« long », définition dans le dictionnaire Littré

long

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

long, ongue

(lon ; lon-gh' ; le g devant une consonne ne se prononce pas : un lon chemin ; devant une voyelle ou une h muette il se lie et se prononce comme un k ; un lon-k espoir ; au pluriel, l's se lie : les lon-z espoirs) adj.
  • 1Qui s'étend en une ligne étendue, par opposition à court. Une longue ligne de soldats. Taille longue et menue. Le cours du Danube est long. Un jour, sur ses longs pieds, allait je ne sais où Le héron au long bec emmanché d'un long cou, La Fontaine, Fabl. VII, 4. En longs habits de lin, Racine, Ath. II, 1. On ne concevait pas comment la tête de cette colonne pourrait traîner et soutenir, dans une si longue route, une aussi lourde masse d'équipages, Ségur, Hist. de Nap. IX, 1.

    Fig. Le divorce est signé de cette même main Que l'on voit à longs flots verser le sang romain, Voltaire, Triumv. I, 2.

    De longs regards, des regards qui se prolongent au loin ; ils expriment la douleur, l'amour, une passion. D'où vient qu'en m'écoutant, vos yeux, vos tristes yeux Avec de longs regards se tournent vers les cieux ? Racine, Brit. V, 1.

    Les races longues cornes, ou, simplement, les longues cornes, groupe de bêtes bovines occupant autrefois les parties occidentales des îles Britanniques, et qui avaient pour caractère commun des cornes longues, courbées d'abord en bas et relevées.

    Longue laine, nom commun à toutes les races ovines dont la laine est lisse, longue de 15 à 35 centimètres, et propre au peignage.

    Fig. Avoir les dents longues, bien longues, être privé de nourriture depuis longtemps, ou, simplement, avoir faim.

    Fig. Il a les bras longs, les mains longues, son pouvoir s'étend bien loin. Les jansénistes ont la phrase trop longue : fasse le ciel qu'ils n'aient jamais les bras longs ! Voltaire, Lett. La Harpe, 2 juin 1768.

    Elliptiquement. Prendre le plus long, aller en quelque lieu par le plus long chemin. Promettez-moi de prendre toujours le plus long et le plus sûr ; il n'y a nulle comparaison entre s'ennuyer et se noyer, Sévigné, 17 nov. 1688. Mon philosophe Damilaville, qui avait fait pendant quelques mois la consolation de ma vie, est parti et a pris son plus long pour aller voir un ami avec lequel il restera quelque temps, Voltaire, Lett. d'Argental, 8 oct. 1765.

    Fig. Prendre le plus long, se servir des moyens les moins propres à faire réussir promptement ce qu'on a entrepris.

  • 2Habit long, la soutane et le manteau que portent les ecclésiastiques. Il était en habit long.
  • 3Vue longue, vue qui discerne les objets à une grande distance.

    Lunette de longue vue, ou, simplement, longue-vue, lunette d'approche, lunette avec laquelle on voit les objets éloignés.

  • 4Pâte longue, voy. PÂTE.
  • 5Il se dit de la plus grande dimension d'une surface, par opposition à large. Ce jardin est plus long que large. Un champ long et étroit.

    Un carré long, un parallélogramme à angles droits.

