« aisé », définition dans le dictionnaire Littré

aisé

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

aisé, ée

(è-zé, zée) adj.
  • 1Qui se fait ou qui est sans peine. Tout deviendra aisé. Il est aisé de prouver. Il était aisé à la reine de faire sentir une grandeur qui lui était naturelle, Bossuet, Reine d'Angl. Il était encore plus aisé au roi de lever des soldats que de les armer, Bossuet, ib. Ce beau feu dont pour vous ce cœur est embrasé, Trouvera tout possible et l'impossible aisé, Rotrou, Vencesl. V, 2. Il n'est pas bien aisé de m'obtenir de moi, Corneille, Rodog. III, 4. Que vous êtes heureuse ! et qu'un peu de soupirs Fait un aisé remède à tous vos déplaisirs ! Corneille, Poly. II, 2. Sans doute il est aisé de s'en laisser troubler, Voltaire, Zaïre, IV, 7. Il est aisé de juger à quels mouvements et à quelles contentions tout cela engage, Bourdaloue, Pensées, t. I, p. 259. De grands pécheurs ouvrent les yeux, écoutent les remontrances qu'on leur fait, reviennent de leurs égarements ; et plus même ils sont grands pécheurs, plus il est quelquefois aisé de les émouvoir, Bourdaloue, ib. p. 208. Sous ce terme nous comprenons tout ce qu'il y a dans le monde qui peut éblouir les yeux, charmer les sens, piquer la curiosité, nourrir l'amour-propre, rendre la vie aisée, commode, agréable, molle et délicieuse, Bourdaloue, ib. p. 224. Votre profession et tous les engagements, bien loin d'être encore pour vous un fardeau aussi pesant qu'ils l'étaient ou qu'ils vous le semblaient, vous deviendront aisés, et vous porterez le joug du Seigneur avec une sainte allégresse, Bourdaloue, ib. t. II, p. 396. Il y a des places, des rangs, des professions, où la réputation est beaucoup plus précieuse, plus délicate, plus aisée à blesser que dans les autres, Bourdaloue, ib. t. III, p. 164. Gloire aisée, Racine, Phèd. II, 1. Vous avez trouvé toutes choses si aisées qu'elles se pouvaient quasi faire d'elles-mêmes, Guez de Balzac, Liv. IV, lett. 18.

    Cela est aisé à dire, se dit quand quelqu'un donne un conseil difficile à pratiquer et qu'il n'est pas obligé de suivre.

  • 2Où l'on est à l'aise. Route aisée. Une voiture aisée. Un habit aisé. Des souliers aisés, larges.
  • 3 Fig. Libre, dégagé. Une taille aisée. Un air aisé. Mouvements aisés.
  • 4 En termes de peinture, pinceau aisé, celui dont la touche est franche, libre, facile. En gravure, pointe aisée, celle qui est nette et coulante.
  • 5Peu sévère, relâché. Une dévotion aisée. Une morale aisée.
  • 6Facile, agréable. Des vers naturels et aisés. Manières aisées. Oh ! que j'aime bien mieux cet auteur plein d'adresse Qui, sans faire d'abord de si hautes promesses, Me dit d'un ton aisé, doux, simple, harmonieux…, Boileau, A. P. III.
  • 7Qui jouit de quelque fortune. C'est un homme aisé. Cette famille est aisée.
  • 8 Familièrement. Cet homme n'est pas aisé, il est d'une humeur, d'un caractère difficile.

    Cet homme est aisé à vivre, il est d'un commerce facile et doux. Les conditions les plus aisées à vivre selon le monde sont les plus difficiles à vivre selon Dieu, Pascal, P. jés. 19.

  • 9 S. m. plur. Les gens à leur aise, qui ont quelque fortune. La taxe des aisés. Le rôle des aisés. Vieux en ce sens.

    Aisé suit d'habitude son substantif.

