« solitaire », définition dans le dictionnaire Littré

solitaire

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

solitaire

(so-li-tai-r') adj.
  • 1Qui est seul ; qui aime à être seul. Elle [Mme de Thianges devenue dévote]… est toujours de très bonne compagnie, et n'est pas solitaire, Sévigné, 5 janv. 1674. L'admirable saint François de Paule est solitaire jusque dans la cour [de Louis XI], est toujours recueilli en Dieu parmi ce tumulte, Bossuet, 1er panég. St Franç. de Paule, 2. On m'élevait alors, solitaire et cachée, Racine, Esth. I, 1. Je suis devenu solitaire, ou, comme ils disent, insociable et misanthrope, parce que la plus sauvage solitude me paraît préférable à la société des méchants, qui ne se nourrit que de trahisons et de haine, Rousseau, 7e promen.

    Il se dit des choses. Vie solitaire. Il a l'humeur solitaire. Qu'il y ait, pour ainsi dire, des plaisirs solitaires qui n'aient pas besoin de se communiquer, Fontenelle, Dial. des morts mod. 1. Ceux qui accusaient sa bienveillance [de l'abbé de Saint-Pierre] d'être froide et banale, ne pouvaient au moins la taxer d'être solitaire et personnelle, D'Alembert, Éloges, l'Ab. de St-P. Quelque chose manquait à ce cœur solitaire, Delille, Parad. perdu, VIII.

  • 2Qui résulte de la solitude, ou qui n'est pas partagé. Viens, tu souffres, ami ; quelque ennui solitaire Te ronge, Musset, la Nuit de mai.
  • 3Il se dit de quelque objet qui n'est associé à aucun autre semblable.

    Fleurs solitaires, fleurs qui naissent séparées les unes des autres sur la plante qui les porte.

    Ver solitaire, voy. TAENIA.

    Terme d'architecture. Colonne solitaire, colonne isolée qui ne fait pas partie d'un ordre, qui ne porte pas un entablement.

  • 4Isolé, désert. Souvent ce cabinet, superbe et solitaire, Des secrets de Titus est le dépositaire, Racine, Bérén. I, 1. Remplissant de vos cris les antres solitaires, Voltaire, Œdipe, III, 4. Ah ! c'est trop tôt chercher ce solitaire asile, Voltaire, Zaïre, IV, 3.
  • 5 S. m. Anachorète qui vit dans la solitude. Les solitaires de la Thébaïde. Mes amis, dit le solitaire, Les choses d'ici-bas ne me regardent plus ; En quoi peut un pauvre reclus Vous assister ? que peut-il faire ? La Fontaine, Fabl. VIII, 3. C'est dans la classe des solitaires que se trouvent les hommes qui poussent le plus loin la carrière de la vie, Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie. Il visita la grotte du solitaire, qu'il trouva remplie de ronces et de framboisiers, Chateaubriand, Atala, Épilogue.
  • 6Tout homme qui vit seul ou très retiré. Un solitaire peut s'estimer davantage que ne fera celui qui vit avec les autres et qui s'y compare, Fontenelle, Leibnitz. Peu de gens peuvent comprendre la félicité d'un solitaire qui l'est par un choix tous les jours renouvelé, Fontenelle, Lahire. Cela me rappelle le mot d'un solitaire qui disait aux personnes dont il recevait quelquefois la visite : Vous voyez un homme presque aussi heureux que s'il était mort, D'Alembert, Lett. au roi de Pr. 14 nov. 1776.
  • 7 Terme d'argot de théâtre. Des amateurs fréquentant les spectacles et curieux d'assister aux premières représentations payent leur billet au chef [des claqueurs], et n'exigent aucun rabais sur le prix du bureau… exempts de toute surveillance, ils vont se porter loin de la troupe vénale qui les désigne sous le nom de solitaires, à cause de leur position topographique et tout à fait indépendante, Castil-Blaze, Hist. de l'Acad. de musique, XXIX, t. II, p. 405.
  • 8 Terme de vénerie. Vieux sanglier mâle, sorti de compagnie.
  • 9Jeu qu'on joue seul sur une petite table percée de trente-sept trous, et avec trente-six chevilles. Il faut jouer au solitaire, Quand on n'est plus dans les beaux ans, Pannard, Œuvr. t. III, p. 358.

    Terme de jeu. Espèce de quadrille, dans lequel on joue toujours seul, sans appeler.

  • 10 Terme de joaillier. Diamant détaché, monté seul ; lorsque le diamant est petit, il se nomme étincelle. Acheter un solitaire.
  • 11Espèce de papillon.
  • 12Petite constellation méridionale.
  • 13 S. f. Espèce de fleur. Vous le voyez planté, et qui a pris racine au milieu de ses tulipes et devant la solitaire, La Bruyère, XIII.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et sui faiz ausi comme li moiniaus solitaires en la meson, Psautier, f° 120. Il n'est nul qui vossist [voulût] avoir tout le bien du monde pour vivre solitaire, ce est à dire tout seul, Latini, Trésor, p. 322. Et je qui demore toz seus [seul], Si quis [cherchai] les solitaires leus [lieux], Roman de la poire, ms.

XIVe s. Et à celui qui est solitaire, sa vie est forte et grieve, Oresme, Éth. 284.

XVIe s. … J'errais entre les bois Seul à par-moy sauvage et solitaire, Ronsard, 739. Et m'esloignant du monde, afin de vous complaire, Je vivray dans un antre, hermite solitaire, Desportes, Elégies, I, 4.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. solitari, soletari ; espagn. et ital. solitario ; du lat. solitarius, dérivé de solitas, qui vient de solus, seul.