« foule », définition dans le dictionnaire Littré

foule

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foule

(fou-l') s. f.
  • 1 Terme d'arts. Action de fouler les draps ; préparation qu'on leur donne en les foulant par le moyen d'un moulin, afin de les rendre plus serrés et plus forts.
  • 2 Terme de chapelier. Opération par laquelle on foule les feutres dans une cuve pleine de liquide. Ouvriers à la foule. Cuve à la foule.

    Atelier où l'on foule. Aller à la foule. Que tous les marchands bonnetiers qui ont des foules chez eux payeront par chaque foule cent sous par an, Sentence de 1737.

  • 3Morceau de bois qui sert à tenir les jumelles d'un peigne de tisserand convenablement écartées.

    Terme de marine. Longue perche pour pousser la ralingue du vent afin d'ouvrir les voiles le plus possible.

    Anciennement, mât de foule, se disait de ce qui a été nommé dans la suite mât de fougue (voy. FOUGUE 2).

  • 4 Terme de pêche. Espèce de pêche dans laquelle, foulant du pied le fond des rivières, ou de la mer, quand la marée est basse, on pique avec une sorte de fourche le poisson que l'on rencontre enfoui dans le sable ou la vase.
  • 5 Fig. Ce qui foule les hommes, comme fait le métier à fouler, oppression, vexations (vieilli en ce sens). Plusieurs charges que la nécessité a fait créer dans ces derniers temps à la grande foule des peuples, Vauban, Dîme, p. 212.
  • 6Presse qui résulte d'une grande multitude de gens, et, par suite, cette multitude elle-même. Il vint ici chercher du soulagement et recevoir des propres mains de Dieu, qui aime le silence et qui habite la solitude, ce qui ne se trouve point dans les discours de la philosophie ni dans la foule du monde, Guez de Balzac, lett. 15, liv. I. Une poutre branlante Vient menaçant de loin la foule qu'elle augmente, Boileau, Sat. VI. Ce même Antiochus, se cachant à ma vue, Me laisse à la merci d'une foule inconnue, Racine, Bérén. I, 4. Seule elle me tira de la foule sanglante, Voltaire, Olymp. II, 2. Beaucoup de ces hommes isolés étaient des maraudeurs qui feignaient une maladie ou une blessure, pour s'écarter ensuite ; ce qu'on n'avait pas le temps d'empêcher, et ce qui arrivera toujours dans ces grandes foules qu'on pousse en avant avec tant de précipitation, Ségur, Hist. de Nap. VI, 1. Jeté sur cette boule, Laid, chétif et souffrant, Étouffé dans la foule, Faute d'être assez grand, Béranger, Vocation.
  • 7Le vulgaire, le commun des hommes. La foule ignorante et capricieuse. Il te met dans la foule ainsi qu'un misérable, Molière, Femmes sav. III, 5. Vous avez besoin de plus de précaution que ceux qui naissent dans la foule, Massillon, Carême, Prosp. La foule des humains n'existe point pour moi, Voltaire, Tancr. II, 1. Les comtes de Montézuma sont de simples gentilshommes chrétiens et confondus dans la foule, Voltaire, Mœurs, 147.

    Se tirer de la foule, se distinguer, s'élever au-dessus du commun.

    Fig. Vous avais-je sans choix Confondu jusqu'ici dans la foule des rois ? Racine, Bérén. III, 1.

  • 8 Par extension, grand nombre. La France possède une foule d'hommes célèbres. Une foule de gens vous diront…

    On le trouve quelquefois au pluriel. Que cet homme passât sa vie à faire réponse à des foules d'amis inconnus, Rousseau, Lett. sans date, t. XX, p. 88, éd. MUSSET-PATHAY. Des foules de désœuvrés, Rousseau, ib.

    Il se dit aussi des choses. Une foule de raisons. Quelle foule d'États je mettais à vos pieds ! Racine, Mithr. IV, 4. Dans la foule des révolutions que nous avons vues d'un bout de l'univers à l'autre, il paraît un enchaînement fatal des causes qui entraînent les hommes, comme les vents poussent les sables et les flots, Voltaire, Mœurs, 196.

  • 9En foule, loc. adv. En grand nombre, en parlant des personnes. Seigneur, de tous côtés le peuple vient en foule, Corneille, Nicom. V, 5. Les peuples se convertissaient en foule, Bossuet, Hist. I, 10. Mais on se jette en foule au-devant de mes pas, Racine, Iphig. V, 4. On eût pu se rappeler ces jours brillants de la vie de M. Duverney, où la ville, la cour et les étrangers venaient en foule de toutes parts pour l'entendre, Mairan, Éloges de Hunauld.

    Il se dit aussi des choses. Les idées se présentent en foule à mon esprit. Mais j'ai des biens en foule et je puis m'en passer, Boileau, Sat. VIII.

REMARQUE

1. Du temps de Corneille on disait aussi à la foule, au lieu de en foule : Les Parthes, à la foule, aux Syriens mêlés, Corneille, Rodog. V, 2. C'est un archaïsme, voy. l'historique.

2. Lorsque foule est suivi d'un autre substantif, le verbe suit le nombre de ce dernier substantif : Une foule de monde y courut ; Une foule de personnes y coururent. Mais, même en ce cas, rien n'empêche de faire accorder le verbe avec foule : Une foule de gens se sont opposés à mon passage ou s'est opposée. Les uns courent se jeter dans la rivière de Narva, et une foule de soldats y fut noyée, Voltaire, Hist. Buss. I, 11.

HISTORIQUE

XIIIe s. Renart, fet-il, moult sés de bole [ruse] ; Tu t'es getez de meinte fole, Ren. 14444. Quant entrée estes dans la foule, Où chascun vous hurte et defoule…, la Rose, 9290.

XVe s. À la charge et foule d'icelle cour et d'aucun soupçon d'icelle, Du Cange, accaratio.

XVIe s. La foule estoyt à qui premier saulteroyt en la mer aprez leur compaignon, Rabelais, Pant. IV, 7. Ce n'est pas que le sage ne puisse partout vivre content, voire et seul en la foule d'un palais, Montaigne, I, 274. La foule qui les suyvoit, Montaigne, II, 38. Il semblera peut estre que ceste foule [exaction] soit petite ; mais je pense qu'elle se monte plus de douze cens mille livres par an, Lanoue, 105. Combattre en foule et en desordre, Amyot, Cam. 70. Et y avoit des sergens tenans des bastons en leurs mains, pour faire retirer la presse et serrer ceulx qui se jetteroient à la foule trop en avant par les carrefouis, Amyot, P. Aem. 55. Et Mithridates mesme, parmy la presse et la foule de ceux qui s'enfuyoient en si grand effroy, se jetta hors de son camp, Amyot, Lucull. 31. Comme mieux cognoissant les affaires, foules et necessités de la Germanie, Carloix, IV, 2. … Nous voulons en foule ou en carriere, À cheval ou à pié, ou joints à la barriere, Maintenir que l'amour est plus vif et plus fort, Belleau, Œuv. t. II, p. 92, dans LACURNE. Piquer bien un cheval en foule ou en carriere, Belleau, ib. t. II, p. 22.

ÉTYMOLOGIE

Voy. FOULER ; espagn. folla ; portug. fula ; ital. folla, fola.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FOULE. Ajoutez :
10Vignes en foule, par opposition à vignes en ligne. Médaille d'argent… à M. de Cissey, à Cissey, commune de Merceuil, Côte-d'Or, pour sa transformation de vignes en foule en vignes en lignes, Journ. offic. 11 juin 1870, p. 978, 4e col.