« conduite », définition dans le dictionnaire Littré

conduite

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

conduite

(kon-dui-t') s. f.
  • 1Action de conduire, de mener, de guider. Être chargé de la conduite d'un aveugle, d'un troupeau, d'un convoi.

    Par extension, celui qui conduit. À vous mettre en lieu sûr je m'offre pour conduite, Molière, Tart. V, 6.

    Terme de marine. Frais de route payés aux marins pour se rendre dans les ports militaires ou pour retourner dans leurs quartiers.

  • 2Accompagnement avec cérémonie. Être chargé de la conduite d'un ambassadeur. Faire la conduite à un camarade qui part.
  • 3Ce qui conduit, dirige.

    Terme de marine. Poulie de conduite, poulie qui dirige certains cordages.

    Terme de métier. Partie excédante du fût d'un outil de menuisier, qui l'empêche de descendre trop.

    Pièce d'une grosse horloge, qui transmet le mouvement à une certaine distance.

  • 4 Terme d'hydraulique. Aqueduc, tuyau qui conduit les eaux. Ces fontaines Dont les conduites souterraines…, Malherbe, III, 3.

    Fig. Et par une conduite immense La grâce descend dessus nous, Régnier, Hymne.

    Petit canal pratiqué sous le carreau, pour amener l'air extérieur dans le foyer et faire monter la fumée.

  • 5 Fig. L'action de conduire, de diriger. Être chargé de la conduite d'un diocèse, de la conduite des âmes. Avoir la conduite d'une armée. Prendre la conduite d'une entreprise. Laissez-moi la conduite de cette affaire. Et de ton heureux sort laisse-moi la conduite, Corneille, Nicom. I, 4. Je vois sur la frontière une puissante armée. Comme vous l'avez dit, à vaincre accoutumée ; Mais par quelle conduite et sous quel général ? Corneille, ib. III, 2. Quand un monarque agit par sa propre conduite, Corneille, Othon, I, 1. Il leur laissait toute la conduite de l'affaire, Sévigné, 401. Je suis les conduites ordinaires de la prudence, Sévigné, 318. Et nous verrons ensuite Si je dois de vos feux reprendre la conduite, Molière, l'Étour. III, 5. Le fils fut mis sous la conduite D'un précepteur, La Fontaine, Contr. Sur l'ordre et la conduite de qui ce lieu et ce temps a-t-il été destiné à moi ? Pascal, dans COUSIN. Dieu ne fait plus de miracles dans la conduite ordinaire de son Église, Pascal, ib. Remettons-nous à Dieu pour la conduite de nos vies, Pascal, ib. Si nous lui en remettons la conduite, Pascal, ib. Vous pouvez du départ me laisser la conduite, Racine, Esth. III, 1. Allez, de votre sort laissez-moi la conduite, Racine, Andr. IV, 3. Ceux à qui je voulais qu'on livrât sa conduite, Racine, Brit. IV, 2. Arsace, je me vois chargé de sa conduite, Racine, Bérén. III, 2. Régner et de l'État embrasser la conduite, Racine, Phèd. III, 1. Mais ce n'est que l'effet d'une sage conduite Dont César a voulu que vous soyez instruite, Racine, Brit. I, 2.
  • 6 Terme de théologie. Voie divine, dessein divin. Le ciel choisit souvent de secrètes conduites Qu'on ne peut démêler qu'après de longues suites, Corneille, Œdipe, IV, 1. La conduite dont Dieu s'est servi en cette rencontre, Pascal, Lett. 1er avril 1648. Voilà les admirables conduites de la sagesse de Dieu sur le salut des saints, Pascal, Lett. 4. La conduite de Dieu sur la vie et la maladie, Pascal, dans COUSIN. Nous bénirons la conduite de la Providence, Pascal, ib. J'ai fait de sérieuses réflexions sur les conduites de Dieu sur vous, Bossuet, Lett. 10. Dans le nouveau Testament il a suivi une autre conduite, Bossuet, Hist. II, 13. Elle conserve dans son cœur la conduite passée de Dieu sur elle, Massillon, Myst. Purif. 1. Telle fut envers Bernard la conduite de la grâce, Massillon, Panég. St Bern.
  • 7Direction de travaux de constructions, de fortifications, de siége. La conduite des travaux du Louvre. Avoir la conduite d'une tranchée.

    Le plan et la marche d'un ouvrage d'esprit. La conduite d'un poëme dramatique. Un caractère tracé avec beaucoup de conduite.

    Terme de peinture. Bonne ordonnance d'un tableau.

