« navire », définition dans le dictionnaire Littré

navire

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

navire

(na-vi-r') s. m.
  • 1Bâtiment qui sert à naviguer sur mer. Tout nous rit, et notre navire A la bonace qu'il désire, Malherbe, III, 2. Du bris de mon navire au rivage amassé, Régnier, Élég. V. On voit comme une forêt de mâts de navires, et ces navires sont si nombreux qu'à peine peut-on découvrir la mer qui les porte, Fénelon, Tél. III. La mer gémissait sous le nombre et sous la grandeur énorme de nos navires, Massillon, Louis le Grand. Les navires longs à un rang de rames [chez les anciens] s'appelaient aphractes, c'est-à-dire qu'ils n'étaient pas couverts, et n'avaient pas de pont ; on les distinguait par là des cataphractes qui en avaient, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. IV, p. 571, dans POUGENS. Pline et Strabon nous disent que le chemin qu'un navire des Indes et de la mer Rouge faisait en vingt jours, un navire grec ou latin le faisait en sept, Montesquieu, Esp. XXI, 6. Plus un navire est petit, plus il est en danger dans les gros temps ; telle tempête submerge un navire, qui ne ferait que le tourmenter s'il était plus grand, Montesquieu, ib. On lui accorda [à Colomb] trois petits navires et quatre-vingt-dix hommes ; avec cette faible escadre, dont l'armement ne coûtait pas cent mille francs, il mit à la voile le 3 août 1492, Raynal, Hist. phil. VI, 3. Qu'il va lentement le navire à qui j'ai confié mon sort ! Béranger, le Retour.

    Fig. Il est, Chateaubriand, de glorieux navires Qui veulent l'ouragan plutôt que les zéphires, Hugo, Odes, III, 2.

    Navire ! cri de l'homme en vigie, pour avertir quand il découvre un bâtiment au large.

  • 2Petit navire, nom donné anciennement au loch.
  • 3Navire de registre, nom qu'on donnait en Espagne à un navire marchand auquel le conseil des Indes avait accordé la permission d'y aller trafiquer, moyennant une certaine somme et sous certaines conditions.
  • 4 Terme d'astronomie. Le Navire Argo, constellation de l'hémisphère austral.

REMARQUE

Ce mot a été longtemps d'un genre incertain, tantôt masculin, tantôt féminin, comme on peut voir à l'historique. Malherbe l'a fait féminin dans ce vers : Car aux flots de la peur sa navire qui tremble, I, 4 ; Ménage, dans sa remarque sur ce vers, dit que navire féminin est partout usité en poésie où il fait mieux. Bossuet aussi : De même que l'ancre empêche que la navire ne soit emportée…, Bossuet, dans GANDAR, Choix de sermons de la jeunesse de Bossuet, p. 131. Aujourd'hui navire n'est plus que masculin.

SYNONYME

BÂTIMENT, VAISSEAU, NAVIRE. Bâtiment est le terme général. Vaisseau se dit plutôt des bâtiments de guerre, et navire de ce qui n'est pas bâtiment de guerre. Ces distinctions, qui sont techniques, n'empêchent pas que V. Hugo ait bien dit : Le navire à trois ponts qui tonne avec l'orage, Feuilles d'automne, I. Le langage commun confond navire et vaisseau ; étymologiquement, bâtiment se rapporte à la construction ; vaisseau à la contenance, à la capacité ; et navire, qui est le plus précis, à l'acte d'aller sur mer.

HISTORIQUE

XIe s. Par Sebre amont tut lur naviries [ils] turnent, Ch. de Rol. CLXXXVII.

XIIe s. Li reis feist aturner navirie en Asiongaber, Rois, p. 270.

XIVe s. Et si avoient navire de deux cent nefs, Chron. de Saint-Denis, t. I, f° 121, dans LACURNE. Celui qui est maistre de navire, Oresme, Eth. 112.

XVe s. Lesquelz Anglois ont prins et destroussé aucuns navires, Du Cange, abotinare. Si ils en estoient seigneurs [d'Audenarde], ils auroient la bonne riviere de l'Escaut et le navire [navigation] à leur aise et à leur volonté, Froissart, II, II, 58. Et à tout ledict navire [avec ladite flotte] vint à Rhodes devers le mareschal, Bouciq. II, 14. Dedans la navire, Commines, VII, 13. Je suis d'avis que hastivement les deux navires [barques] soient mises es fossez…, Perceforest, t. I, f° 83.

XVIe s. Aussi facilement que le timon faict retourner la navire…, Montaigne, II, 195. Tous les navires qui relaschoient du port de Pyrée, Montaigne, II, 220.

ÉTYMOLOGIE

Bourg. naivire, s. f. ; du bas-latin navirium, dérivé du latin navis (voy. NEF). Navire signifie proprement flotte, puis, par restriction, vaisseau. La forme navirie est purement orthographique, et ne compte que pour trois syllabes. À côté de navire, il y avait une forme en l : bas-latin, navilium ; provenç. navili, naveli ; ital. navile, naviglio.