« réprimer », définition dans le dictionnaire Littré

réprimer

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

réprimer

(ré-pri-mé) v. a.
  • 1Arrêter l'effet, le progrès d'une chose. Réprimer avec le nitrate d'argent le bourgeonnement d'une plaie. Un sage ami, toujours rigoureux, inflexible, Sur vos fautes jamais ne vous laisse paisible… Il réprime des mots l'ambitieuse emphase, Boileau, Art p. I.

    Il se dit des choses qui exercent une pareille action. Les coups précipités, ayant comprimé la matière [loupe détachée de la gueuse], en ont en même temps réprimé la flamme, Buffon, Hist. min. introd. t. VIII, p. 41. L'oisiveté, qui nourrit les passions, fit place au travail qui les réprime, Rousseau, Ess. sur l'orig. des lang. 10.

  • 2Contenir, ne pas laisser paraître au dehors. Jusque-là réprimez ces transports violents, Corneille, Pomp. II, 4. Madame, réprimez ces plaintes inutiles, Rotrou, Herc. mour. IV, 2. Encore réprima-t-elle ce faible désir [d'une mort plus douce], en disant aussitôt après avec Jésus-Christ la prière du sacré mystère du jardin, Bossuet, Anne de Gonz. Demeurons en patience et réprimons les mouvements précipités de notre cœur, Bourdaloue, Instruct. pour la 2e fête de Pâques, Exhort. t. II, p. 268.
  • 3Empêcher de mal faire par la menace ou le châtiment. Réprimer les séditieux. Nous établirons pour règle générale qu'il [le souverain] doit avoir assez de force pour réprimer les particuliers, et point assez pour réprimer la nation, Barthélemy, Anach. ch. 62.

    Il se dit en un sens analogue des choses qu'on réprime. Que si tous mes efforts ne peuvent réprime. Cet ascendant malin qui vous force à rimer, Boileau, Sat. IX. Où serais-je aujourd'hui… Si de mon propre sang ma main versant des flots N'eût par ce coup hardi réprimé vos complots ? Racine, Athal. II, 7. De ton zèle hardi réprime la rudesse, Voltaire, Orphel. IV, 2. Le crime est plus grand quand il est commis par ceux qui sont établis pour réprimer les crimes et pour protéger l'innocence, Voltaire, Mél. hist. Mensonges impr. Consp. contre les peuples. C'est à vous, sire, que l'humanité et la philosophie doivent rendre grâces de tout ce que les souverains font et feront encore pour favoriser la tolérance et réprimer la superstition, D'Alembert, Lett. au roi de Pr. 29 juin 1781. La reine, froide pour Mlle de la Fayette, mais avec mesure et bonté, n'autorisait ni ne réprimait la conduite de ses favorites [de Louis XIII], Genlis, Mlle de la Fayette, p. 267, dans POUGENS. Si on eût réprimé dès le commencement ces coupables excès de l'esprit anarchique, et mis au secret le premier qui s'avisa de dire ba, be, bi, bo, bu, le monde était sauvé, Courier, Lettres au censeur, IX.

    Absolument. Dire que la religion n'est pas un motif réprimant, parce qu'elle ne réprime pas toujours, c'est dire que les lois civiles ne sont pas un motif réprimant non plus, Montesquieu, Esp. XXIV, 2.

  • 4Se réprimer, v. réfl. Se contenir soi-même. Autant qu'il est aisé à ce corps [une aristocratie] de réprimer les autres, autant est-il difficile qu'il se réprime lui-même, Montesquieu, Esp. III, 4.

    Être réprimé. Une passion violente se réprime par un mouvement de passion plus violent encore, Marmontel, Œuv. t. VII, p. 158.

HISTORIQUE

XIVe s. À ce que l'excellent sensibleté que le nerf ot, fust reprimée pour l'insensibleté du liement [ligament], H. de Mondeville, f° 21, verso. Pour reprimer le hardement [la hardiesse] des mauvais, Bercheure, f° 18, verso. La vertu d'attemprance est en adreçant, corrigeant et reprimant les passions, Oresme, Eth. 38.

XVIe s. Elles se saulpoudroient de quelque pouldre pour reprimer les sueurs, Montaigne, I, 374. Et si ceste chair n'est reprimée…, Paré, V, 21.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. reprimer ; espagn. reprimir ; ital. reprimere ; du lat. reprimere, de re, et premere, presser (voy. PRESSER, PRESSION). Dans les hauts temps, reprimere aurait fait repreindre, comme imprimere, empreindre ; reprimer est la reproduction du latin.