  • 6Qui dure plus ou moins de temps. Beaucoup par un long âge ont appris comme vous Que le malheur succède au bonheur le plus doux, Corneille, Horace, V, 2. Que vivre sans vous voir est un sort rigoureux… C'est une longue mort, Corneille, le Ment. III, 5. L'autre [la Discorde], diligente, Courait vite aux débats, et prévenait la paix ; Faisait d'une étincelle un feu long à s'éteindre, La Fontaine, Fabl. VI, 20. Ai-je pris sur moi-même un assez long empire ? Molière, Mis. V, 7. Le monde n'a point de longues injustices, Sévigné, 9 sept. 1675. Vous qui, éblouis de l'éclat du monde, admirez le tranquille cours d'une si longue et si belle vie, Bossuet, le Tellier. Une longue et paisible jouissance d'une des plus nobles couronnes de l'univers, Bossuet, Reine d'Anglet. Ce ne sont pas les années, c'est une longue préparation qui vous donnera de l'assurance [au moment de la mort], Bossuet, le Tellier. Je ne vous raconterai pas la suite trop fortunée de ses entreprises [de Cromwell]… ni cette longue tranquillité qui a étonné l'univers, Bossuet, Reine d'Anglet. Les nouvelles d'Espagne sont un peu longues à venir, Maintenon, Lett. au duc de Noailles, 9 mai 1712. Que m'importe, après tout, que Néron plus fidèle D'une longue vertu laisse un jour le modèle ? Racine, Brit. I, 1. Toujours évanouie, Madame, elle ne marque aucun reste de vie Que par de longs soupirs et des gémissements, Racine, Baj. IV, 5. Ses longs mugissements font trembler le rivage, Racine, Phèdre, V, 6. Ah ! que le temps est long à mon impatience ! Racine, Esth. II, 1. Un long amas d'honneurs rend Thésée excusable, Racine, Phèdre, I, 1. Le souper fut plus long que le dîner ; on se parla avec plus de confiance, Voltaire, Zadig, 2. Gortz et Gyllembourg, ses ministres, furent retenus près de six mois, et ce long outrage confirma en lui tous ses desseins de vengeance, Voltaire, Russie, II, 8. Ce meurtre est annoncé par de longs cris de joie, Chénier M. J. Charles IX, V, 2. Au bout d'un quart d'heure qui fut long [qui me parut long], Courier, Lett. 1er nov. 1807.

    Le long temps, la longue durée du temps ; un long temps, un long intervalle de temps (voy. TEMPS).

    Long espoir, espoir qui s'étend loin dans l'avenir. Quittez le long espoir et les vastes pensées, La Fontaine, Fabl. XI, 8.

    Terme de marine. Voyage de long cours, voyage par mer dont le but et le terme sont fort éloignés. Capitaine au long cours.

    Oiseau de long vol, oiseau capable de faire en volant de longues traversées. Comme ce n'est point un oiseau de long vol [le manakin], il n'est guère probable qu'il ait traversé la mer pour arriver à l'île de Cuba, Buffon, Ois. t. VIII, p. 153.

    Bail à longues années, à long terme, bail dont la durée s'étend au delà du nombre d'années des baux ordinaires.

    Longue échéance, terme qui n'arrive qu'après un long temps. Bail à longue échéance.

    Terme de pratique. Assignation à longs jours, assignation qui accorde un délai plus long que le délai ordinaire.

    De longue haleine, voy. HALEINE, n° 3.

    C'est du pain bien long, se dit en parlant d'un travail dont on ne peut pas voir si tôt le profit.

    Faire courte messe et long dîner, aimer la bonne chère plus que la piété.

    Vous m'avez donné le carême bien long, c'est-à-dire vous prenez un bien long terme.

    Elliptiquement. Il ne la fera pas longue, c'est-à-dire il ne vivra pas longtemps.

  • 7Syllabe longue, voyelle longue, syllabe, voyelle dont la prononciation a plus de durée que celle d'une syllabe, d'une voyelle brève. Chez les anciens la syllabe longue valait deux syllabes brèves. Épier si des vers la rime est brève ou longue, Régnier, Sat. IX. Toute syllabe masculine, qu'elle soit brève ou non au singulier, est toujours longue au pluriel, D'Olivet, Prosod. franç. art. 4, récap. (Ce que dit ici d'Olivet est la règle de son temps et des temps précédents : le chat, les châ, le sot, les sô, etc. ; cette règle tombe beaucoup en désuétude, à tort du reste, car elle différenciait le singulier du pluriel dans beaucoup de mots).

    Substantivement, une longue, une syllabe longue. Le dactyle est composé d'une longue et de deux brèves.

    Fig. et familièrement. Observer les longues et les brèves, être très cérémonieux, et aussi être exact en tout ce qu'on fait. Notre vrai plaisir, c'est de penser que nous partons lundi, après avoir observé toutes les longues et brèves du cérémonial de Bourbon [lieu d'eaux], Sévigné, 9 oct. 1687.

    Il en sait les longues et les brèves, se dit d'une personne habile et intelligente en quelque affaire.

