« lent », définition dans le dictionnaire Littré

lent

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

lent, ente

(lan, lan-t') adj.
  • 1Proprement, souple, flexible, sens qui est un latinisme rarement usité et seulement en poésie. À moins qu'avec adresse un de ses pieds lié Sous un cuir souple et lent ne demeure plié, Chénier, Idylles, Fille du vieux pasteur. Que son cou faible et lent ne soutient plus sa tête, Chénier, Fragm. de l'art d'aimer.
  • 2Par un passage du sens de flexible à mou, faible, qui n'agit pas avec promptitude, qui tarde, en parlant des personnes. Il est lent dans tout ce qu'il fait, à tout ce qu'il fait. C'est un esprit lent. [Antiochus] Un peu trop lent peut-être à servir ma colère, Corneille, Rodog. IV, 3. Mangez-le vite [l'agneau pascal], car c'est la victime du passage du Seigneur ; il ne doit y avoir rien de lent ni de paresseux dans ceux qui se nourrissent de la viande que Jésus nous a donnée, Bossuet, Élévat. sur myst. IV, 4. Je le trouvais trop lent à traverser l'Asie, Racine, Alex. I, 2. Mais que Phorbas est lent pour mon impatience ! Voltaire, Œdipe, II, 5. Autant la nature nous a paru vive, agissante, exaltée dans les singes, autant elle est lente, contrainte et resserrée chez ces paresseux, Buffon, l'Unau.
  • 3Qui manque de promptitude, d'activité, qui tarde, en parlant des choses. Un poison lent. Une mort lente. L'état de mes affaires ne demande pas des remèdes lents, Vaugelas, Q. C. liv. III, dans RICHELET. [Une femme] le matin dans un repos lent et plein de mollesse, et le soir dans un soin frivole de ses ajustements et de ses parures, Bourdaloue, Dim. de la Sexag. Dominic. t. I, p. 423. Quatre bœufs attelés, d'un pas tranquille et lent, Promenaient dans Paris le monarque indolent, Boileau, Lutr. II. J'irais attendre ailleurs une lente vengeance ? Racine, Andr. IV, 3. Cette même Agrippine Que mon père épousa jadis pour ma ruine, Et qui, si je t'en crois, a de ses derniers jours, Trop lents pour ses desseins, précipité le cours ? Racine, Brit. I, 4. Moments trop rigoureux, Que vous paraissez lents à mes rapides vœux ! Racine, Bérén. IV, 1. Échauffez mes transports trop lents, trop retenus, Racine, Phèdre, IV, 4. Le bras de la justice, Quoique lent à frapper, se tient toujours levé, Rousseau J.-B. Odes, I, 12. Que ces moments, grand Dieu, sont lents pour ma fureur ! Voltaire, Zaïre, V, 6. Les conseils des rois sont un sanctuaire, dont le temps seul ouvre le voile d'une main lente, Raynal, Hist. phil. X, 16. Elle n'a rien de la vivacité italienne ; tous ses mouvements sont lents, Genlis, Ad. et Théod. t. II, p. 32. La vengeance est boiteuse, elle vient à pas lents, Mais elle vient, Hugo, Hernani, II, 3.

    Terme de marine. Se dit d'un navire qui n'obéit pas assez vivement à l'action du gouvernail.

  • 4 Terme de médecine. Fièvre lente, fièvre continue, peu intense dans ses symptômes, et qui suit une marche chronique. Souvent le mot fièvre lente est synonyme de fièvre hectique.

    Pouls lent, pouls dont les battements sont en nombre moindre que dans l'état normal. On le dit aussi quand la systole est plus prompte que la diastole.

REMARQUE

Lent veut à avec les verbes et dans avec les noms : lent à choisir, lent dans son choix. L'ancienne langue disait avec un verbe aussi bien lent de que lent à.

HISTORIQUE

XIe s. Dist Oliviers : dehait [mal] ait li plus lenz, Ch. de Rol. CXLII.

XIIe s. Virge [vierge] es et virge concevras ; Ne seies pas à croire lente, Wace, Vierge Marie, p. 43. Sur un cheval qui de courre n'est lent, Roncisv. 135. Mais trop vient lent, dame, vostre secours, Couci, VII.

XIIIe s. Si que ne put mangier, tant fu et floible et lente, Berte, XLVIII. Repenties somes trop lent [nous nous sommes repenties trop tard], Lai du trot. Ne soit l'ung d'aidier l'autre lent, la Rose, 4709. Soies lens à ire, et isnés [prompt] à misericorde, Latini, Trésor, p. 386. Et dame Mahaus [Mathilde], cui fu lent Que ele ait l'avoir des escrins, Fabliaux mss. p. 136, dans LACURNE.

XVe s. …Tel doit estre regent, Lent de punir, aux bons non faire ennui, Deschamps, Des vertus nécess. au prince.

XVIe s. Il mourut en defaillant petit à petit, tant pour sa vieillesse que pour une maladie lente qui lui survint, Amyot, Numa, 34. L'autre, lent et consideratif comme un Fabius, opina hazardeuzement, Lanoue, 651. Humeurs froids, lents [tenaces], gros et glueux, Paré, V, 2.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, lêne, lente (au féminin seulement) ; provenç. lent ; espagn. et ital. lento ; du lat. lentus, flexible, visqueux, lent.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

… LENT, suffixe, en latin lentus, qui se trouve dans fæculentus, sanguinolentus, vinolentus, pestilentus, etc. ; il est considéré par Bopp (Gr. comp. §§ 20, 795) comme une altération phonétique du suffixe sanscr. vant, qui signifie pourvu de, muni de. Corssen (Beitr. p. 304) combat, et il a raison, cette théorie, et nie que le v devienne l en latin ; il pense que vant devient ent, qui se trouve dans cruentus, fluentus, etc. ; que l'l appartient à un suffixe précédent : pestilentus, de pest-il-entus, fæculentus, de fæc-ul-entus, etc. ; et que le suffixe lentus ainsi formé s'est introduit dans sanguinolentus, vinolentus, où l'l est inorganique.