« poing », définition dans le dictionnaire Littré

poing

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

poing

(poin ; le g ne se prononce pas et ne se lie pas ; au pluriel, l's se lie : les poin-z armés de gantelets) s. m.
  • 1Main fermée. La pique dans le poing et l'estoc sur le flanc, Régnier, Sat. IX. Il voit de toutes parts combler d'heur sa famille, La javelle à plein poing tomber sous la faucille, Racan, Pastor. Le cimeterre au poing ils ne m'écoutent pas, Corneille, Cid, IV, 3. Et doit ledit Paul… comparoir… pour s'ouïr condamner à… confesser, la hart au col, la torche au poing, que le passé seul est bon, que le présent ne vaut rien…, Courier, Aux âmes dévotes.

    Fermer le poing, fermer la main et la tenir serrée. Pour me servir de la métaphore de Zénon, l'éloquence a la main ouverte, au lieu que, dans la plaidoirie, elle est souvent obligée d'avoir le poing fermé comme la dialectique, Marmontel, Œuv. t. IX, p. 499.

    Avoir les poings sur les côtés, sur les hanches, se dit d'une femme dans l'attitude de la provocation, et disant ou prête à dire des injures. Déjà ses poings sont sur ses hanches, Vadé, Pipe cassée, I. La mère est en grande colère : elle a les deux poings sur les côtés, Diderot, Salon de 1765, Œuv. t. XIII, p. 177, dans POUGENS.

    Fig. et familièrement. J'ai la tête plus grosse que le poing, locution dont on se sert pour refuser de répondre. Dorante : Vous me semblez toute mélancolique : qu'avez-vous, madame Jourdain ? - Madame Jourdain : J'ai la tête plus grosse que le poing, et si, elle n'est pas enflée, Molière, Bourg. gent. III, 5.

    Pas plus gros que le poing, se dit de choses petites dans leur espèce. [Il faut, dans un portrait, faire aux femmes] surtout le visage pas plus gros que le poing, l'eussent-elles d'un pied de large, Molière, Sicil. sc. 11. Et un postillon… un postillon qui n'est pas plus gros que le poing et qui va comme le vent, Regnard, Retour impr. sc. 6.

    Mener quelqu'un pieds et poings liés, après lui avoir lié les bras et les pieds. Les Parthes déclarèrent que, si les Romains voulaient recevoir d'eux quelque composition favorable, il fallait avant toutes choses qu'ils leur livrassent entre les mains Crassus et Cassius pieds et poings liés, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. IX, p. 521, dans POUGENS.

    Fig. Il [Jurieu] m'accuse d'avoir livré la religion pieds et poings liés aux infidèles, Bossuet, 1er avert. 3.

    Fig. Livrer quelqu'un pieds et poings liés, le remettre à la merci, à la disposition. Killegrew, cédant à ses importunités, fut offrir son cousin pieds et poings liés à la victorieuse Warmestré, Hamilton, Gramm. 9.

    Mener une femme sur le poing, la mener par la main (locution vieillie). On dîne, et, après dîner, me revoilà sur le poing de Monsieur de Marseille, à voir la citadelle et la vue, Sévigné, jeudi 1673.

    Mener sur le poing, se disait aussi d'un homme que l'on présentait dans les maisons. On ajoute encore, et on assure même que le grand prôneur de la pièce, le grand protecteur de l'auteur, est M. l'abbé de Mably, qui mène M. Clément sur le poing de porte en porte, et qui le présente à toutes ses connaissances, D'Alembert, Lett. à Voltaire, 6 mars 1772.

    Flambeau de poing, voy. FLAMBEAU.

  • 2Coup de poing, coup appliqué avec la main fermée. Il y eut des coups de poing donnés, même du sang répandu, Pellisson, Lett. hist. t. III, p. 114, dans POUGENS. Morbleu, veux-tu te battre à coups de poing ? Hauteroche, Crispin méd. I, 6. Sors du tombeau, divin Pindare… Cesse de vanter la mémoire Des héros dont le premier soin Fut de se battre à coups de poing Devant les juges de la gloire, Voltaire, Odes, 14. Non, chez nous point, Point de ces coups de poing Qui font tant d'honneur à l'Angleterre, Béranger, Boxeurs.