  • 8Qu'il faut beaucoup de temps pour lire ou réciter. Un long discours. Un sonnet sans défaut vaut seul un long poëme, Boileau, Art p. II.
  • 9Qui pèche par trop d'étendue, par la diffusion. Rien n'est long que le superflu, Dicte-moi ce que je dois dire, Et ne me laisse rien écrire Qui ne soit digne d'être lu, Lamotte, Odes, t. I, p. 181, dans POUGENS.

    Il se dit des personnes, dans le même sens. J'évite d'être long, et je deviens obscur, Boileau, Art p. I.

  • 10Lent, tardif. Les vieillards sont longs en tout. Ces arbres sont longs à pousser, à croître. Ou Rome à ses agents donne un pouvoir bien large, Ou vous êtes bien long à faire votre charge, Corneille, Nicom. III, 3.
  • 11 S. m. Longueur, par opposition à largeur. Ces rideaux ont deux aunes de long.

    S'étendre de son long, tout de son long, tomber à terre ou se coucher, en donnant au corps toute sa longueur. Cependant de son long, sans pouls et sans haleine…, Régnier, Sat. X. Un homme étendu de son long auprès d'une haie fit grand'peur à leurs chevaux, Scarron, Rom. com. II, 13. Je veux faire tomber sur cette idole la foudre de la vérité évangélique ; je veux l'abattre tout de son long devant la croix de mon Sauveur, Bossuet, Sermons, Honneur du monde, Préambule. Quand vous écrirez à votre grand'maman [la duchesse de Choiseul] qui ne m'écrit point, mettez-moi tout de mon long à ses pieds, Voltaire, Lett. Mme du Deff. 5 avr. 1771.

    Fig. Tirer la langue d'un pied de long, être dans quelque grande nécessité.

    Familièrement. Il nous en a dit long, bien long, c'est-à-dire il nous a dit beaucoup de choses sur tel sujet.

    En savoir long, bien long, avoir des connaissances fort étendues. J'aime mieux être ignorant avec elle [Votre Majesté], que d'en savoir si long avec l'auteur du Système de la nature sur des choses où l'on ne sait rien, D'Alembert, Lett. au roi de Prusse, 3 janv. 1771. Ce Corneille Agrippa pourtant en sait bien long ! Hugo, Hernani, IV, 1.

    En savoir long, signifie aussi être adroit, habile, rusé. Voyez un peu la malice ! oh ! elle en sait long, Genlis, Théât. d'éduc. la Lingère, II, 4.

    Savoir le court et le long d'une affaire, en savoir toutes les particularités.

    Scieur de long, ouvrier qui scie des pièces de bois en long pour faire des planches.

    Terme d'anatomie. Le long du cou, muscle qui s'attache à la face antérieure du corps des trois premières vertèbres dorsales et des six dernières cervicales.

    Le long, grande auge dans laquelle les saliniers font déposer la muire.

  • 12De long ; en long, loc. adv. En longueur, dans le sens de la longueur. Fendre du bois en long. Terme de fauconnerie. Voler en long, se dit d'un oiseau qui vole en ligne droite.

    Fig. Avoir les côtes en long, être très paresseux.

    Familièrement. Tirer de long, s'esquiver, s'enfuir. La colombe l'entend, part et tire de long, La Fontaine, Fabl. II, 12.

    Fig. Tirer de long, apporter des délais dans une affaire. Les courriers du cardinal de Bouillon tirèrent tant de long qu'il [le cardinal] parvint à atteindre ce qu'il désirait, Saint-Simon, 78, 5.

    Terme de vénerie. Tirer de long, faire suivre les chiens.

    En long et en large, en longueur et en largeur, alternativement. Aller en long et en large. Je me promène en long et en large, Sévigné, 314.

    On dit dans le même sens : de long en large.

