« obéissance », définition dans le dictionnaire Littré

obéissance

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obéissance

(o-bé-i-san-s') s. f.
  • 1Action de celui qui obéit. Nous vous rendrons, seigneur, entière obéissance, Corneille, Héracl. II, 6. Nous demeurons dans l'obéissance à leurs décrets, Pascal, Prov. XVIII. On me contait hier la comédie de ce Malade imaginaire que je n'ai point vue : il était dans l'obéissance exacte à ces messieurs [les médecins] ; il comptait tout…, Sévigné, 16 sept. 1676. Voilà par où commence l'esprit de révolte ; on raisonne sur le précepte, et l'obéissance est mise en doute, Bossuet, Hist. II, 4. Sans vous contenter de l'obéissance d'action, vous y ajouterez l'obéissance de volonté, Bourdaloue, Exhort. sur l'obéiss. relig. t. I, p. 275. La puissance et l'autorité s'opposèrent à son dessein [de se faire religieuse]… mais… combien de fois accusait-elle son obéissance quoique forcée ? Fléchier, Aiguillon. L'obéissance qu'elle rendait au plus grand et au plus sage de tous les rois, Fléchier, Mme de Mont. Enfin des légions l'entière obéissance Ayant de votre empire affermi la puissance…, Racine, Brit. IV, 2. Leurs jours me répondront de votre obéissance, Voltaire, Orphel. IV, 4. Les princes ne sont pas assez heureux pour avoir des amis ; et, dans leurs derniers moments, ils ne trouvent pas toujours de l'obéissance, Duclos, Œuvr. t. II, p. 465.

    Prêter obéissance à un prince, se soumettre solennellement à sa domination.

  • 2La disposition à obéir, l'habitude d'obéir, la soumission d'esprit aux ordres des supérieurs. Au nom de cette aveugle et prompte obéissance Que j'ai toujours rendue aux lois de la naissance, Corneille, Poly. III, 4. Quiconque se dérobe à l'humble obéissance, Bannit ma grâce en même temps, Et se livre lui-même à toute l'impuissance De ses désirs vains et flottants, Corneille, Imit. III, 13. Rendez vos âmes pures par une obéissance d'amour, Sacy, Bible, St-Pierre, 1re épître, I, 22. L'obéissance qu'ils doivent à leurs supérieurs, Pascal, Prov. VI. L'Espagne sur ce sujet [les observances de l'Église] a des coutumes que la France ne suit pas ; mais la reine se rangea bientôt à l'obéissance, Bossuet, Mar.-Thér. La perfection de l'obéissance demande que tout l'homme soit soumis à Dieu, Bourdaloue, Exhort. sur l'obéiss. relig. t. I, p. 288. Dans une cour… Où les honneurs et les emplois Sont le prix d'une aveugle et lâche obéissance, Racine, Esth. III, 8. Vous seul, seigneur, vous seul, vous m'avez arrachée à cette obéissance où j'étais attachée, Racine, Mithr. IV, 4. Je veux moins de valeur et plus d'obéissance, Racine, Iph. IV, 6. L'extrême obéissance suppose de l'ignorance dans celui qui obéit ; elle en suppose même dans celui qui commande, Montesquieu, Esp. IV, 3.

    Terme de pratique. Passer obéissance, acquiescer à.

    Chez les religieux, obéissance s'est dit pour obédience. Les trois vœux des moines, chasteté, pauvreté, obéissance.

  • 3Il se dit des animaux. L'obéissance du chien. Il [le cheval dressé] sait aller le pas, il sait courir, non plus avec cette activité qui l'épuisait, par laquelle son obéissance était encore désobéissante, Bossuet, Méd. sur l'Év. 2e partie, 4e jour.
  • 4L'obéissance de, l'autorité de. Pour votre Perpenna, que sa haute naissance N'affranchit point encor de votre obéissance, Corneille, Sertor. II, 2. Si le corps de l'homme fût mort et ressuscité pour jamais dans le baptême, on ne fût entré dans l'obéissance de l'Évangile que par l'amour de la vie, Pascal, Lett. sur la mort de son père. La foudre est dans mes mains, les dieux me font la cour, Je tiens tout l'univers sous mon obéissance, Quinault, Isis, II, 2. Je n'ai point oublié quelle reconnaissance, Seigneur, m'a dû ranger sous votre obéissance, Racine, Mithr. IV, 4.

