« louer.2 », définition dans le dictionnaire Littré

louer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

louer [2]

(lou-é) v. a.
  • 1Relever par des paroles le mérite de quelqu'un ou de quelque chose. On ne peut trop louer trois sortes de personnes : Les dieux, sa maîtresse et son roi, La Fontaine, Fabl. I, 14. Le singe approuva fort cette sévérité, Et, flatteur excessif, Il loua la colère Et la griffe du prince, et l'antre et cette odeur, La Fontaine, ib. VII, 7. À vous pouvoir louer selon votre mérite Je manque d'éloquence, et ma force est petite, Molière, l'Ét. II, 14. Vous avez sans doute entendu louer le chevalier de Grignan sur le passage du Rhin, Sévigné, 27 août 1675. Si j'avais trouvé cette juste comparaison… vous me loueriez par-dessus les nues, Sévigné, 4 août 1680. On parla de vous, on vous loua jusqu'au ciel, Sévigné, 1er mai 1671. Non, pour louer un roi que tout l'univers loue, Ma langue n'attend pas que l'argent la dénoue, Boileau, Sat. IX. Aimez qu'on vous conseille, et non pas qu'on vous loue, Boileau, Art p. I. On loue tous ceux dont on croit avoir à espérer ou à craindre ; jamais on n'a vu moins d'estime et plus d'éloges, Duclos, Considér. sur les mœurs, ch. 3. Laissons à l'orateur [Cicéron] qui charme sa patrie, Le soin de nous louer, quand nous l'aurons servie, Voltaire, M. de Cés. II, 4. Qui loue tout n'est qu'un flatteur : celui-là seul sait louer qui loue avec restriction, Voltaire, Temple du goût, lett. Je suis toujours étonné que le consul Pline, digne ami de Trajan, ait eu la patience de le louer pendant trois heures, et Trajan celle de l'entendre, Voltaire, Mél. litt. Sur les panégyriques.

    Louer quelque chose à quelqu'un, lui en faire l'éloge. Quand il [Dieu] introduit les Israélites dans cette terre promise à leurs pères, il la leur loue afin qu'ils l'aiment, Bossuet, Polit. I, II, 3.

    Louer de. Je vous loue d'avoir ainsi agi. Je dois plus à leur haine [des ennemis]… Qu'au faible et vain talent dont la France me loue, Boileau, Ép. VIII. Oui, je te loue, ô ciel, de ta persévérance, Racine, Andr. V, 5.

    Absolument. Mais je sais peu louer ; et ma muse tremblante Fuit d'un si grand fardeau la charge trop pesante, Boileau, Disc. au roi. Tu sais bien que mon style est né pour la satire ; Mais mon esprit, contraint de la désavouer, Sous ton règne étonnant ne sait plus que louer, Boileau, Épître VIII.

    Louer que, avec le subjonctif. Je vous loue fort que vous ne reconduisiez pas ; c'était pour en mourir, Sévigné, 44.

    Fig. Je loue le torticolis qui vous a empêché d'avoir la fatigue de manger avec ces gens-là, Sévigné, 5 janv. 1676.

    Fig. Il se dit des choses qui sans parler font un éloge. Ici, messieurs, mon silence le loue plus que mes paroles, Fléchier, Lamoign.

  • 2Se louer, v. réfl. Se donner des louanges à soi-même. Il est malséant de se louer soi-même. Pendant qu'ils [les grands] ignorent l'économie et la science d'un père de famille, et qu'ils se louent eux-mêmes de cette ignorance, La Bruyère, IX.

    Se donner réciproquement des louanges. L'autre jour, suivant à la trace Deux ânes, qui, prenant tour à tour l'encensoir, Se louaient tour à tour, comme c'est la manière, La Fontaine, Fabl. XI, 5.