  • 13Au long, tout au long, loc. adv. Amplement, avec étendue, avec détail. Viens m'en conter au long la pitoyable histoire, Tristan, Mariane, V, 2. Apprends-moi plus au long la véritable histoire, Corneille, Cid, IV, 3. …Les consolateurs De ce triste devoir tout au long s'acquittèrent, La Fontaine, Fabl. XII, 6. Il serait superflu de parler au long de la glorieuse naissance de cette princesse, Bossuet, Reine d'Anglet. Le poëme de l'Anti-Lucrèce dont nous parlerons bientôt plus au long, Mairan, Éloge du card. de Polignac. Nous [les compilateurs] avons l'habitude De rédiger au long, de point en point, Ce qu'on pensa ; mais nous ne pensons point, Voltaire, Temple du goût.
  • 14De longue main, loc. adv. Depuis longtemps. Parce qu'il est malaisé de se défaire si promptement d'une opinion à laquelle on est accoutumé de longue main, Descartes, Méd. II, 13. Et de si longue main je connais ta prudence…, Corneille, Médée, III, 2.
  • 15Tout du long, loc. adv. Dans toute la longueur. Monseigneur et Mme la duchesse de Bourgogne firent mettre un jour des pétards tout du long de l'allée, Saint-Simon, 113, 232.

    Dans toute la durée. Ayant crié et disputé dans la rue tout du long de la journée, Guez de Balzac, liv. VI, lett. 5. Il faut faire payer exactement toutes les rentes que doit Lajarie tout du long de son bail, Sévigné, 23 mars 1687. Le long du jour il vous enchante, Voltaire, Thélème et Macare.

    Dans toute l'étendue, d'un bout à l'autre. Je suis tellement libertine quand j'écris, que le premier tour que je prends règne tout du long de ma lettre, Sévigné, 20 juillet 1679. M. le chancelier a fait lire le projet [pièce dans le procès de Fouquet] tout du long, Sévigné, 4 déc. 1664.

    Tout du long, sans interruption. Çà, je veux étouffer le courroux qui m'enflamme, Et tout du long t'ouïr sur ta commission, Molière, Amph. II, 1. Je vous ai laissés tout du long quereller, Molière, Tart. II, 4. Nous craignons bien que vous n'ayez tout du long Mme la Grande Duchesse, Sévigné, 11 juin 1675.

    Entièrement. J'ose me flatter que ce parlement se fera un honneur de réparer entièrement les malheurs de la famille Sirven, et que le roi payera les frais tout du long, Voltaire, Lett. d'Argental, 29 nov. 1769.

    Fig. Être tout du long dans un livre, dans un récit, y figurer avec détail. L'histoire de la guerre de 1741, où vous êtes tout du long, paraîtra un jour ; mais c'est un fruit qu'il faut laisser mûrir, Voltaire, Lett. Richelieu, 27 sept. 1755.

    Tout du long, en côtoyant. Allez tout du long du ruisseau.

    Tout du long de l'aune, sans discontinuer. C'est véritablement la tour de Babylone, Car chacun y babille et tout du long de l'aune, Molière, Tart. I, 1.

    Il en a eu tout du long de l'aune, c'est-à-dire il a été battu, ou maltraité en quelque affaire.

    Elliptiquement. En donner tout du long, à quelqu'un, le bien battre, le malmener, et aussi se jouer de lui. Le traître ! tout du long il nous en a donné, Hauteroche, Espr. follet, V, scèn. dern.

  • 16En donner à quelqu'un du long et du large, le bien battre. Morbleu, tu as menti ; il faut t'en faire tâter tout du long et tout du large, Hauteroche, Crispin méd. III, 2. Donnons-en à ce fourbe et du long et du large, Molière, l'Ét. IV, 7.
  • 17Le long, tout le long, au long de, loc. prép. En côtoyant. Allez avec les miens au long de ce rivage, Tristan, Panthée, V, 6. Faites plusieurs fosses le long du lit de ce torrent, Sacy, Bible, Rois, IV, III, 16. Le long d'un clair ruisseau buvait une colombe, La Fontaine, Fabl. II, 12. Je voulus prendre le long de la mer, Hamilton, Gramm. 7. Ses larmes coulèrent le long de ses joues, Fénelon, Tél. I. [Anciennement dans les théâtres] le lieu de la scène était resserré par une foule de spectateurs, les uns assis sur des gradins, les autres debout au fond du théâtre et le long des coulisses, Marmontel, Mém. IV.

