« fleurir », définition dans le dictionnaire Littré

fleurir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

fleurir

(fleu-rir) v. n.
  • 1Pousser des fleurs, être en fleur. Entre les arbres l'amandier fleurit des premiers, et le néflier des derniers. Défrichez cette terre sauvage, faites fleurir comme lui [Apollon] le désert, Fénelon, Tél. II. Madame a passé du matin au soir, ainsi que l'herbe des champs ; le matin elle fleurissait, avec quelle grâce vous le savez ! le soir nous la vîmes séchée, Bossuet, Duch. d'Orl.

    Par extension, il se dit de la barbe qui commence à pousser à la joue d'un jeune homme. Veux-tu voir tous les grands à ta porte courir ? Dit un père à son fils dont le poil va fleurir, Boileau, Sat. VIII.

    Fig. Être dans son commencement. Dans l'un [Télémaque] la sagesse ne fait encore que fleurir ; dans l'autre [Mentor] elle porte avec abondance les fruits les plus mûrs, Fénelon, Tél. X.

  • 2 Fig. Être dans un état brillant comparé à l'éclat d'un arbre en fleur. Par ses soins tout nous rit, tout fleurit, tout succède, Rotrou, Venceslas, V, 9. Le juste fleurira comme le palmier, et il se multipliera comme le cèdre du Liban, Sacy, Bible, Psaume XCI, 13. Le règne où fleurissent la piété, la justice…, Bossuet, Hist. I, 6. Faire fleurir l'agriculture, Bossuet, ib. III, 5. L'unité catholique, qui a fait fleurir durant tant de siècles l'Église et la monarchie d'Angleterre, Bossuet, Reine d'Anglet. Marot, bientôt après fit fleurir les ballades, Boileau, Art. p. I. Parmi les doux plaisirs d'une paix fraternelle, Paris voyait fleurir son antique chapelle, Boileau, Lutr. I. L'occasion ne peut être meilleure, ni les conjonctures plus favorables, si je désire du moins de fleurir et de prospérer, La Bruyère, XII. Rien ne rappelle davantage l'idée de l'ancienne Grèce ; car, si les arts fleurirent en Grèce au milieu des guerres étrangères et civiles, ils eurent en Italie le même sort ; et presque tout y fut porté à sa perfection, Voltaire, Mœurs, 121. Il est certain qu'Homère florissait deux générations après la guerre de Troie, Voltaire, Ess. poésie épique, ch. 2. On peut le mettre [Saint-Évremond] au rang des hommes aimables et pleins d'esprit qui ont fleuri dans les temps brillants de Louis XIV, mais non pas au rang des hommes supérieurs, Voltaire, Mél. littér. Lett. sur les Français, St-Évrem. Épris de l'art divin qui fleurit en Provence, Poëte, il a chanté le succès de la France, Delavigne, Vêp. sicil. I, 2.
  • 3 V. a. Parer d'une fleur, d'un bouquet. La comtesse : Qui t'a donc fleurie si matin ? - Florence : Madame on ne m'a point fleurie, c'est moi qui ai fait des bouquets, Beaumarchais, Mère coup. II, 4.

    Fig. Fleurir son style, y mettre beaucoup d'ornements, de fleurs.

  • 4Se fleurir, v. réfl. Prendre des fleurs pour en faire un bouquet ou les mettre à sa boutonnière, à son chapeau. Il s'est fleuri en passant dans le parterre.

REMARQUE

1. Fleurir, signifiant être dans un état de prospérité, de splendeur, fait à l'imparfait fleurissait et florissait, et toujours florissant au participe présent. Il faut aussi toujours dire florissait quand il s'agit d'une personne ou d'une collection de personnes : Ronsard florissait au seizième siècle ; Athènes florissait sous Périclès. Cependant cette règle, qui est arbitraire, puisque c'est une tentative pour utiliser la double forme que ce verbe a par accident, n'en a pas été une pour tous les bons auteurs. Hésiode fleurissait trente ans avant lui, Bossuet, Hist. I, 6. Cet ordre respecté [les dominicains] fleurissait dans la France, Voltaire, Henr. V. Il est certain que les affaires ne sauraient être plus fleurissantes, Guez de Balzac, Lettres, VII, 49. La réputation toujours fleurissante de ses écrits, Bossuet, Disc. Acad.

2. Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir quand on veut exprimer une action : l'arbre a fleuri aujourd'hui ; avec l'auxiliaire être, quand on veut marquer un état : l'arbre est fleuri depuis longtemps. Mais quand il signifie être dans un état de prospérité, de splendeur, il veut toujours l'auxiliaire avoir.

HISTORIQUE

XIe s. Charles le vielz, à la barbe flurie, Ch. de Rol. LXXV. Ja estes vous viels et fluriz et blans, ib. CXXXII.

XIIe s. [Espines] poignanz et aspres qui ne peuvent florir, Ronc. p. 155. Adonc florist mes cuers et mes voloir En bone amor…, Couci, VIII. Dame, mar [à malheur] [je] vi le clair vis et la face Où rose et lis florissent chascun jour, ib. X. À la douzor du temps qui raverdoie Chantent oisel et florissent verger, ib. XX.

XIIIe s. Dont peussiés veoir le bras Saint-George flori tout contre-mont de nés [nefs] et de veissiaus et de galies et d'huissiers, Villehardouin, LXI. Entour la Saint-Jehan que la rose est fleurie, Berte, II. [Elle ne brille] Nient plus qu'en prés fleuris semble gaste bruiere, ib. XI. Et bien sachiés que qui por Diu morra en ceste besoigne, s'ame s'en ira toute florie en paradis par-devant lui, H. de Valenciennes, VII. Bien puet en robes de colors Sainte religion florir, la Rose, 11135. Toute sa teste [celle de la vieillesse] estoit chenue, Et blanche cum s'el fust florie, ib. 347. [Clercs] Qui, quant aus biens du monde, contre raison florissent, J. de Meung, Test. 511. Jadis au tans des anciens Estoit molt maus, mais que li biens Floriscoit plus et ert [était] en face, Barl. et Josaphat, p. 2.

XIVe s. Et avril soit exaussiez, honourez, Qui florist de toutes parts Les prés, les bois et les chams et les pars [parcs], Machaut, p. 130.

XVe s. Pour embelir et fleurir sa mauvaiseté et retraire la roine en Angleterre, et remettre en son danger [pouvoir] et du roi son mari [Édouard II, Isabelle], Froissart, I, I, 11.

XVIe s. [Molinet] aux vers fleuris, Marot, III, 305. Il se doubtoit fort que ses actes seroient beaux et glorieux, mais que, après avoir fleury peu de jours, ilz se feneroient et passeroient incontinent, Amyot, Dion, 30. Il laissa une posterité qui depuis a flori longtemps au païs, Amyot, Cimon. 1. Il s'empara de l'Hespagne, laquelle il trouva florissante en nombre de peuples, Amyot, Sertor. 9. L'eloquence a flori le plus à Rome lorsque…, Montaigne, I, 380. En la saison où la science fleurissait le plus, Montaigne, II, 206.

ÉTYMOLOGIE

Pic. flourir ; provenç. florir ; espagn. florecer ; ital. fiorire ; du latin florere (avec changement de conjugaison), dérivé de flos, floris, fleur. Le présent je fleuris et le participe fleurissant supposent une forme dérivée floriscere.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FLEURIR. Ajoutez :
5 Terme de tanneur. S'emploie en parlant du tan, pour désigner, à la surface du tan, des fructifications d'un champignon, l'aethalium septicum, du groupe des myxomycètes, Annales des sciences naturelles, Botanique, 1859, t. XI, p. 154.