  • 3Se louer de quelqu'un, de quelque chose, témoigner qu'on en est satisfait. Mais vous vous louez fort aussi du roi son frère, Corneille, Attila, II, 5. Pour un qui s'en louera, dix mille s'en plaindront, La Fontaine, Fabl. IV, 2. Je ne cesse de me louer de sa société, Sévigné, 473. Je me suis fort louée à Mlle de Scudéry de l'honnête procédé de M. de Péruis, Sévigné, 18 déc. 1673. Vos prêtres… Des bontés d'Athalie ont lieu de se louer, Racine, Athal. II, 5.

    Se louer de quelqu'un, se féliciter des rapports qu'on a avec lui. Se louer de quelqu'un, se louer d'un grand, phrase délicate dans son origine, et qui signifie sans doute se louer soi-même, en disant d'un grand tout le bien qu'il nous a fait, La Bruyère, IX.

HISTORIQUE

XIe s. Danz Alexis an lothet Deu del ciel, St Alexis, XX. Qui ce vus lodet [conseille] que cest plait degetun [repoussions], Ch. de Rol. X. [Il] Loat [remercia] son Deu, ne fist autre respons, ib. XXX. Tant [je] nel vous sai ne priser ne loer, ib. XXXIX. Tort [il] nus a fait, nen est dreiz qu'il s'en lot, ib. CXLIII. Veez l'orguil de France la loée, ib. CCXL.

XIIe s. Naymes li dus, qui fit mout à loer, Ronc. p. 32. Li emperere de France la loée, ib. 66. Je cornerai [sonnerai du cor], se vous le me loez [conseillez], ib. 81. Amer [aimer] toute la meillor Qui soit par les bons loée, Couci, I. À tort s'en plaint li uns, puisque l'autre s'en lot, Sax. XVII. Par Deu ! seigneur, fait-il, moult pensa grant folage, Qui à Charle loa tel conseil et tel rage, ib. XVI. Estre bon entre les bons n'est mie chose ki mult face à loeir, mais estre bon entre les malz, Job, p. 441.

XIIIe s. Se je savoie un courtois chevalier Qui de ses armes fu loés et prisiés, Je l'ameroie de gré et volentiers, Hues de la Ferté, Romancero, p. 102. Cil qui trop se loe a non vanteres [vanteur], Latini, Trésor, p. 273. Tybers, ce dist Aliste, loés en soit Jhesus, Berte, XXIV. Explicit, Diex en soit loez ! Dites Amen, vous qui l'oez, Rutebeuf, II, 226. Ce fu à l'ariver que nous feimes devant Damiette, là où tout son conseil li loa [conseilla], ainsi comme je l'entendi, que il demourast en sa neif, Joinville, 192.

XIVe s. Nous loonz tels pour les faiz et pour les œuvres à quoy ces choses les habiletent, Oresme, Eth. 27.

XVe s. Loué soit celui qui trouva Premier la maniere d'escrire, Orléans, Bal. 21. À qui te cuydes-tu jouer ? Et je me devois tant louer De toy ? or fay que je m'en loue, Path. [Je] vous dis que l'œuvre loue le maistre, Boucic. I, 21.

XVIe s. Je loue Dieu, madame, que vostre affection aye esté si bien employée, Montaigne, II, 69. Ce que nature a faict pour moy, je m'en agrée et m'en loue, Montaigne, IV, 304. Le louer et le meslouer s'entrerespondent de si pareille consequence, que…, Montaigne, IV, 341. Ilz se magnifioient, et hault louoient eulx et leur capitaine, Amyot, Alc. 59. Caesar mesme luy en escrivit de la Gaule, luy louant sa deliberation, Amyot, Crass. 30.

ÉTYMOLOGIE

Norm. loser ; wall. laweder ; Hainaut, lauder ; provenç. lauzar, lauxar ; catal. lloar ; esp. loar ; portug. louvar ; ital. lodare ; du lat. laudare, louer, dénominatif de laudem (voy. LOS).