    Être sous l'obéissance de père et de mère, être soumis à l'autorité légale de son père et de sa mère.

  • 5En parlant des princes, domination. Et si je puis jamais avec votre assistance Arriver jusqu'aux lieux de mon obéissance, Corneille, Médée, IV, 7. Que, vu la déclaration de la reine, le cardinal Mazarin sortirait dans quinze jours du royaume et de toutes les terres de l'obéissance du roi, Retz, Mém. t. II, liv. III, p. 314, dans POUGENS. Il tâchait de retenir les peuples dans l'obéissance, Bossuet, Hist. I, 11. Il les invita à rentrer dans l'obéissance, Bossuet, ib. II, 8. Mais sa triste puissance Ne voit que des mourants sous son obéissance, Voltaire, Œdipe, I, 1. L'empereur [Joseph] avait ordonné qu'on reçût Charles [XII] dans toutes les villes de son obéissance avec magnificence, Voltaire, Charles XII, 7. Darius s'empare de Babylone, et la remet sous l'obéissance des Perses, Barthélemy, Anach. t. VII, tabl. 1.
  • 6 Au plur. Assurer de ses obéissances, présenter ses obéissances, sorte de formule de politesse qui s'est dite autrefois. Je suis très marri de n'avoir meilleure chose à vous présenter avec mes fidèles obéissances, Du Bosc, [familier de Mazarin] 18 juin 1649, dans Arch. des miss. scientif. 2e série, t. IV, p. 66. Parce qu'on dit assurer quelqu'un de ses respects, on a cru pouvoir dire également assurer quelqu'un de ses obéissances ; mais cette phrase n'est pas usitée parmi ceux qui se piquent de bien parler, Acad. Observ. sur Vaugel. p. 344, dans POUGENS. Notre ami Corbinelli vous assure de ses obéissances et de sa fidèle amitié, Sévigné, à Bussy, 21 janv. 1677. Présentez, je vous prie, mes obéissances à celui qui a soin de la santé du roi, Voltaire, Lett. en vers et en prose, 132.

    PROVERBE

    Obéissance vaut mieux que sacrifice, se dit par allusion à l'histoire d'Abraham, dont l'obéissance fut plus méritoire que n'aurait été le sacrifice de son fils.
    L'obéissance vaut mieux que tous les sacrifices, et tous les sacrifices sans 'obéissance ne peuvent être devant Dieu de nulle valeur, Bourdaloue, Myst. Passion de J. C. t. I, p. 305.

HISTORIQUE

XIIIe s. Nus [nul] ne quens ne bers [ni comte ni baron] ne puet [peut] donner son homme de foy, se n'est à son frere ou à sa suer ; mès à iceus le puet il bien donner en partie, mes il ne le pourroit pas donner à un estrange, se il ne le donnoit à [avec] toute l'obeissance [service] qu'il avoit, sans riens retenir, Du Cange, obedientia.

XIVe s. Collations et patronages de benefices, hommes, hommages, vassaux, vasselages, obeissances, honneurs, et quelconques autres rentes et appartenances, Du Cange, ib.

XVe s. Cy vous [je] rens toute obeissance, Orléans, Ball. 102. Furent festoyez en la ville de Paris et receus bien honnorablement, et menez par l'obeissance et par les subjects du roy jusques en Allemaigne, Chartier, Hist. de Ch. VI et VII, p. 247.

XVIe s. [Ces pays] Furent submis en mon obeissance, Marot, IV, 128. Recommander l'obeissance du [au] magistrat, Montaigne, I, 123. Dieu ne se contente pas de demi-obeissance, ains la veut toute entiere, Lanoue, 75. Ces heritages que les bastards acquierent au cas qu'ils ont hoirs de leurs corps engendrez en loyal mariage, doivent estre au seigneur souz lequel l'acquisition a esté faite, pourveu qu'il ait obeissance et moyenne justice, combien qu'il n'ait haulte justice, Coust. génér. t. II, p. 782.

ÉTYMOLOGIE

Obéissant.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

OBÉISSANCE.
7 Au plur. Terme de droit. Offre, soumission, consentement… qu'il [H…] reconnaît lui-même qu'il doit une indemnité à B…, qu'il y a lieu d'en fixer le chiffre à 4,000 fr. conformément à ses obéissances, Gaz. des Trib. 17 fév. 1876, p. 162, 1re col. (Cour d'appel de Rouen)
8En style épistolaire, et comme formule finale : recevez mes obéissances.