    Terme de musique. Art de mettre en œuvre et de développer le motif d'une composition.

    Terme de rhythmique ancienne. Conduite rhythmique, ou, simplement, rhythmique, rapidité ou lenteur dans le temps ou la marche de la déclamation.

  • 8Manière de se comporter, de se gouverner. Avoir une bonne conduite. Mais je ne comprends point toute votre conduite, Corneille, Nicom. III, 4. On donne des conseils, mais on n'inspire pas de conduite, La Rochefoucauld, Réfl. 378. Mais des yeux du Seigneur leur conduite éclairée Ne s'écartait jamais de la divine loi, La Fontaine, Captivité de St Malc. Il avait voulu l'engager à tenir une conduite plus droite, Fénelon, Tél. XX. L'Hespérie et toute la Grèce, qui ont les yeux sur nous, méritent que nous tenions cette conduite pour en être estimés, Fénelon, Tél. XX. Combien voit-on de gens qui, sur une vaine confiance en leur bonne intention, s'engagent dans de fausses conduites ! Fénelon, ib. XVII. L'épouse que tu prends, sans tache en sa conduite, Aux vertus, m'a-t-on dit, dans Port-Royal instruite, Boileau, Sat. X. Il te sied bien d'avoir en de si jeunes mains, Chargé d'ans et d'honneurs, confié tes desseins, Et laissé d'un vizir la fortune flottante Suivre de ces amants la conduite imprudente, Racine, Baj. IV, 7. D'un rival en fureur est-ce là la conduite ? Racine, Mithr. IV, 1. Vous-même rougiriez de ma lâche conduite, Racine, Bérén. V, 6.

    Absolument. Bonne conduite. Avoir de la conduite. Manquer de conduite. Être sans conduite.

    Certaines façons dont on use. La conduite qu'il a tenue hier soir est sans excuse.

    Prudence, adresse, savoir-faire. Le malheur, par conduite, au bonheur cédera, Régnier, Sat. XII. Détester en pleurant votre peu de conduite, Tristan, Mort de Chrispe, IV, 1. [Il] Ménagea notre vie avec tant de conduite, Rotrou, Vencesl. IV, 6. Vous avez de la prudence, de la conduite, Sévigné, 432. Près du prince Gygès eut assez de conduite, La Fontaine, Cand.

REMARQUE

1. D'après Laveaux, ce nom n'a point de pluriel, si ce n'est en termes d'hydraulique, en parlant des tuyaux des aqueducs qui conduisent les eaux d'un endroit à un autre. C'est une erreur. Conduite a un pluriel dans tous les sens comme on peut le voir aux exemples.

2. Dans le sens théologique de direction divine, conduite prend la préposition sur.

HISTORIQUE

XIIIe s. Et ferons nous encore davantage, que nous metrons cinquante galies armées en vostre conduite, Villehardouin, XIV.

XVIe s. Dame Pallas qui luy avoit prefix Ducteurs expers et de sure conduicte Pour gouverner si puissant exercite [armée], Marot, J. V, 54. Les jeux, danses, desquelles l'antiquité a donné le patronage et la conduicte aux dieux mesmes, Montaigne, I, 184. Cette bataille gaignée soubs la conduicte de dom Joan d'Austria, Montaigne, I, 249. Soubz sa conduitte ilz avoient accoustumé de batre tousjours leurs ennemis, Amyot, Philop. 13. La dure mere sert de conduite aux veines et arteres estans entrées au crane, lesquelles s'inserent en la duplicature d'icelle, Paré, III, 5. Comme on voit la navire attendre bien souvent Au premier front du port la conduite du vent, Ronsard, 424.

ÉTYMOLOGIE

Conduit, participe passé pris au féminin et substantivement ; bourguig. condute, condeute.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CONDUITE. Ajoutez :
9Manière dont se comportent des instruments, des machines. Sur la conduite des chronomètres, Rouyaux, Acad. des sc. Comptes rendus, t. LXXXII, p. 679.
10Conduite de, avec un verbe à l'infinitif, pour conduite qui consiste à. Cette conduite va bien plus à… que celle de suivre…, Fénelon, Lett. spirit. CXXXVI.
11Conduite de Grenoble, ancienne locution qui signifiait mauvais accueil, mauvais traitement. Si vous aviez été l'autre jour au Marché des Innocents, vous auriez pu jouer votre petit rôle dans la conduite de Grenoble qu'on a faite à M. l'abbé [Terray], Rev. Britan. sept. 1872, p. 132.