« faiblesse », définition dans le dictionnaire Littré

faiblesse

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faiblesse

(fè-blè-s') s. f.
  • 1Manque de force. La faiblesse du corps. Je ne sais ce que j'ai : je suis sans fièvre, je tousse moins, je dors très bien ; mais ma faiblesse est extrême, Maintenon, Lett. à Mme Glapion, t. III, p. 200, dans POUGENS. Elle [l'âme] ne doit plus se regarder elle-même, ni s'arrêter à la disproportion qu'elle trouve entre sa faiblesse et les difficultés de la voie où Dieu l'appelle, Massillon, Profess. rel. Serm. 1. Au commencement de la carrière, il nous soutient par des consolations sensibles ; c'est un lait dont il nourrit notre faiblesse, Massillon, ib. Serm. 2. Vous comprenez bien que l'intention de l'Église, en vous permettant l'usage des mets défendus, est de soulager votre faiblesse, et non d'aider votre sensualité, Massillon, Carême, Jeûne. Ceux dont la tendre enfance N'avait que la faiblesse et des pleurs pour défense, Voltaire, Orphel. I, 2. D'un moment de repos ma faiblesse a besoin, Delavigne, Paria, III, 2.
  • 2Il se dit des facultés intellectuelles. Faiblesse de jugement. La faiblesse de sa mémoire.
  • 3Manque de puissance, de ressources. La faiblesse des petits États n'autorise point à méconnaître leurs droits, Dict. de l'Acad.
  • 4Défaillance, évanouissement. Je vous vois prêt, monsieur, à tomber en faiblesse, Molière, Sgan. 11. Voilà une faiblesse qui prend à M. de Chaulnes avec le frisson, Sévigné, 79. Elle affectait d'avoir deux ou trois faiblesses par jour, Hamilton, Gramm. 10.
  • 5 Fig. Manque de talent, de capacité. Cet orateur a été d'une faiblesse extrême dans la discussion.

    Il se dit, dans un sens analogue, des productions de l'art et de l'esprit. La faiblesse du style. Molière sentit d'ailleurs la faiblesse de cette petite comédie, et ne la fit point imprimer, Voltaire, Vie de Molière. Il a fallu que longtemps après il soit venu un homme supérieur, pour que les Français qui ne jugent des arts que par comparaison, sentissent combien la plupart des airs détachés et des symphonies de Lulli ont de faiblesse, Voltaire, Comm. sur Corn. Rem. Pertharite, Préf.

    La faiblesse d'un raisonnement, d'un argument, leur insuffisance à prouver ce qui est en question.

  • 6Manque de force morale. Dans mon sort ravalé je sais vivre en princesse ; Je fuis l'ambition, mais je hais la faiblesse, Corneille, Théod. II, 4. C'est faiblesse d'attendre Le mal qu'on voit venir, sans vouloir s'en défendre, Corneille, Pomp. II, 4. C'est faiblesse d'aimer qui ne vous aime pas, Corneille, Suréna, III, 3. Quelle faiblesse à moi d'en croire un furieux ! Racine, Mithr. III, 3. J'eus la faiblesse d'éluder mon serment, Fénelon, Tél. X. L'impulsion à laquelle ce prince obéissait, n'altérait point son jugement : vrai caractère de la faiblesse ! Duclos, Règne de Louis XIV, Œuv. t. v, p. 96, dans POUGENS. Mais avec quel courroux, avec quelle tendresse, Mahomet de mes sens accuse la faiblesse ! Voltaire, Fanat. IV, 3. Ce prince [Louis XIII] n'avait guère d'autre faiblesse que celle d'être gouverné dans sa maison, dans son État, dans ses affaires, dans ses moindres occupations ; cette faiblesse le rendit malheureux toute sa vie, Voltaire, Mœurs, 175.

    On dit de même faiblesse de caractère, d'âme, d'esprit, de cœur, de courage, de résolution.

