« rafraîchir », définition dans le dictionnaire Littré

rafraîchir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

rafraîchir

(ra-frê-chir) v. a.
  • 1Rendre plus frais. Une pluie rafraîchira les campagnes desséchées. Et du vent de son aile il me rafraîchissait, Tristan, M. de Chrispe, III, 1. Elle [une terre] est rafraîchie par le vent du nord qui souffle du côté de la mer, Fénelon, Tél. III. Les glaces en été rafraîchissent ses vins, Delille, Imag. VI.

    Rafraîchir un canon, humecter l'intérieur avec de l'eau et du vinaigre, lorsqu'on a tiré un certain nombre de coups.

    Dans les sucreries, rafraîchir les pains terrés, couvrir l'ancienne terre d'une nouvelle couche.

    Terme de brasserie. Rafraîchir le grain, lui donner de l'eau nouvelle, lorsqu'il est à moitié trempé.

    Terme d'imprimerie. Rafraîchir le tympan, enlever, au moyen de feuilles de papier gris, l'eau trop abondante dont il est abreuvé.

  • 2Il se dit aussi de ce qui donne une sorte de fraîcheur à l'intérieur du corps. Pour humecter et rafraîchir les entrailles, Molière, Mal. imag. I, 1.

    Absolument. Cette boisson rafraîchit.

    Rafraîchir le sang, le rendre plus calme par les remèdes, par le régime. Les médecins m'ont pensé tuer, voulant me rafraîchir le sang, Courier, Pamphlet des pamphlets.

    Fig. Rafraîchir le sang, se dit des choses qui font plaisir, qui donnent de la tranquillité. Nous trouvions qu'une mauvaise compagnie était bien meilleure qu'une bonne, qui vous laisse affligée quand elle part, au lieu que l'autre vous rafraîchit le sang, et vous fait respirer de joie, Sévigné, 31 mai 1680. Il n'y a rien qui rafraîchisse le sang comme d'avoir su éviter de faire une sottise, La Bruyère, XI. Rien ne rafraîchit le sang comme de secourir les malheureux, Voltaire, Lett. Boisgelin, mars 1767.

    Fig. Se rafraîchir la tête, se calmer l'esprit. Je me vais rafraîchir la tête à écrire à ma fille, Sévigné, 494.

  • 3Réparer, mettre en meilleur état. Rafraîchir un mur. Lorsque des imprimeurs huguenots eurent rafraîchi les premières pages d'une vieille édition du R. P. Busenbaum que l'on fit passer pour nouvelle, Voltaire, Mél. litt. Honn. litt. 7.

    Rafraîchir un tableau, une tapisserie, rendre la vivacité des couleurs en nettoyant et vernissant un tableau ; refaire une tapisserie aux endroits où elle est gâtée.

    Terme de peinture en bâtiment. Faire revivre des couleurs ou des vernis en les lavant.

    Terme de maçonnerie. Retailler d'anciens joints ou d'anciens lits de pierre.

    Remettre de l'eau ou un lait de chaux dans le mortier qui est devenu trop ferme.

    Terme rural. Rafraîchir la terre, la remuer, la bêcher de nouveau, lui donner un nouveau labour.

  • 4Rogner, couper l'extrémité. Rafraîchir les cheveux. Rafraîchir le bord d'un chapeau, d'un manteau.

    Rafraîchir les racines d'une plante, en rogner tant soit peu le chevelu.

    Terme d'hippiatrique. Rafraîchir la queue, couper au bas de la queue tous les crins qui débordent.

  • 5 Fig. Rendre frais, jeune. Je remercie Mme de Rochebonne de vous avoir obligée à me faire ce portrait [du petit Rochebonne] ; il est charmant ; mon imagination en a été toute rafraîchie, Sévigné, 20 juill. 1689. À chaque pas qu'il fait, un souvenir flatteur Rafraîchit sa pensée et rajeunit son cœur, Delille, Imag. VI. Lorsque du renouveau l'haleine caressante Rafraîchit l'univers de jeunesse paré, Chénier M. J. la Promenade.

    Familièrement. Rafraîchir à quelqu'un la mémoire de quelque chose, lui en rappeler le souvenir. Le chevalier de Grammont était tout plein de ces façons honnêtes de rafraîchir la mémoire de ceux qui l'avaient un peu tardive sur le payement, Hamilton, Gramm. 9. Je crains qu'il ne soit nécessaire de lui rafraîchir le souvenir de la rivière et de moi, Fontenelle, Lett. gal. 35.

    Se rafraîchir quelque chose, s'en rafraîchir la mémoire. Avant de se transporter à Versailles, il fut quatre ou cinq mois à se rafraîchir la botanique avec M. Marchant, son ami et son confrère, Fontenelle, Bourdelin.

