« ami », définition dans le dictionnaire Littré

ami

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

ami, ie

(a-mi, mie) s. m. et f.
  • 1Celui, celle qui nous aime et que nous aimons. Ami de cœur. Un ami d'enfance. Avoir beaucoup d'amis. Prendre quelqu'un pour ami. Une femme est souvent pour un homme une excellente amie. Qu'un ami véritable est une douce chose ! La Fontaine, Fab. VIII, 11. … cet ami sincère Du secret de nos cœurs connaît tout le mystère, Racine, Bérén. II, 4. Il a été l'ami de votre adversité, Massillon, Rech. Mais je veux bien vous répondre en amie, Corneille, Nicom. III, 2. Voilà, mes chers amis, ce qui me met en peine, Corneille, Cinna, II, 1. Il se fit des amis fidèles qui ne le trompèrent jamais, Bossuet, Polit. Il est un peu de mes amis, Molière, Fest. III, 5. Je suis ami de don Juan, Molière, ib. III, 5. D'une heure encore, ami, mon bonheur se diffère, Voltaire, Zaïre, III, 1. Et j'aurais les mortels et les dieux pour amis, En révérant le père et punissant le fils, Voltaire, Alz. III, 5.

    Ami de table, de jeu, etc. compagnon de plaisir. Vous êtes de l'humeur de ces amis d'épée Que l'on trouve toujours plus prompts à dégaîner Qu'à tirer un teston, s'il le fallait donner, Molière, l'Étour. III, 5.

    Ami de tout le monde, du genre humain, homme qui accorde indistinctement son amitié à tout le monde. L'ami du genre humain n'est point du tout mon fait, Molière, Mis. I, 1.

    Ami de cour, celui qui n'a que de fausses apparences d'amitié. Allons, ferme, poussez, mes bons amis de cour, Molière, Mis. II, 5.

    Mon ami, mes amis, termes d'affection avec des égaux, de familiarité avec des inférieurs.

    L'ami, se dit à l'égard d'inférieurs. L'ami, ferez-vous ce message pour moi ?

    Mon petit ami, est quelquefois aussi un terme de hauteur : Mon petit ami, je veux que vous sachiez…

    M'amie, abréviation de ma amie, expression familière en s'adressant à sa femme, à sa fille ou aussi à une femme d'une condition inférieure.

  • 2Amie, en langage de chevalerie, dame des pensées. Beaumanoir dit qu'il fallait combattre pour savoir qui avait la plus belle amie, Voltaire, Mœurs, 76.
  • 3Bon ami, bonne amie, se disent familièrement pour amant, maîtresse. Comment Mlle N. traiterait le bon ami de sa maman, Rousseau, Conf. VI.
  • 4 En termes de généalogie, amie, maîtresse, en parlant de bâtardise. Un tel eut d'une telle, son amie, un fils…
  • 5Allié, en parlant des États. La France tira peu de secours de ses amis. Ceux que tu laisseras en paix te seront bons amis, Vaugelas, Q. C. 424. J'en obtiendrai pour fruit le nom de son amie, Je vous verrai, consul, m'en apporter les lois, Corneille, Sertor. IV, 2.
  • 6Ami, qui a de l'attachement pour. Ami de son pays. Lequel de nous deux est l'ami du peuple ?
  • 7Qui a du goût pour. Les amis des lettres. Ami de la modération. Je suis fort ami de la brièveté. Naturellement, le jeune prélat était plus ami de ses aises que jaloux de commander, Anquetil, Ligue, III, 167.
  • 8Personnes liées par un intérêt de parti, de coterie ; fauteurs. Ami de la noblesse. Les amis de Catilina. Nul n'aura de l'esprit hors nous et nos amis, Molière, F. sav. III, 2.
  • 9Qui a de la sympathie pour, en parlant des animaux et des végétaux. Le chien est ami de l'homme. Le concombre est ami de l'eau.
  • 10 Adj. Qui appartient à un ami, favorable. Sentiments amis. Une divinité amie. Visage ami. Toutes les fois, tyran, qu'on se laisse adopter, On veut une maison illustre autant qu'amie, Corneille, Héracl. V, 3. Jugez si les coups qui partent d'une main si amie et si favorable peuvent n'être pas proportionnés à notre faiblesse, Massillon, Avent, Afflict.
  • 11Allié. Peuples amis, cités amies. Les prenant pour une troupe amie.

    Couleurs amies, couleurs qui produisent ensemble un effet agréable.

    Pôles amis, les pôles qui s'attirent, en parlant des aimants.

PROVERBES

Ami au prêter, ennemi au rendre, c'est-à-dire on se fait souvent un ennemi de celui à qui on a prêté de l'argent, en le lui redemandant.

Jamais honteux n'eut belle amie ; en amour, il faut être entreprenant.

Les bons comptes font les bons amis ; c'est-à-dire il faut régler les intérêts réciproques et se bien entendre, si l'on veut rester amis.

