« poupée », définition dans le dictionnaire Littré

poupée

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

poupée

(pou-pée) s. f.
  • 1Petite figure humaine de carton, de bois, de cire, etc. qui sert de jouet aux petites filles. Les enfants n'ont l'âme occupée Que du continuel souci Qu'on ne fâche point leur poupée, La Fontaine, Fabl. IX, 6. Quoiqu'elles [mes lettres] ne méritent point tout l'honneur que vous leur faites, je crois qu'après avoir gardé celles que je vous écrivais quand vous faisiez des poupées, vous garderez encore celles-ci, Sévigné, à Mme de Grignan, 15 nov. 1671. Elle n'est rien encore, elle est toute dans sa poupée, elle y met toute sa coquetterie, elle ne l'y laissera pas toujours ; elle attend le moment d'être sa poupée elle-même, Rousseau, Ém. v.

    Le temps de poupée, l'enfance des filles. Mme de Maintenon avait résolu d'attacher assez la duchesse de Bourgogne pour en pouvoir amuser le roi, sans crainte qu'après le temps de poupée passé, elle pût lui devenir dangereuse, Saint-Simon, 38, 185.

    Elle se tient comme une poupée, se dit d'une femme qui craint, en remuant, de déranger sa toilette.

    C'est un visage de poupée, se dit d'une jeune personne dont le visage est mignon ou coloré, ou dont le visage n'a pas plus d'expression que la face d'une poupée. Avec son chaperon, sa mine de poupée, Régnier, Sat. X.

    Fig. Il en fait sa poupée, se dit d'un homme qui s'occupe avec complaisance soit d'une personne, soit d'une chose, qui s'en amuse en la parant, en l'embellissant. Le roi et Mme de Maintenon firent leur poupée de la princesse [duchesse de Bourgogne], Saint-Simon, 41, 234. Le roi faisait sa poupée de son régiment, entrait dans tous les détails comme un simple colonel, Saint-Simon, 150, 192.

    Sa poupée en sait autant qu'elle, c'est-à-dire elle est d'une ignorance, d'une ingénuité extrême.

    Jouer à la poupée, se dit au propre d'une enfant qui joue avec sa poupée, et fig. d'une jeune fille demeurée plus simple et plus naïve que ne comporte son âge.

  • 2Une personne fort parée, homme ou femme. J'espère que Fronsac ne vous embarrassera pas plus que de raison ; c'est la plus aimable poupée qu'on puisse voir, Maintenon, Lett. au duc de Noailles, 22 mai 1711. Ne verrai-je jamais les femmes détrompées De ces colifichets, de ces fades poupées, Qui n'ont pour imposer qu'un grand air débraillé ? Regnard, le Joueur, I, 2. Ma mère m'a toujours regardée comme un être pensant dont il fallait cultiver l'âme, et non comme une poupée qu'on ajuste, qu'on montre et qu'on renferme le moment d'après, Voltaire, Dial. 12. Toutes ces poupées sortent de chez la même marchande de modes, Rousseau, Hél. II, 21.

    C'est une vieille poupée, se dit d'une personne âgée qui n'a pas la maturité convenable à son âge ou à son état. C'est, dit Thalie, à son rouge trompée, Apparemment quelque jeune Napée, Qui court en masque au bas de ce vallon. - Vous vous trompez, lui répond Apollon ; C'est tout au plus une vieille poupée En manteau court, Rousseau J.-B. Rond. épigr.

    Poupée se dit aussi d'une femme qui est sans animation et sans expression. Que voulez-vous ? la nature en avait fait une poupée dès son enfance, et poupée jusqu'à la mort resta la blanche Whittnell, Hamilton, Gramm. 13.

  • 3Espèce de mannequin sur lequel on essaye des chapeaux, des vêtements, ou sur lequel on les place quelquefois pour les envoyer, comme modèles, dans les pays étrangers. Je ferai coiffer une poupée pour vous l'envoyer, Sévigné, 36.
  • 4Petite figure en plâtre qui sert de but dans les tirs. Abattre une poupée. Il a cassé trois poupées de suite.
  • 5Paquet d'étoupes dont on garnit le fuseau.
  • 6 Terme de jardinage. Manière d'enter, ainsi dite parce qu'on entoure la greffe de linge. Enter en poupée.
  • 7Doigt malade et entortillé d'un linge.
  • 8Chiffon de toile à l'aide duquel on fait boire les veaux.
  • 9 Terme de tourneur. Poupées d'un tour, deux pièces de bois, égales en longueur et en grosseur, au bout desquelles sont enclavées les deux pointes de fer qui servent à soutenir la matière du travail ; ainsi dites, parce qu'elles étaient surmontées de figures.
  • 10Dans les bateaux on nomme poupées, le prolongement de certaines courbes qui s'élèvent au-dessus des bordages. On enroule des cordes autour de ces poupées pour fixer le bateau.
  • 11Dans la manufacture de tabacs, réunion de manoques liées au sommet.
  • 12Poupées d'eau, nom d'une sorte de clous. Poupées d'eau, raquettes, rosettes ou clous à selliers, etc. Décl. du roi, nov. 1664. Tarif.

HISTORIQUE

XIIIe s. Vesci une legiere poupée [dessin, modèle] d'uns estaus, De Laborde, Ém. p. 465. D'aornemens envelopée Por notant fust une popée, la Rose, 14312.

XIVe s. À Robert de Varennes, brodeur et varlet de chambre du roy, pour poupées et mainages d'icelles pour la royne d'Angleterre…, De Laborde, Émaux, p. 465. Une ou deux poupées de lin ou de chanvre, Du Cange, popera.

XVe s. Le roi est jeune ; si croit jeunement… mieux lui vaudroit… de croire ses oncles… que celle poupée le duc d'Irlande, Froissart, II, III, 62.

XVIe s. L'enfant, selon sa petitesse, aime les pommes, les poires, les poupées… mais en croissant, aime les poupines vives [les femmes], Marguerite de Navarre, Nouv. XIX. Et afin que l'argile tienne bon, l'on l'environnera avec des drappeaux… faisant de l'ente comme une poupée, dont le nom est venu à l'ente, De Serres, 663.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, popp, poupp ; d'une forme latine fictive, pupata, dérivé du latin pupa, petite fille et poupée.