REMARQUE

Il est aisé (impersonnel) prend de avec l'infinitif : Il est aisé de voir. Cependant, au temps de Descartes, cela n'était pas constant : Il est aisé à remarquer que cette altération est sentie, Descartes, Pass. I, 33. Mais aisé prend à devant un infinitif dans les autres cas, c'est-à-dire quand il n'est pas employé impersonnellement : Cela est aisé à faire ; homme aisé à vivre. Mme de Sévigné a dit aisé à, dans le sens de qui se laisse aller : Si j'étais aussi aisée à succomber à l'envie de vous entendre…, Sévigné, 402.

SYNONYME

AISÉ, FACILE. Ils marquent ce qui ne coûte pas de peine. En ce sens ils sont à peu près synonymes, et il est difficile d'y saisir une nuance, malgré les efforts des auteurs pour en signaler. Une démonstration aisée, ou une démonstration facile ; cela est aisé à apprendre, ou cela est facile à apprendre, ne présentent pas de distinction bien sensible. Mais les distinctions deviennent manifestes dans les emplois dérivés : un habit est aisé, et non facile ; le cœur, le caractère, un homme, sont faciles, c'est-à-dire qu'ils inclinent à des actes d'indulgence et de bonté, et non aisés. Mais on dit également facile à vivre, et aisé à vivre. Une chose est aisée à croire, c'est-à-dire à être crue ; mais une personne est facile à croire, c'est-à-dire qu'elle croit facilement.

HISTORIQUE

XIIIe s. De quoi je sui certein que se il eussent esté en leur cloistre, il ne fussent pas si aisié comme il sont avec le roy, Joinville, 288. L'un des poins de la loy Haali est que quant un homme se fait tuer pour faire le commandement son seigneur, que l'ame de li en va en plus aisié cors qu'elle n'estoit devant, Joinville, 260.

XVIe s. Et s'il te plaist, menu les briseras, Aussi aisé comme un vaisseau de terre, Marot, IV, 228. Au demeurant vous m'avez laissée en une compaignie tant aisée à vivre, que je n'ay encores ouy une seule parole que une seur ne deust dire à l'autre, Marguerite de Navarre, Lett. XCVIII. Enfin, Cinna, je t'ai rendu accommodé et si aysé [à son aise, riche] que…, Montaigne, I, 129. Ils sont plus aysez à concevoir qu'un conte de Boccace, Montaigne, I, 180. A mesure qu'elle se treuve plus molle, il est plus aisé à y empreindre quelque chose, Montaigne, I, 199. Je suis bien aysé que les tesmoings nous sont plus à main où nous en avons plus affaire, Montaigne, I, 309. J'avais prins un cheval bien aysé, Montaigne, I, 52. Un mesme pas de cheval me semble tantost rude, tantost aysé, Montaigne, II, 324. Ceulx qui estoient plus aysez desfrayoient les plus necessiteux, Montaigne, I, 175. L'aysé et le malaysé lui sont un, Montaigne, II, 151. Sa voix estoit doulce, sa langue diserte et sa parole aisée, Amyot, Péric. 11. Il n'est pas aisé de dire quelle raison l'en detourna, Amyot, Fab. 34. Entendement aisé [vif, pénétrant], Amyot, Marcel. 27. Son pere luy faillit en l'aage de sept ans, et le laissa assez aisé, car son bien ne valoit gueres moins de quinze talents, Amyot, Démosth. 6. Quant à Marius, qui estoit pesant et mal aisé de sa personne, Amyot, Marius, 67.

ÉTYMOLOGIE

Participe de l'anc. franç. aiser, aisier, faciliter ; picard, aisié ; provenç. aisado ; angl. easy (voy. AISE).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

AISÉ. Ajoutez :
10L'assemblage de quelques parties d'un appareil quelconque est dit aisé, lorsque ces pièces peuvent un peu jouer les unes sur les autres, entrer facilement les unes dans les autres.