    Tout le long, pendant toute la durée de. Je m'ennuie tout le long de la journée.

  • 18À la longue, loc. adv. Avec le temps. Ne quittons pas pourtant ; à la longue on fait tout, Corneille, la Gal. du Palais, I, 1. Mais à la longue il trouva si peu de rapport entre son esprit et celui de son invisible…, Scarron, Rom. com. I, 9. À la longue on n'y durerait pas, Sévigné, 558. Le plus habile l'emporte à la longue, Bossuet, Hist. III, 2. Pourquoi la matière propre à faire un soleil ne pourra-t-elle pas se ramasser à la longue en un certain lieu ? Fontenelle, les Mondes, 5e soir.
  • 19Tirer de longue, susciter des délais, des retardements. Porto-Carrero se mit à presser Monteleone de faire le mariage de Mortare avec sa fille ; le duc tira de longue ; mais enfin, serré de près…, Saint-Simon, 90, 186. Un mandement à faire, puis à mettre à l'examen, était de quoi tirer de longue et faire naître toutes les difficultés qu'on voudrait, Saint-Simon, 315, 109.

REMARQUE

1. Marg. Buffet, 1668, Observ. p. 198, blâme l'expression de longue main : " On dit sans penser faire de faute : On connaît ces gens-là de longue main, il faut dire : de longtemps. " Cette expression remonte au XIVe ou XVe siècle et est acceptée par l'usage.

2. Chevallet a dit que la locution de longue main était une méprise de la langue qui avait changé de longuement en de longue main. Il est certain que de longuement s'est dit ; Voici des exemples du XIIe siècle : Des autres s'est li reis partis Od [avec] ceus qui plus amerement Heent [haïssent] le duc de longuement, Chron. des ducs de Norm. t. II, p. 202. Moult est li deables gringnos… Argumens set faire od soffime [sophisme] ; Kar es ceus [cieux] fu e en abisme ; Si a apris de longuement, ib. p. 353. Il ne faut pas prendre longuement pour l'adverbe ; c'est un substantif qui signifie retard, longueur ; voy. dans du Cange mettre longuement à une chose, au mot longare. Mais l'existence de la locution de longuement ne prouve rien contre de longue main ; longue main, qui figurément signifiait pouvoir, puissance, a pu passer au sens de longueur de temps, sans aucune méprise de la part de la langue. Les Allemands disent aussi von langer Hand, depuis longtemps.

HISTORIQUE

XIe s. De lunc dei [du doigt du milieu], de l'altre qui porte l'anel, Lois de Guill. 13. Veez m'espée, qui est e bone e lunge, Ch. de Rol. LXXV. Lunc un autel belement [ils] l'entererent, ib. CCLXXI.

XIIe s. Et de lonc et de lé, Roncis. 19. Je t'ai moult lonc [longtemps] portée [mon épée], ib. 23. En vielle geste est escrit de lons ans, ib. 86. Tant s'est amors affermée En mon cuer [cœur] à lonc sejor, Couci, I. Mainte longue semaine Trai [je passe], quant sui loing de lui [elle], ib. VIII. Mais bien me pourra grever Lons desirs sans conforter, ib. p. 119.

XIIIe s. De longues terres longues nouvelles [celui qui revient de loin a beaucoup à dire], Prov. du vilain, ms. de St-Germain, f° 74, dans LACURNE. Et il virent le lonc et le lé de la vile, qui de toutes autres estoit souveraine, Villehardouin, LXI. Cinq piés [Pepin] ot et demi, de long plus n'en ot mie, Berte, II. Se j'ai chanté, ne m'a gaire valu ; Au long aler [à la longue], se Deu plait, me vaudra, Poés. franç. av. 1300, t. I, p. 487, dans LACURNE. Et li crestien avoient tendut une roie [un rets], parmi l'aigue, de lonc en lonc le pont pour les aventures que avenir pooient, Chr de Rains, 96. Ne vous chaut s'il [un vêtement] est cors ou lons, la Rose, 8554. Bien doit estre cele m'amie Qui veut que j'aie longe vie, Fl. et Bl. 2540.

