« endurcir », définition dans le dictionnaire Littré

endurcir

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endurcir

(an-dur-sir) v. a.
  • 1Rendre dur. Le grand air endurcit certaines pierres.

    Fig. Donner une dureté morale. Ma place ne m'a pas encore endurcie ; je sens tout trop vivement, Maintenon, Lettre au card. de Noailles, 5 avril 1700. La tendresse de cœur se perd souvent, parce que les passions et le commerce des hommes politiques endurcissent insensiblement les jeunes gens qui entrent dans le monde, Fénelon, Éduc. filles, ch. 5. La multitude des malheureux vous endurcit à leurs misères, Massillon, Car. Aumône. C'est que le même zèle qui nous attache au prince nous endurcit souvent envers le public, Massillon, Or. fun. Villeroy.

    Il se dit, dans le même sens, des sentiments, du cœur, etc. Sans mentir, Monseigneur, si vous ne vous êtes bien endurci le cœur parmi les Suédois…, Voiture, Lett. 67. Il faut agir de force avec de tels esprits, Seigneur ; et qui les flatte endurcit leur mépris, Corneille, Héracl. I, 1. Endurcis-toi le cœur, sois arabe, corsaire…, Ne va point sottement faire le généreux, Boileau, Sat. VIII. Un cœur qu'ont endurci la fatigue et les ans, Racine, Bajaz. I, 1. Endurcir les esprits contre l'humanité, Voltaire, M. de Cés. I, 1. Les Musulmans altiers, trop longtemps vos vainqueurs, Ont changé la Sicile, ont endurci vos mœurs, Voltaire, Tancr. I, 4.

    Absolument. Au milieu des grandeurs, qui endurcissent toujours, ils nous trouvaient sensibles, Montesquieu, Lett. pers. 74.

  • 2Rendre résistant, robuste, capable de supporter. S'exposer aux intempéries des saisons est ce qui endurcit le corps.

    Absolument. Il n'y a rien qui endurcisse comme le travail des champs.

  • 3S'endurcir, v. réfl. Devenir dur. Le corail s'endurcit à l'air.
  • 4 Fig. Contracter une dureté morale. S'endurcir au crime. Mon cœur s'est endurci par toutes mes disgrâces, Rotrou, Vencesl. II, 2. Ceux qui s'endurcissent contre la foi de nos pères, Bossuet, Messe. Autant qu'ils se seront endurcis aux malheurs des pauvres, autant Dieu les laissera-t-il s'endurcir à leur propre malheur, Bourdaloue, Exhort. char. envers les pauvres, t. I, p. 50. Ce héros… Qui ne connaît de pleurs que ceux qu'il fait répandre, Qui s'endurcit contre eux dès l'âge le plus tendre, Racine, Iphig. IV, 1. Les hommes corrompus s'endurcissent contre ce qui pourrait les toucher, Fénelon, Tél. XX. En cherchant à s'endurcir contre les cris de sa conscience, Massillon, Car. Avenir.
  • 5Devenir résistant à la fatigue, apprendre à supporter. Montrez-lui comme il faut s'endurcir à la peine, Corneille, Cid, I, 7. Son corps s'endurcissait chaque jour, Fénelon, Tél. XVII.

    Par extension. Il avait acquis avec art l'habitude de n'être pas aisément troublé, et s'était endurci aux distractions, Fontenelle, Tschirnhaus.

HISTORIQUE

XIIe s. Pur quei endurcissez vos quers [cœurs] cume fist Egypte e li reis Pharaun de Egypte ? Rois, p. 21.

XIIIe s. Et gloutonnie la vilaine, Luxure, peresce et envie, Et avarice l'endurcie, Et toute leur pourrie graine, J. de Meung, Tr. 107. Il apele à sa merci ceus qui endurcissent en pechié, Psautier, f° 77.

XIVe s. En ce chastel avoit maint Englois endurci De guerre demener et le may et l'avril, Guesclin. 21637.

XVIe s. Endurcissez le à la sueur, au froid, aux hazards, Montaigne, I, 183. Il dressoit et endurcissoit fort sa personne tous les jours à l'exercice des armes, Amyot, Philop. 21.

ÉTYMOLOGIE

En 1, et durcir ; Berry, endurzir ; provenç. endurzir, indurzir ; catal. endurir ; espagn. endurecer ; ital. indurire.