    Rendre plus vif en renouvelant. Irai-je rafraîchir sa honte et mon dommage ? Régnier, Élég. II.

  • 6Rétablir par le repos et la nourriture. Rafraîchir des troupes.

    Rafraîchir une place d'hommes et de munitions, ou, simplement, la rafraîchir, la ravitailler, y faire entrer des hommes, des munitions, des vivres.

    On dit de même, en termes de marine : rafraîchir une escadre, une flotte.

  • 7 V. n. Devenir plus frais. La rivière rafraîchit de jour en jour. Mettez le vin rafraîchir à la cave. D'autres carafes qui rafraîchissent dans un seau de faïence, Diderot, Salon de 1765, Œuv. t. XIII, p. 124, dans POUGENS.
  • 8Se rafraîchir, v. réfl. Devenir plus frais. Le temps se rafraîchit. Bacchus se rafraîchit dans les eaux des naïades, Delille, l'Hom. des ch. III.

    Avec ellipse du pronom personnel. Faire rafraîchir de l'eau dans la neige.

    Prendre le frais. Vous vous rafraîchirez à l'ombre. Je vis de votre armet la visière haussée, Que pour vous rafraîchir vous levâtes exprès, Mairet, Sophon. IV, 1.

  • 9Se rétablir par le repos et la nourriture. Ces troupes se sont rafraîchies dans de bons quartiers. Ils débarquèrent tous Au port de Joppe, et là se rafraîchirent, La Fontaine, Fianc. Sans être touché de la curiosité de voir un pays que je n'avais jamais vu, sans avoir égard aux prières de l'équipage qui voulait se rafraîchir à terre, j'ordonnai aux pilotes qu'on retournât en Italie, Fontenelle, Dial. III, Morts anc. mod.
  • 10Boire un coup, manger un peu, se reposer. Je m'en vais te verser de quoi te rafraîchir, Tristan, Marianne, IV, 5. Rafraîchissez-vous à la Garde, Sévigné, 18 oct. 1688.

    Avec suppression du pronom personnel. Faire rafraîchir les chevaux.

HISTORIQUE

XIIe s. Ne devez rafreschir tant vielle iror [colère], Gerard de Ross. p. 377.

XIIIe s. Tote verdeur se rafreschit, Et toz li monz [monde] ragouenist [rajeunit] Por la saison qui est novele, Partonopex, ms. de St-Germ. f° 124, dans LACURNE. Et avoient mis les chevaus hors des huissiers [vaisseaux de transport] por rafreschir, Villehardouin, LVI.

XIVe s. Ainsi fu prise Vaux com vous oÿ avez, Là se sont rafreschi nos François honnorez, Guesclin. 18554.

XVe s. Et je m'en irai à Bruges et à Ypre apprendre encore mieux les nouvelles ; et les rafreschirai par paroles, Froissart, II, II, 174. La forte ville de Hainebon, qui grandement estoit rafraischie et renforcée, ravitaillée et pourvue de toute artillerie, Froissart, I, I, 186. Et vinrent à Dinan, et rafraischirent en l'abbaye, et puis passerent outre Bouchain, Froissart, I, I, 79.

XVIe s. Faire rafreschir et observer estroitement les anchiennes ordonnances, Souvenirs de la Flandre wallone, juillet et août 1867, p. 116. Une chose qui nuit es assauts, est d'assaillir avecques confusion et desordre ; ce qui arrive aisement quand il faut rafraischir les hommes ; parquoy, à mon avis, il suffiroit de deux mille hommes, à chascune bresche, à la fois, lesquels estans rafraischis deux fois de pareil nombre, ne faudroit employer pour les trois assauts que douze mille hommes, Lanoue, 450. Il se retira à une lieue de là, non pour rafraischir ses gens (comme on parle ordinairement), ains pour les reschauffer à couvert contre l'injure du temps, Lanoue, 660. Ce qui des racines se trouvera escorcé, froissé, ou rompu, provenant du rude arracher ou transport, sera rafreschi et osté avec la serpe, De Serres, 646. Mon cher roy [Henri IV], je n'ay voullu laisser partir ce porteur sans vous rafraischir la memoire de petite sueur [sœur] qui se meurt d'envie de vous voir, Lettre de Catherine de Navarre, Bibl. des chartes, 4e série, t. III, p. 334.

ÉTYMOLOGIE

Re…, et l'inusité afraîchir, de à, et frais ; bourg. renfroichi, refroichi ; wallon, rafrehi. L'ancienne langue disait aussi souvent refreschir.