« prolonger », définition dans le dictionnaire Littré

prolonger

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

prolonger

(pro-lon-jé. Le g prend un e devant a et o : prolongeant, prolongeons) v. a.
  • 1Faire durer plus longtemps. J'ai prolongé de douze ans la durée de l'empire de Phocas…, Corneille, Héracl. Examen. Je cherche à prolonger le péril que je fuis, Racine, Mithr. II, 6. Et cette guerre, Arcas, selon toute apparence, Aurait dû plus longtemps prolonger son absence [d'Achille], Racine, Iphig. I, 1. Et ne prolongez point de dangereux adieux, Racine, Bajaz. II, 5. C'est prolonger la vie des grands hommes que de poursuivre dignement leurs entreprises, Fontenelle, Leibnitz. Aussitôt qu'il [Louis XI] aperçut François de Paule, il courut au-devant de lui, et se jeta à ses pieds, en le suppliant de lui prolonger la vie, Duclos, Œuv. t. III, p. 331. Ne croyant point que des jours où son esprit ne pourrait penser, où son cœur aurait perdu ses affections, méritassent d'être prolongés, Condorcet, Bucquet. Et dans l'être qu'il aime il prolonge son être, Delille, Imag. VI.
  • 2Différer, ajourner. Il [saint Grégoire de Nazianze] répond à ceux qui prenaient occasion de différer leur baptême à cause que Jésus-Christ n'a été baptisé qu'à trente ans, qu'il a été libre de prolonger son baptême à celui qui, étant la pureté même, n'avait rien à purifier, Bossuet, Déf. de la trad. et des saints Pères, VIII, 32.
  • 3Rendre plus long en étendue. Prolonger un mur, une galerie. Newton [voyant tomber un fruit d'un arbre]… se laissa aller à une méditation profonde sur la cause qui entraîne ainsi tous les corps vers une ligne qui, si elle était prolongée, passerait à peu près par le centre de la terre, Voltaire, Phil. Newt. III, 3. Aux rives du Silare, où des forêts d'yeuses Prolongent dans les champs leurs ombres ténébreuses, Delille, Géorg. III. Si le soleil prolonge un rayon lumineux, sa substance n'est pas séparée, mais étendue, Chateaubriand, Génie, I, I, 3.
  • 4 Terme de marine. Prolonger une côte, aller le long d'une côte. Je continuai à prolonger la côte à une lieue de distance…, La Pérouse, Voy. t. II, p. 227, dans POUGENS.

    Prolonger un navire, se ranger le long d'un navire pour l'aborder.

    Prolonger une bordée, pousser la bordée que l'on court plus loin qu'on n'avait d'abord intention de le faire.

  • 5Se prolonger, v. réfl. Recevoir plus de durée. Plus les affaires se prolongent, et plus elles donnent le temps au public de revenir à la raison, Voltaire, Lett. Richelieu, 3 mars 1777. Aux plaisirs de la table se mêlaient ceux de la danse, de la musique, et de plusieurs autres exercices, qui se prolongèrent bien avant dans la nuit, Barthélemy, Anach. ch. 35.

    Avec ellipse du pronom se. C'est à regret que je vois prolonger le temps qui doit nous rapprocher, Rousseau, à Vernes, 28 mars 1756.

  • 6Recevoir plus d'espace, plus d'étendue. Si de la mer du Sud nous passons dans celle du Nord, nous trouverons que l'empire espagnol s'y prolonge depuis le Mississipi jusqu'à l'Orénoque, Raynal, Hist. phil. VIII, 35. Le chemin [des Thermopyles] n'offre d'abord que la largeur nécessaire pour le passage d'un chariot ; il se prolonge ensuite entre des marais que forment les eaux de la mer et des rochers presque inaccessibles…, Barthélemy, Anach. Introd. part. II, sect. 2. Vois-tu cet horizon qui se prolonge immense ? P. Lebrun, Marie St. III, 1.

    Terme militaire. Se prolonger, étendre ses troupes. Le maréchal [Ney] s'était prolongé le 18 avril jusqu'à Weimar, d'où sa cavalerie avait chassé un parti de cavalerie prussienne, Charras, Hist. de la guerre de 1813, p. 510.

HISTORIQUE

XIIIe s. Cil est enemis de soi meisme, qui prolongue la vie à ses ennemis, Latini, Trésor, p. 399. Commence, car se tu prolongues [remets] les oevres de bien faire…, Latini, ib. p. 389.

XIVe s. Jà soit ce que la cure se prolongue, ne cesse pas de ceste cure, Lanfranc, f° 12.

XVe s. Cils qui prolongeoient tant qu'ils pouvoient, disoient : Commencez ailleurs et puis vous retournerez par ici, Froissart, III, IV, 11.

XVIe s. Si [Jugurtha] vescut encore là six jours combatant contre la faim, et desirant tousjours prolonger sa miserable vie jusques à la derniere heure, Amyot, Marius, 21. Pensant qu'il estoit plus expedient de prolonger le temps, et tirer ceste guerre en longueur, Amyot, Lucull. 15.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, prolongi ; provenç. perlongar, perlonjar, prolonguar ; espagn. perlongar, prolongar ; ital. prolungare ; du lat. prolongare, qui vient de pro, en avant, et longus, long (voy. LONG).