  • 7Complaisance, inclination qui se laisse aller. Les faiblesses d'une mère pour ses enfants. Ah ! que vous savez bien ici contre moi-même, Perfide, vous servir de ma faiblesse extrême ! Molière, Mis. IV, 3. Je ne veux dire aucune douceur à M. de Grignan ; je me sens une telle faiblesse pour lui que je me fais scrupule de tout, Sévigné, 611. Quelque faiblesse que j'aie pour les modes, Sévigné, 77. Me voilà sans défense en proie à vos appas, Ma belle enfant ; mon cœur a beaucoup de faiblesse, Un coup d'œil m'assassine ou tout au moins me blesse, Boursault, Fables d'Ésope, I, 3. Si vous sentiez pour moi quelque heureuse faiblesse, Racine, Alex. II, 5. Ces noms de roi des rois et de chef de la Grèce Chatouillaient de mon cœur l'orgueilleuse faiblesse, Racine, Iphig. I, 1.
  • 8Défaut de raison, d'empire sur soi-même, et actes qui en sont la suite. Je vous prie de ne point parler de mes faiblesses, mais vous devez les aimer, et respecter mes larmes, puisqu'elles viennent d'un cœur tout à vous, Sévigné, 33. J'honore votre force et votre philosophie, et je ne ferai confidence de mes faiblesses qu'à ceux qui n'ont pas plus de courage que moi, Sévigné, 13 oct. 1673. Combattez-vous vos sens ? domptez-vous vos faiblesses ? Boileau, Épît. XI. Et vos cœurs rougiraient des faiblesses du mien, Racine, Alex. I, 2. Zaïre, il faut pourtant avouer ma faiblesse ; D'un mouvement jaloux je ne fus pas maîtresse, Racine, Bajaz. I, 4. Vous n'avez point du sang dédaigné les faiblesses, Racine, Iphig. IV, 4. Je me flattais sans cesse Qu'un silence éternel cacherait ma faiblesse [un amour], Racine, ib. II, 1. Vil spectacle aux humains des faiblesses d'amour, Racine, Bérén. v, 6. Combien d'autres âmes qui, après avoir fini les passions d'éclat, conservent encore toutes les autres, et font entrer toutes leurs faiblesses dans leur vertu ! Massillon, Profess. rel. Serm. 1. Il [Dieu] ne sait point punir des moments de faiblesse, Voltaire, Henr. VII. Les faiblesses qu'on met au grand jour ne plaisent qu'à la malignité, Voltaire, Louis XIV, 25. Songe que la colère, l'envie, l'indignation, la pitié sont des faiblesses indignes d'un philosophe, Diderot, Opin. des anc. phil. (cyniques). De n'offrir qu'aux talents, de vertus ennoblis, Et qu'à l'amitié douce et qu'aux douces faiblesses D'un encens libre et pur les honnêtes caresses, Chénier, Élég. XVI. Enfin, pour vous rendre compte de toutes ses faiblesses, elle avait peur en voiture, et elle se trouvait mal en voyant une araignée ou une souris, Genlis, Veillées du château t. I, p. 23, dans POUGENS.
  • 9Faiblesse se dit en parlant d'une femme qui n'a pas résisté à la séduction. Quelle folie que celle d'un jeune homme qui croit à la fidélité d'une femme déjà célèbre par ses faiblesses, et à qui l'attrait du plaisir a fait oublier la pudeur ! Marmontel, Mém. III.
  • 10En parlant des choses, manque de solidité ou de force. La faiblesse d'une poutre, d'une digue, d'une corde. La faiblesse d'une place de guerre, d'un poste.
  • 11Il se dit de ce qui est peu considérable en son genre. Malgré la faiblesse du nombre ils voulurent combattre. La faiblesse de nos connaissances. La faiblesse de sa voix [d'Isocrate], jointe à une timidité naturelle, l'avait empêché de se produire en public et de monter, comme les autres, sur la tribune aux harangues, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. VI, p. 64, dans POUGENS. L'expédition de l'amiral Anson est une preuve de ce que peut un homme intelligent et ferme malgré la faiblesse des préparatifs et la grandeur des dangers, Voltaire, Louis XV, 27.
  • 12La faiblesse d'un poids, d'une mesure, d'une monnaie, condition d'un poids, d'une mesure, d'une monnaie qui sont un peu au-dessous de la valeur légale.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et il ala tout chancelant pour la feblesce de sa maladie, et prist le dey [dé] et les tables et les geta en la mer, Joinville, 253. Grant peché firent cil qui lui loerent [conseillèrent] l'alée, à la grande flebesce là où son corps estoit, Joinville, 300.

XIVe s. S'il [les ligaments des vertèbres] estoient poi, il ne pourroient le chief soustenir pour leur feblesce, H. de Mondeville, f° 19, verso.

XVIe s. Il lui prit une foiblesse, dont elle se pasma incontinent et perdit la parole entierement, Amyot, Brutus, 18.

ÉTYMOLOGIE

Faible ; Berry, faibleté ; provenç. febleza ; anc. catal. feblea. L'ancien français avait aussi foibleté, qui est resté dans certains patois.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FAIBLESSE. Ajoutez : - REM. On a dit être en faiblesse, par opposition à être en force. Sur tous les points où l'action centrale est en faiblesse et devient impuissante, Journ. offic. 15 juin 1875, p. 4307, 1re col.