« potage », définition dans le dictionnaire Littré

potage

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

potage

(po-ta-j') s. m.
  • 1Anciennement et proprement, ce qu'on met dans le pot, et surtout les légumes, pois, porreaux, etc.
  • 2Aujourd'hui, bouillon gras ou maigre, dans lequel on a mis des tranches de pain, ou quelque pâte alimentaire, ou de la purée, ou des légumes. Il [Balzac] a inventé une sorte de potage que j'estime plus que le Panégyrique de Pline et que la plus longue harangue d'Isocrate, Voiture, Lett. 125. Devant moi justement on plante un grand potage, D'où les mouches à jeun se sauvaient à la nage, Régnier, Sat. X. Chacun ayant de quoi faire du potage, ce qui est la vie du soldat dans les fatigues, Pellisson, Lett. hist. t. III, p. 301, dans POUGENS. Adieu chicorée et porreaux, Adieu de quoi mettre au potage, La Fontaine, Fabl. IV, 4. Hé bien, il faudra… quatre grands potages et cinq assiettes…, Molière, l'Av. III, 5. Je vis de bonne soupe et non de beau langage ; Vaugelas n'apprend point à bien faire un potage, Molière, Femm. sav. II, 7. Le bel usage veut qu'on dise un potage de santé et non pas une soupe de santé ; le même usage fait qu'on dit toujours à la cour : on a servi les potages, on est aux potages, et jamais on a servi les soupes, on est aux soupes, Caillères, Bon et mauv. usage, Convers. 1. Au moyen de quoi il [le paysan] puisse acheter quelque morceau de lard et un peu de beurre et d'huile pour se faire du potage, Vauban, Dîme, p. 99. Je fais plus de cas d'un rayon de soleil et d'un bon potage que de toutes les cours du monde, Voltaire, Lett. Richel. 27 janv. 1752.

    Au potage, au moment où l'on mange le potage. M. le comte Desguerets s'est enivré dès le potage, Destouches, Fausse Agnès, III, 2.

    Potage printanier, potage fait avec tous les légumes nouveaux du printemps, tels que carottes, oseille, laitues, pointes d'asperges, petits pois, romaines, petites fèves, etc.

    Potage à la Crécy, potage à la purée de carottes.

    Relevé de potage, le plat qu'on sert immédiatement après le potage.

    Mettre en potage, se dit d'une viande que l'on met dans le pot pour faire du bouillon. Il allait l'égorger [le cygne], puis le mettre en potage, La Fontaine, Fabl. III, 12.

    Pour tout potage, en ne servant pour tout le dîner qu'un potage ou du moins une seule chose. Quelque grabat, du pain pour tout potage, La Fontaine, Féronde.

    Fig. Pour tout potage, pour toute chose Que vous n'êtes, pour tout potage, qu'un faquin de cuisinier, Molière, l'Av. III, 6. Le pauvre Grignan n'a pour tout potage [pour faire le siége d'Orange] que le régiment des galères, qui a le pied marin, très ignorant d'un siége, Sévigné, 23 nov. 1673. Tu seras Paul-Louis pour tout potage, id est rien ; terrible mot ! Courier, Lett. à l'Acad.

    Fig. Pour renfort de potage, pour aggravation. J'ai encore ouï dire, madame, qu'il a pris aujourd'hui, pour renfort de potage, un maître de philosophie, Molière, Bourgeois gent. III, 3.

HISTORIQUE

XIIIe s. Item que tout potage reschaufé, touz pois, toutes feves, portez parmi la vile… soient arses et condempnés, Liv. des mét. 357. Cil qui en prison les font tenir, lor doivent livrer pain et vin et potage, tant comme il en poent uzer, au mains [moins] une fois le jour, Beaumanoir, LI, 7.

XIVe s. Et si puet user pour potage borroiches [bourrache], espinoces et semblables, H. de Mondeville, f° 95, verso. Une mine de potaige, c'est assavoir deux boisseaux feves, deux boisseaux pois blancs… , Du Cange, potagium. Choulx veulent estre mis au feu dès bien matin, et cuire très longuement et plus longuement que nul autre potage, Ménagier, II, 5.

XVe s. Semer feves, veces et autres potages, Prouffitz champ. et ruraux, VII, 2. Il estoit si courtois, si saige, Et avoit voulenté si franche, S'elle eust voulu pour tout potage, Elle l'eust mis dedans sa manche, Coquillart, Plaid. de la simple. Fist achepter le duc de Bourbon et mettre en ses vaisseaux douze cens tonneaux de vin, et deux cens lards avec foison de potages, et telles provisions que l'on porte en mer, Hist. de Loys III duc de Bourbon, p. 284, dans LACURNE.

XVIe s. J'entendz bien : tu es Limosin, pour tout potaige, Rabelais, Pant. II, 6. C'est un homme pour touts potages [ce n'est qu'un homme], Montaigne, I, 328. Et desjeunions luy et moy tous les matins de potage de soupe chaudiere, Paré, IX, 14. Bon gaignage [pàturage] fait bon potage, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 252. Ne potage sans bacon [jambon], ne nopces sans son, Leroux de Lincy, ib. p. 354. De mauvaise viande on ne sçait faire bon potage, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Pot : ce qu'on met dans le pot ; Berry, potage, légumes à mettre au pot ; espagn. potage ; ital. potaggio.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

POTAGE. Ajoutez : - REM. On peut voir au n° 2 que le bel usage au XVIIe siècle voulait qu'on dît potage de santé, et non soupe de santé. Mais l'exemple suivant montre que le potage de santé différait notablement de ce que nous nommons un potage : Si c'est un potage de santé, et qu'elle [une personne qualifiée] vous demande du chapon bouilli, qui est ordinairement dessus, la poitrine passe pour le meilleur endroit, les cuisses et les ailes vont après, De Courtin, la Civilité françoise, Paris, 1695, p. 107.