REMARQUE

Suivant Laveaux, on dit ami de quelqu'un, et non ami avec quelqu'un, et il ne faut pas imiter Voltaire, dans cette phrase : " Claveret, avec qui il était ami, avait été celui qui avait fait courir cette pièce. " Malgré cette remarque, on peut dire avec, qui ne choque en rien la grammaire. On dit aussi ami à : Quelque ami que vous lui soyez, Molière, Don Juan, III, 4. La neutralité entre des femmes qui nous sont également amies, La Bruyère, 13. Il faut observer que ce genre de régime ne doit s'employer qu'avec des pronoms qui se mettent avant le verbe.

HISTORIQUE

XIe s. Et si nul [quelque] parent n'ami ceste justice deforcent [s'opposent de force]…, Lois de Guill. 45. Et Pinabel mon ami et mon pair, Ch. de Rol. XXVI. Pour sa beauté dames lui sont amies, ib. LXXV. Eh ! reis amis, que [pourquoi] vous ici nen estes ? ib. CXXVI. Ami Rolans, Deus mete t'ame en flurs ! ib. CCIV.

XIIe s. Ami prisé, Ronc. p. 17. Tant fu blasmés de ses meillors amis, ib. p. 24. Tante pucele gaste [privée] de lor amis, ib. p. 72. Atant es-vous Braimimonde s'amie, ib. p. 115. Li cuens Rolant cui vous estes amie, ib. p. 160. Où est Rolant, qui de moi fit s'amie ? ib. p. 168. Que vous amez [aimiez] vostre loial ami, Couci, VII. Tuit mi penser sont à ma douce amie, ib. II. Las ! pourquoi l'ai de mes ieuz regardée La douce rien qui fausse amie a nom ? ib. VI. Assez aim [j'aime] mieuz mourir en bon desir Que vivre irez et m'amie haïr, ib. IX. Li cuens de Blois devroit bien mercier Force d'amours qui lui dona amie, ib. XX. Rois, vous savez que Diex a peu d'amis ; Ne onques mais n'en eut si grant mestier, Quesnes, Romanc. p. 101. Diex ! donnez m' [moi] à mari Garin, Mon dous amin, ib. p. 72. Jamais en nos aages [nous] ne portassions enseigne, [si] Ne fust vos bons amis li cuens Hues du Maine, Sax. XX. Tei amin [tes amis], chier sire, et tei proisme aprocharent et esturent encontre ti, Saint Bernard, 555.

XIIIe s. Il furent bon ami sans mal et sans envie, Berte, II. Adonc tenoient Franc les Tyois pour amis, ib. v. Ha Diex ! verrai-je mais, fait-elle, mes amis ? ib. XX. Devant lui sont venu si plus privé ami, ib. CVIII. Symons en [de Berte] fait sa niece, et Constance s'amie, ib. LX. Dame, or alés seoir arriere ; Amit avés et cointe et noble, Lai d'Ignaur. Si croi que mains en esprovast De ceus qui à son tens vivoient, Qui si ami de bouche estoient, la Rose, 5428. Se cil qui tant iert tes amis, En bien amer a son cuer mis, Lors vaudra miex sa compaignie, ib. 2713. Biaus amis, que faites-vous là ? Fait Cortoisie, ça venez, ib. 784. Tex gens ne poent ne ne doivent penre don ne promesse de nului, se ce n'est de lor amis de char, ou de lor sengneurs, Beaumanoir, XXXII, 33.

XIVe s. Et te souviengne de la guerre Qui a regné en mainte terre Par espicial ou pays Dont tu es toy et tes amis [partisans], Liv. du bon Jeh. 65.

XVIe s. L'amour de m'amye, Rabelais, Gar. I, 9. Ce gentilhomme lui sembla n'estre point si riche, qu'il lui dust tenir fort d'avoir sa amie non plus que lui, Marguerite de Navarre, Nouv. IX. Quoi, m'amie ? il n'est point un meilleur mari que le mien, Marguerite de Navarre, ib. X. Quand il vouloit, il parloit à son amie, Marguerite de Navarre, ib. XX. Ils estoient amis de leur païs — amis d'ambition et de trouble — Ils n'estoient ni amis l'un de l'autre, ny amis à eulx mesmes, Montaigne, I, 214. Ma niepce, m'amie, depuis que je t'ay cogneu…, Montaigne, IV, 328. Elle fit apparoir à Alessio s'amie couchée auprès de lui, Despériers, Contes, CXXVIII. Le regard du bien public feit que Brutus devint amy de Pompeius, duquel auparavent il estoit ennemy, et ennemy de Caesar, duquel il estoit amy, Amyot, Brut. et Dion, 5. Ces amis de fricassée et de nappe mise, Amyot, Comment discern. le flatt. 17. Au besoin cognoist on l'ami, H. Estienne, Précell. p. 180. La mort n'ha point d'ami, le malade n'en ha qu'un demi ; et quant au poure, point du tout, H. Estienne, ib. p. 167.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. aimin, aimie ; Berry, aimi, émi ; provenç. amic, amiga, amia ; espagn. amigo ; ital. amico ; d'amicus, ayant même radical que amare, aimer. Dans l'ancien français, nominatif singulier amis, régime ami ; nominatif pluriel ami, régime pluriel amis.