« licencier », définition dans le dictionnaire Littré

licencier

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

licencier

(li-san-si-é), je licenciais, nous licenciions, vous licenciiez ; que je licencie, que nous licenciions, que vous licenciiez v. a.
  • 1Congédier. Après la paix on licencia une partie de l'armée. Le roi n'aime pas qu'on le serve par force ; allez, je vous licencie, Lesage, Est. Gonz. ch. 46. Le cordelier Ganganelli, devenu pape, détruisit l'ordre entier [des jésuites] par une bulle ; et, après avoir soutenu pendant deux cents ans que le pape pouvait tout, les jésuites furent obligés de soutenir peu à peu qu'il ne peut même licencier un régiment de moines, Voltaire, Hist. parl. ch. LXXIII.
  • 2Rejeter, refuser (vieilli en ce sens). Mais en vain son dépit pour ses fautes commises Lui fait licencier mes soins et mon appui, Molière, l'Ét. V, 11.
  • 3Se licencier, v. réfl. S'accorder trop de liberté, passer les bornes de la discrétion, du devoir. Et les politiques qui se sont le plus licenciés… ont estimé toute sorte de sujétion… peu compatible avec la royauté, Guez de Balzac, 7e disc. sur la cour. Ce vermillon nouveau qui colore ta joue, M'invite expressément à me licencier, Corneille, Clit. V, 3 (1res édit. jusqu'à 1644). Quoi ! ta bouche se licencie à te donner encore un nom que je défends ! Molière, Amph. III, 7. Plus elles chercheront à s'émanciper et à se licencier, plus elles seront exposées aux mécontentements et aux ennuis, Bourdaloue, Exhort. sur l'obs. des règles, t. I, p. 223. Il [l'avocat] tint trois audiences en beaucoup de fatras, et, à la quatrième, il se licencia fort sur nos avocats, Saint-Simon, 36, 159. Il revint au roi qu'on s'était licencié chez elle [la duchesse de Portsmouth], et elle-même, de parler fort librement de lui et de Mme de Maintenon, Saint-Simon, 127, 149.

REMARQUE

On dit, avec un infinitif, ordinairement se licencier à, et, quelquefois, se licencier de.

SYNONYME

SE LICENCIER, S'ÉMANCIPER. Se licencier, c'est se donner licence, prendre une trop grande liberté ; s'émanciper, c'est sortir de la tutelle où l'on était et faire quelque chose qu'on n'est pas autorisé à faire. Dans se licencier il n'y a que l'idée d'un abus de liberté ; mais dans s'émanciper il y a l'idée que celui qui s'émancipe était retenu et dans une position subordonnée.

HISTORIQUE

XVe s. Quant messire Pierre de Craon se vit ainsi licencié [congédié], si fut tout honteux ; et prit ce en grand felonnie et despit, Froissart, III, IV, 21. Un clerc licencié en droit qui estoit archidiacre de Lussebonne, Froissart, II, III, 18. Et quant vient au licencier [à faire un licencié]…, Deschamps, Poésies mss. f° 451.

XVIe s. Pourtant vouloyt-il translater leurs festes en hyver, les licenciant de gresler lors et geler tant que ilz vouldroyent, Rabelais, Pant. III, 33. Sous l'ombre d'estre mal payez, ils se licentient à actions violentes et infames, Lanoue, 106. Mes discours me licencieroient aysement à des actions que cette naturelle inclination me faict haïr, Montaigne, II, 124. Licencié sous la cheminée, Cotgrave Qu'il me trouvast une occasion de parler à la reine pour me licencier d'elle [prendre congé], Bassompierre, Mém. t. I, p. 392, dans LACURNE. Un bedeau de nostre université ayant leu l'edit de paix, où il estoit dit que touz estrangers seroient licentiez, tant d'une part que d'autre, il s'en vint aux docteurs, leur disant : messieurs, regardez de faire bonne composition des licences, nous gaignerons ce que nous voudrons ; car le roy veut que touz estrangers, tant d'une religion que d'autre, soient licentiez, Bouchet, Serées, liv. III, p. 253, dans LACURNE. Je ne veux rien d'amour, fors qu'il me licencie ; Je l'ay suivy dix ans, les plus beaux de ma vie, Desportes, Cléon. LXXXVII.

ÉTYMOLOGIE

Licence ; provenç. et espagn. licenciar ; ital. licenziare.