    Faire le coup de poing, se battre à coups de poing. Mme de Rohan, voyant qu'il s'agissait de faire tout de bon le coup de poing, fait la révérence à Mme la duchesse de Bourgogne, Saint-Simon, 64, 65.

    Il ne vaut pas un coup de poing, se dit d'une personne débile et qu'un rien suffit à mettre à terre. Ce petit duc de Foix ne vaut pas un coup de poing, Sévigné, 55.

    Coup de poing, nom donné aux petits pistolets de poche.

    Coup de poing, se dit aussi d'un gros anneau de fer ou d'acier où la main fermée s'engage, et qui sert d'arme défensive à la sortie d'un bal, d'un spectacle.

  • 3Oiseau de poing, celui qui revient sans leurre sur le poing du fauconnier. L'épervier et l'autour s'appellent oiseaux de poing, parce qu'ils ne se dressent pas au leurre. Le trésorier de la cathédrale de Nevers a le droit d'assister au chœur, botté, éperonné, l'épée au côté, et l'oiseau sur le poing, Saint-Foix, Ess. Paris, Œuv. t. v, p. 285, dans POUGENS. Le droit exclusif d'entrer dans une église avec un faucon sur le poing, Voltaire, Mœurs, 197.

    Fig. Manger sur le poing, être très familier. Jà tout apprivoisé, je mangeais sur le poing, Régnier, Sat. X.

  • 4 Terme de manége. Le poing de la bride, le poignet de la main gauche du cavalier.
  • 5Toute la main jusqu'à l'endroit où elle se joint au bras. Les philosophes qui ouvrent la main trop brusquement sont des fous ; on leur coupe le poing, et voilà tout ce qu'ils gagnent, D'Alembert, Lett. au roi de Pr. 9 mars 1770.

HISTORIQUE

XIe s. Si ço avent [advient] que alquen [aucun] colpe le poin à altre u le pied…, Lois de Guill. 13.

XIIe s. Piez et poing au felon, lui faites bien lier, Ronc. p. 201. Que vus algiez [alliez] à curt el puing l'espée traite, Th. le mart. 36. Mult se sont entremis de lui la cruiz tolir ; Mais il ne la volt pas à nuls d'els tuz guerpir ; à douz puinz [avec les deux poings] tut adès la veïssez tenir, ib. 39.

XIIIe s. Qui tousjours me batoit et de poins et de piés, Berte, XLVII. Et fist à cescun des arbalestriers un poing copper, et à siergans à cescun un oel crever. Chr. de Rains, 72. Et la mesenge a empoingnié Plain son poing de mouse et de foille, la Rose, 1771. Et selon l'ancien droit, qui mehaignoit [blessait] autrui, on li fesoit autel [semblable] mehaing comme il avoit fait à autrui, c'est à dire poing por poing…, Beaumanoir, XXX, 18.

XIVe s. Adonc s'assit Bertran à sa devision [comme il voulut] ; Où qu'il voit à mengier, il y prend à plein poing ; En lui n'avoit maniere en plus qu'en un mouton, Guesclin. var. 86.

XVe s. Et si eust gresle au lendict et à Sainct Denys, merveilleuse et grosse, l'une comme ung homme ha le poing,… l'autre comme les deux poings, Juvénal Des Ursins, Charles VI, 1406.

XVIe s. Qu'avez-vous, monsieur ? - J'ai la teste plus gross que le poing, Despériers, Contes, LXXXV. Vous joignez les mains quand vos amis ont le poing fermé, D'Aubigné, Hist. II, 185. Les bourgeois, ne pouvans mettre à bas leur citadelle, se contenterent de la mettre dehors par le poing, c'est à dire de faire un grand retranchement en croissant, qui alloit baiser les deux courtines, D'Aubigné, ib. III, 163. De grand folie s'entrement Qui de son poing fait un maillet, Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. p. 273.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, pogn ; provenç. punh, poing ; esp. puño ; port. punho ; ital. pugno ; du lat. pugnus.