, Froissart, I, I, 139.

XVIe s. La vraye vertu ne demande aucun loyer mercenaire de ses actes louables, Amyot, Préf. VI, 31. Il ne fault pas s'en reposer et rapporter du tout à la discretion de quelques maistres mercenaires, Amyot, Comment il faut nourrir les enfants, 27.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. mercenari ; esp. et ital. mercenario ; du lat. mercenarius, de merx, marchandise (voy. MARCHAND) ; mercenarius avait donné mercenier comme mercenaire.