« sécheresse », définition dans le dictionnaire Littré

sécheresse

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

sécheresse

(sè-che-rè-s') s. f.
  • 1État, qualité de ce qui est sec. La sécheresse de la terre fait grand tort aux moissons. La sécheresse de la langue dans la fièvre.
  • 2 Absolument. Disposition de l'air et du temps contraire à l'humidité. Cette année, la sécheresse fut très grande, de manière que les terres qui étaient dans les lieux élevés manquèrent absolument, tandis que celles qui purent être arrosées furent très fertiles, Montesquieu, Lett pers. 11. Ces sécheresses dévorantes qui désolent si souvent les meilleures îles de cet hémisphère [Amérique], Raynal, Hist. phil. IX, 28.
  • 3Absence d'embonpoint, de graisse. Vous me paraissez à peu près dans le même cas que moi : faiblesse et sécheresse, voilà nos deux principes ; cependant, malgré ces deux ennemies, je n'ai pas laissé de passer soixante ans, Voltaire, Lett. Mme Fontaine, 8 janv. 1756.

    Une sécheresse de pulmonique (voy. PULMONIQUE).

  • 4 Fig. Manque d'argent, gêne. Peut-on rien voir de plus cruel que cette rigoureuse épargne qu'on exerce sur nous, que cette sécheresse étrange où l'on nous fait languir ? Molière, l'Av. I, 2. Quelle augmentation de dépenses, et quel temps de sécheresse ! Sévigné, 8 fév. 1690. Ce qui a causé la sécheresse où j'ai été… c'est que j'ai donné beaucoup d'argent pour les rachats des terres de Basse-Bretagne, Ch. Sévigné, dans SÉV. t. X, p. 408, édit. RÉGNIER.
  • 5 Fig. État d'une personne qui manque de sensibilité, d'abandon. Mlle de Méry dit que je lui ai écrit fort sèchement ; c'est peut-être en elle qu'est la sécheresse, comme la piqûre n'est pas dans l'épine, Sévigné, 7 juil. 1680. La sécheresse des nouveaux mystiques, qui ne veulent rien demander à Dieu, est confondue dès l'origine du christianisme, Bossuet, Ét. d'orais. VI, 18. Autant que nous pourrons, corrigeons les sécheresses, pour ne point dire l'aigreur, qu'on trouve trop souvent dans de tels livres [les livres de controverse], Bossuet, Confér. avec Claude, Avertissement. Je vous aime plus que ma sécheresse ne me permet de vous le dire, Maintenon, Lett. à M. d'Aubigné, 7 sept. 1683. Cette force de caractère allait quelquefois jusqu'à la sécheresse, Rousseau, Confess. II. La sensibilité extrême exclut la sécheresse, D'Alembert, Portr. de Mlle de l'Espinasse.

    Manque de moelleux. La Rancune l'en remercia autant que la sécheresse de sa civilité le put permettre, Scarron, Rom. com. I, 6. Je sais qu'il règne toujours entre hommes une sécheresse qu'une femme sait mieux adoucir, Rousseau, Hél. I, 65.

    Manière de répondre, de se comporter, froide et dure. Je vis bien à l'extrême sécheresse de ses manières, que je n'obtiendrais jamais sa tendresse, Genlis, Mme de Maintenon, t. I, p. 78, dans POUGENS. J'ai beaucoup vu en Italie une femme qui vous intéresse particulièrement. - Je ne le crois pas, répondit lady Edgermond avec sécheresse, Staël, Corinne, XVI, 6.

  • 6 Terme de dévotion. État de l'âme qui ne sent point de consolation dans les exercices de piété. Vous tirerez tout le fruit que Dieu veut de vos sécheresses, Bossuet, Lett. abb. 61. Des sécheresses, des ennuis et des dégoûts, Bourdaloue, Dominic. I, Sainteté et force de la loi, 229. Que remporte-t-on de la plupart des conversations ? un cœur vide, une imagination égarée, beaucoup d'indifférence et de sécheresse dans le service de Dieu, Bourdaloue, Retraite spirituelle, 6e jour. Aux âmes que Dieu éprouve… et qu'il livre à tous les dégoûts et à toutes les sécheresses d'une vertu triste et amère, Massillon, Myst. Ass.
  • 7En parlant des ouvrages de peinture, manque de moelleux dans les contours. Cela est peint avec une grande sécheresse.

    Se dit aussi en parlant des ouvrages de sculpture.

  • 8Il se dit de l'esprit et de ce qu'il produit, où manque le charme, la grâce, l'ornement. Il y a une grande sécheresse de style dans tout ce qu'il écrit. Mon Dieu ! quels amants sont-ce là ? et quelle sécheresse de conversation ! Molière, Préc. 5. La contrainte des préceptes ne fait qu'affaiblir les ouvrages, et leur donner une certaine sécheresse qui les rend maigres et décharnés, Boileau, Longin, Sublime, II. Notre siècle, recommandable par d'autres endroits, est le siècle de la sécheresse, Voltaire, Dict. phil. Chant. Il y a près de quarante ans que vous m'avez fait renoncer à la sécheresse des mathématiques, Voltaire, Lett. d'Argental, 17 août 1774. En dégageant les sciences de la sécheresse qui en écarte la plupart des hommes, il [Fontenelle] les rendait agréables à ceux mêmes qui ne cherchent que l'amusement, Duclos, Œuv. t. IX, p. 321. La fable de la mort et du bûcheron a été mise en vers par la Fontaine et par Despréaux ; qu'on les compare ensemble : la sensibilité respire à chaque vers dans la fable de la Fontaine ; chaque vers de celle de Despréaux semble flétri par la sécheresse, D'Alembert, Éloges, Despr. Si, d'un côté, l'emphase, l'enflure, la redondance sont un excès contraire à la précision, la sécheresse est l'excès opposé, Marmontel, Œuv. t. X, p. 214.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et la voie est dure et pesans, La secereche est grande sus, Gui de Cambrai, Barl. et Jos. p. 260. En la secherece del desert il corocierent Dieu par leur mauvestiez, Psautier, f° 93. Pumes grenates valent à le [la] sekereche de le [la] gorge, Alebrand, f° 53.

XIVe s. En esté quant il fait secheresse, Modus, f° CXXXII, verso.

XVe s. Faute d'humeur, nos choux sont morts En nos jardins par secheresse, Basselin, XVII.

ÉTYMOLOGIE

Sécher ; wallon, segress ; Berry, chécheréche ; norm. séqueresse ; provenç. secaressa.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SÉCHERESSE. Ajoutez :

PROVERBE

Jamais sécheresse n'a causé détresse.