XVe s. Et disoit aux chevaliers qui estoient delez lui : que ce Lombard la fait longue [combien il emploie de temps] ! il nous fait ci mourir de froid, Froissart, I, I, 327. Et me fut dit que de longue main ce duc d'Irlande avoit fait si grand attrait d'or et d'argent…, Froissart, II, III, 80. Je seray ici dedans trois sepmaines au plus long, se Dieu me garde de prison ou de maladie, Perceforest, t. IV, f° 49. N'y aura si estrange proposition que, au respondre, il ne repete de point en point par ordre, et à chascun si bien et si vivement responde ou replique, s'il affiert, qu'il semble que de longue main ait estudié la matiere, Christine de Pisan, Hist. de Charles V, II, 16. Dieu, prevoiant leurs faultes futures, leura souffert de longue main… , Chastelain, Chron. du duc Philippe, proesme. Et tant d'aultres auctorités qui se trouveroient très longues à dire, J. de Saintré, ch. 5. À fin que, le temps advenir, ses faits soient tousjours cause de bon exemple, il est bon que cy soient presentés tout long, Bouc. III, 3. Tout au long du chemin, Commines, I, 2. Toutes fois il recouvra ses pieces [son argent] à la longue, Commines, VII, 5.

XVIe s. L'amiral, à qui la demeure en un lieu estoit ruineuse, après quelques canonades fit filer de longue, D'Aubigné, Hist. I, 325. Cettui-ci, homme violent aux autres choses, ne la fit pas longue [ne vécut pas longtemps] après ce refus, D'Aubigné, ib. II, 28. Si la douleur est longue, elle est legiere, Montaigne, I, 304. Avoir la veue longue, Montaigne, III, 58. Le soleil porta, tout le long d'un an, le deuil de sa mort, Montaigne, II, 382. Estant cheute de son long esvanouïe, Montaigne, III, 181. La longueur du temps adjouxtée à l'assiduité de labeur en la manufacture d'un ouvrage, lui donne force et vigueur de longue durée, Amyot, Péricl. 26. De longue main il estoit en dissension avec ceulx de sa maison, Amyot, ib. 68. Il s'alla camper au long de la riviere d'Aufide, Amyot, Fab. 31. Alcibiades se jetta tout de son long emmy la place au-devant du chariot, Amyot, Alc. 3. S'attendant bien que la guerre prendroit long trait, et iroit en grande longueur soubs Nicias, Amyot, ib. 39. Les roys ont les mains longues, Condé, Mémoires, p. 598. Longues paroles font les jours courts, Cotgrave

ÉTYMOLOGIE

Génev. à la longe, à la longue ; provenç. long, lonc, loing ; port. longo ; ital. lungo ; du lat. longus ; comp. l'allem. lang ; polon. dlugo ; russe, dolgo, grec, δόλιχος ; anc. persan, dranga ; sanscr. dîrgha. La forme polonaise porte à supposer un latin dlongus ; mais Curtius et Corssen contestent ces rapprochements, et rattachent longus au grec λαγγάζω, λογγάζω, tarder, être long. En somme, l'étymologie reste encore obscure.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

LONG.
12De long. Ajoutez :

Aller de long, continuer. Je l'ai trouvé [votre livre] si bien à mon goût, qu'il a fallu que je sois allé de long, Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne.

19Ajoutez :

Aller de longue, avancer. Puisque je me suis mis dans le chemin de l'impudence, il faut aller de longue, Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne.

REMARQUE

Ajoutez :

3. À côté de tirer de longue, causer des délais, on trouve aussi, au neutre, tirer de longue, éprouver des délais. Le roi juge l'affaire si importante qu'aussitôt qu'il a cru qu'elle pouvait tirer de longue, il s'est résolu de s'avancer jusques à Pignerol, Richelieu, Lettres, etc., t. VI, p. 468 (1639).

4. Ajoutez un exemple de longue main (voy. la discussion à Rem. 2), lequel est du XIIIe s. : Fouke Cringnon et Wautier sen frere, qui tenoient les II moies de terre devant dites et qui avoient paiet de longe main les deus mines de blé…, Charte du Vermandois de 1238, dans Bibl. des ch. 1874, t. XXXV, p. 457.