« page.2 », définition dans le dictionnaire Littré

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page [2]

(pa-j') s. m.
  • 1Jeune garçon attaché au service d'un roi, d'un prince, d'un seigneur. Page de la chambre du roi, ou, simplement, page. Page, cherchez Rodrigue, et l'amenez ici, Corneille, Cid, II, 4. M. de Dangeau va en poste et par conséquent sans grand équipage, mais avec six gentilshommes et six pages magnifiquement habillés, Pellisson, Lett. hist. t. I, p. 405, dans POUGENS. Tout petit prince a des ambassadeurs ; Tout marquis veut avoir des pages, La Fontaine, Fabl. I, 3. Le duc et le marquis se reconnut aux pages, Boileau, Sat. V. Ce que vous n'imaginerez seulement pas, c'est la beauté des chevaux que montaient les pages de la grande et de la petite écurie, qui les menaient très adroitement, Maintenon, Lett. à Mme de Villarceaux, 27 août 1660. Les pages de la chambre étaient vêtus de casaques de velours couleur de feu, chamarrées d'or, Maintenon, ib. Sylvain, de ses deniers, a acquis de la naissance et un autre nom… il n'aurait pu autrefois entrer page chez Cléobule, et il est son gendre, La Bruyère, VI. Le petit page me demanda de quelle part je l'apportais [le billet], Lesage, Gil Blas, IV, 5. La foule de pages et de domestiques de livrée a disparu, pour mettre plus d'aisance dans l'intérieur des maisons, Voltaire, Louis XIV, 29.

    Tour de page, malice où il y a de l'espièglerie.

    Effronté comme un page de cour, ou, simplement, comme un page, hardi jusqu'à l'impudence. Plus effronté qu'un page, en vain on le retient, Th. Corneille, Baron d'Albikrac, I, 3.

    Être sorti de page, être hors de page, avoir accompli le temps de son service dans les pages. Outre cela, pour récompense, on me fit portier en sortant de page, Dancourt, 2e chap. du Diable boit. Prol. SC. 1. Elle le fit de moitié plus jeune, d'une beauté délicate, et non plus un Mars, mais un Adonis qui ne ferait que sortir de page, La Fontaine, Psyché, I, p. 75.

    Substantivement. Le hors de page, récompense qu'on donnait chez le roi aux pages sortant de service.

    Fig. Être hors de page, être hors de toute dépendance. Cette manière de gens qui ne sortent jamais de hors de page [qui en philosophie sont toujours écoliers], Malherbe, Épît. de Sénèque, XXXIII. Je vous ferai bien voir que je suis hors de page, Th. Corneille, D. Bertr. de Cigarral, V, 11.

    Mettre hors de page, affranchir de la dépendance. Il faut se relever de ce honteux partage, Et mettre hautement notre esprit hors de page, Molière, Femm. sav. III, 2.

  • 2Pages de la musique, enfants qui étaient élevés pour chanter devant le roi.
  • 3Page de la vénerie, jeune homme destiné à devenir officier de la vénerie.
  • 4Pages ou garçons de navire, ancienne dénomination des mousses.
  • 5Nom de quelques papillons.
  • 6 Terme de modes. Petite pince au moyen de laquelle on relève le bas de la robe sans être obligé de la tenir.

HISTORIQUE

XIIIe s. Mieux vaut uns gaians [un géant] c'uns pages, Et deus dismes c'uns terrages, Grieviler, dans Bibl. des ch. 4e série, t. V, p. 30. Là fu mestre Jehans li pages, Et Poilasne cil de Gamache [ce sont des professeurs de logique], Bat. des sept arts, p. 25. Qui parleront plus bel c'uns pages, C'uns trote à pié, ne c'uns corlieux [courier], Miracles de la sainte Vierge, dans DU CANGE, corerius.

XIVe s. [Ils] Metent à mort es herbergages Chevaliers, escuiers et pages, Guiart, dans DU CANGE, pagius. Et en cele heure commença un estris [querelle] Des valets et des pages qui gardoient les roncis, Guiart, ib. Son bacinet faiso it à son page porter, Guiart, ib. Vinrent à l'hostel de feu Robert deux larrons ou pillars et un page suivant les routes non communes ; les deux larrons et leur page furent tués en dormant, Guiart, ib. Aux aideeurs, souffleurs, hasteurs, pages, enfans et les autres appartenans à nostre cuisine, Guiart, ib. Page de la palefrenerie, Guiart, ib. Ne ne li faut [à mon cheval] vallet ne page ; Car il est housez d'avantage, Machaut, p. 80.

XVe s. Les pages, de froid et de mal-aise, ne pouvoient porter les lances, mais les laissoient cheoir, Froissart, II, II, 17. Il estoit jà assez grant pour estre hors du paige, Petit Jehan de Saintré, p. 131, dans LACURNE. Avec ses paiges, qui nobles hommes estoient, J. Lefevre de St-Remy, Hist. de Charles VI, p. 89, dans LACURNE. Pour combatre n'y avoit point plus de neuf mille hommes, dont je conte deux mille pour la sequelle et serviteurs des gens de bien de l'ost ; je ne conte point pages ne valets de sommiers ne telles gens, Commines, Mém. p. 656, dans LACURNE. Les Anglois eurent peur desdits Lombards du costé senestre qui vinrent derriere eux, et s'enfuirent les pages des Anglois et autres qui estoient derriere leur bataille, Berry, Chron. de 1402 à 1461, p. 372, dans POUGENS. Après les cent gentilshommes venoient les pages d'honneur montez sur grands chevaux, et les laquais à pied vestus de draps d'or et de velours allans autour de la personne du roy, André de la Vigne, Voy. de Naples de Charles VIII, p. 118, dans LACURNE.

XVIe s. Si eust-il discerné un page entre cent autres ; car il le sentoit à son pageois [façon de page], incontinent qu'il entroit en la salle, Despériers, Contes, XC. J'ay oui dire à une damenotable, que le roy François le louoit [Louis XI] extremement fort ; qu'il estoit un peu trop cruel et sanguinaire, et que c'estoit luy qui avoit mis les roys de France hors de page ; car devant luy, disoit-il, les rois n'estoient que des demy rois, et n'avoient encore gagné l'autorité et la preeminence sur leur royaume, Brantôme, Cap. franç. t. I, p. 50, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, pag ; ital. paggio. Mot d'origine douteuse ; Diez le tire de παίδιον, disant que le mot a pu venir en Italie par les Grecs ou par les croisades. Il faut remarquer que, primitivement, page n'a nullement le sens de jeune enfant de distinction ; il signifie un domestique de bas étage, valet de cuisine, domestique d'armée. Cela paraît se rapporter davantage au provençal pages, vilain, paguet, petit vilain ; du latin pagensis, qui vient de pagus, lieu de campagne ; page représenterait pagius. Ceci est confirmé par un important passage de Fauchet cité dans du Cange, pagius : « Le mot de page, jusques au temps des rois Charles VI et VII, sembloit être seulement donné à de viles personnes, comme à garçons de pied ; car encore aujourd'hui les tuilliers appellent pages ces petits valets qui sur des palettes portent sécher les tuiles vertes. »