« levain », définition dans le dictionnaire Littré

levain

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

levain

(le-vin) s. m.
  • 1Pâte aigrie, c'est-à-dire ayant subi un certain degré de fermentation acide, et qui, par là, est devenue propre à faire lever la pâte du pain. De même qu'un peu de levain aigrit et corrompt toute la masse qui le reçoit, La Mothe le Vayer, Vertu des païens, II, Avant-propos.

    Pain sans levain, voy. PAIN.

  • 2Toute substance capable d'exciter une fermentation dans la substance avec laquelle on la mêle. Levain de bière.

    Le levain de bière est appelé levain doux, par opposition à la pâte aigrie qu'on nomme levain aigre dans les pays où les deux sortes de levain sont employés ; à Paris le pain se fait généralement au levain doux ; mais, dans une grande partie de la France, et particulièrement à la campagne où on n'a pas de levain doux, il est fait au levain aigre.

  • 3 Par extension, cause de quelque maladie comparée à une fermentation. Ce mal-là ne se guérit jamais si bien qu'il n'en reste quelque levain. Arrière les humeurs, qu'elles pèchent ou non ; La fièvre est un levain qui subsiste sans elles, La Fontaine, Quinquina, II.

    Fig. Sorte de fermentation vicieuse que le péché laisse dans l'âme. Se défaire d'un vieux levain du péché. L'Écriture en cet endroit, en parlant de notre ennemi, entend le mauvais levain, Pascal, Pens. XXV, 144, éd. HAVET. L'homme se trouve puni dans sa dernière postérité de la faute qui lui fit prendre le premier levain du crime, Chateaubriand, Génie, I, I, 4.

  • 4 Fig. Ce qui est capable d'exciter, comme par une fermentation, les passions, les sentiments, les doctrines, soit en bien, soit en mal. Ce levain de révolte et de sédition, Tristan, Mariane, IV, 1. Comment ne comprenez-vous point que ce n'est pas du pain que je vous parlais, lorsque je vous ai dit de vous garder du levain des pharisiens et des saducéens ? Sacy, Bible, Év. St Math. XVI, 11. Si jamais l'Angleterre revient à soi [quitte le protestantisme], si ce levain précieux [ce qu'il y reste de catholicisme] vient un jour à sanctifier toute cette masse, Bossuet, Reine d'Anglet. Il y a dans l'esprit comme un levain d'orgueil qui s'enfle et se dilate par la science, Fléchier, Panég. II, p. 232. Un secret levain de dissension et de discorde avait commencé depuis quelques années à troubler le repos de la Grèce, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. III, p. 415, dans POUGENS. Ne laisser germer dans mon cœur aucun levain de vengeance, Rousseau, Prom. 7. L'interprète du ciel au fond des consciences Agite sourdement le levain des vengeances, Delavigne, Vêp. sicil. I, 1.
  • 5Mélange de chaux et d'alcali dont les savonniers tirent la lessive.

HISTORIQUE

XIIe s. De ce dist sainz Paules : un pau [peu] de levains mainet tote la masse, Job, p. 442.

XIIIe s. Ne icil talemelier [boulanger] ne puet puis cuire, se son levain n'est faiz avant que la deffence li ait esté faite ; et se son levain est fet, il puet cuire la cuite du levain, Liv. des mét. 14.

XIVe s. En moi n'a pas tant de levain Qui mon cuer faice [fasse] si lever, K'à tel sens le puisse eslever, Jean de Condé, p. 102.

XVe s. Je fais tourtel d'autruy levain, Deschamps, Poésies mss. f° 269. Un pou [peu] de levain esgrit grant paste, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 432. Par homme ne povoit de fait Amender à Dieu le meffait Qu'avoit fait l'omme premerain ; Car tuit [tous] tenoient du levain Du pechié de leur premier pere, Myst. Barlaam et Jos. dans GUI DE CAMBRAI, p. 389.

XVIe s. Qui au soir ne laisse levain jà ne fera lever paste au matin [il faut se précautionner d'avance contre les besoins à venir], Rabelais, III, 3. Les docteurs de l'eglise ont foudroyé contre ce levain d'impieté, Cholières, Contes, t. II, Après-din. p. 281, dans POUGENS.

ÉTYMOLOGIE

Wall. louhain, louwain ; provenç. levam ; du lat. levamen, proprement action de lever, de levare, lever. Le provençal a aussi levat, qui vient de levatus ; l'italien, lievito, qui vient du bas-latin levitus, pour levatus ; et l'espagnol, leudo, qui vient aussi de levĭtus.