« soldat », définition dans le dictionnaire Littré

soldat

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

soldat

(sol-da ; le t ne se lie pas dans le parler ordinaire ; au pluriel, l's se lie : des sol-da-z aguerris) s. m.
  • 1Homme de guerre à la solde d'un prince, d'un État. Nos princes ont-ils eu des soldats plus fidèles [que les chrétiens] ? Corneille, Poly. IV, 6. Haranguez de méchants soldats ; Ils promettront de faire rage ; Mais au moindre danger adieu tout leur courage ; Votre exemple et vos cris ne les retiendront pas, La Fontaine, Fabl. IX, 19. Enfin, ma fille, nos bas Bretons sont étranges ; je ne sais comme faisait Bertrand du Guesclin pour les avoir rendus en son temps les meilleurs soldats de France, Sévigné, 551. Il était encore plus aisé de lever des soldats que de les armer, Bossuet, Reine d'Angl. Qu'il est beau, dans le tumulte des armes, de savoir encore goûter cette gloire tranquille qu'on n'a point à partager avec le soldat, non plus qu'avec la fortune ! Bossuet, Louis de Bourbon. Les soldats, ménagés et exposés quand il faut, marchent avec confiance sous ses étendards, Bossuet, ib. Implacable ennemi de Rome et du repos, Comptez-vous vos soldats pour autant de héros ? Racine, Mithr. III, 1. Quoi ! la peur a glacé mes indignes soldats ! Racine, Ath. V, 5. Soldats du Dieu vivant, défendez votre roi, Racine, Ath. V. 5. Nos soldats passent sans cesse d'un travail extrême à une extrême oisiveté, Montesquieu, Rom. 2. Ce ne furent plus les soldats de la république, mais de Sylla, de Marius, de Pompée, de César, Montesquieu, Rom. 9. Toutes les denrées (excepté les soldats, que j'ai appelés la plus nécessaire denrée des rois) étant aujourd'hui du double au moins plus chères [que du temps de Henri IV], Voltaire, Pol. et lég. Embell. de Paris. Comme un soldat debout qui veille sous les armes…, Lamartine, Nouv. Méd. VII.
  • 2Celui qui sert dans l'armée et qui est sans grade. Maintenir la discipline parmi les soldats. Ce capitaine est le père de ses soldats. Quelle différence entre un soldat et un chartreux quant à l'obéissance ? Pascal, Pens. XXIV, 37, édit. HAVET. Les simples soldats, qui, voyant toute leur vie dans le moment présent, et attendant peu de l'avenir, ne s'en inquiètent guère, conservaient [à Moscou] leur insouciance, la plus précieuse de leurs qualités, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 11. Ce fut ainsi que, depuis ce déluge de neige, chacun, chef comme soldat, conserva ou perdit sa force d'esprit, suivant son caractère, son âge et son tempérament, Ségur, ib. IX, 11. Le cercle de chacun lui suffit… et les regards d'un peloton excitent un soldat, comme ceux d'une armée enflamment un général, Ségur, ib. IX, 13.

    Familièrement. Il n'est que soldat, ce n'est qu'un soldat, il n'a que de la bravoure.

    Il s'est conduit plutôt en soldat qu'en capitaine, il a montré plus de bravoure que d'habileté.

    Soldat de fortune, homme qui s'est élevé des derniers rangs de l'armée à une haute position. Dioclétien n'était à la vérité qu'un soldat de fortune ; mais c'est cela même qui prouve son extrême mérite, Voltaire, Mœurs, 8.

    Faire des soldats, se disait, sous l'ancienne monarchie, du recruteur qui racolait des soldats. Il vous manque quatre ou cinq soldats que M. de la Rose et moi trouverions moyen de faire, Dancourt, la Gazette, sc. 2.

  • 3Soldat de marine, voy. MARINE.

    Soldat-matelot, nom d'une troupe de mer que créa Louis XIV.

  • 4Il se dit, en général, de tout homme qui appartient à la profession militaire. Depuis plus de six ans, il ne s'est fait combat Qui ne m'ait bien acquis ce grand nom de soldat, Corneille, D. Sanche, I, 3. Je parlerai, madame, avec la liberté D'un soldat qui sait mal farder la vérité, Racine, Brit. I, 2. Moins instruit que fidèle, Je ne suis qu'un soldat, et je n'ai que du zèle, Voltaire, Zaïre, III, 4. Le premier qui fut roi fut un soldat heureux, Voltaire, Mérope, I, 3. Et tout homme est soldat contre la tyrannie, Voltaire, Sophon. III, 2. …Qu'il ne tombe point comme un noble adversaire, Tout vivant de la lutte et du feu du combat ; Il serait trop heureux : il mourrait en soldat ; Qu'il tombe en criminel, P. Lebrun, le Cid d'And. III, 3. Tandis que le soldat sage et simple qui avait été son collègue [de Marmont] dans cette journée du 30 mars, qui lui aussi avait le visage noirci par la poudre, Mortier, dévorait sa douleur…, Thiers, le Consul. et l'Emp. LIII.

    Soldat du pape, mauvais soldat, soldat mou.

    Adjectivement. Il a l'air soldat.

  • 5 Fig. et poétiquement, serviteur. Soldat de Dieu. Lors même que M. de Turenne commande, il se regarde comme un soldat de Jésus-Christ, Fléchier, Turenne.
  • 6À la soldate, à la manière des soldats. Ses cheveux de drille… ses serments à la soldate… tout cela donna dans la vue d'une vieille veuve, Scarron, Rom. com. II, 6. Plusieurs cavaliers… le convièrent de courir la bague avec eux, ce qu'il fit, habillé à la soldate, Scarron, ib. II, 19.
  • 7Soldats de plomb, infanterie et cavalerie avec les divers costumes de toutes les armes, soldats et officiers fabriqués en plomb de toutes les grandeurs et qui font la joie des petits enfants.

    Fig. Vieux soldats de plomb que nous sommes, Au cordeau nous alignant tous…, Béranger, Fous.

  • 8 Terme de zoologie. Soldat de mer, pagure.

    En Saintonge, soldat du guet, petit capricorne rouge, comme était la casaque des soldats du guet.

    Soldat des bois, espèce de mante.

    Nom donné à des individus neutres à grosse tête et à fortes mandibules, parmi les termites.

    PROVERBE

    Le soldat doit avoir assaut de lévrier, fuite de loup, défense de sanglier, c'est-à-dire assaillir comme fait un bon lévrier, se retirer comme fait le loup qui s'entretient toujours en haleine, et se défendre avec l'opiniâtreté du sanglier.

HISTORIQUE

XVIe s. Les uns se disent gens d'armes, les autres archers ; mais peu sont soldats, Lanoue, 231. Les simples soldats, Lanoue, 265. Ils les connaissoient plus soldats et beaucoup mieux armez qu'eux, D'Aubigné, Hist. III, 283. Leurs chausses descoupées à la soldate, Carloix, VI, 23. N'estants soldats, pas seulement souldrilles ny dignes de ceste qualité, et n'ayants jamais faict serment ny service à sa majesté, Carloix, VIII, 11. Le capitaine Chancée, gentil soldat certes, Brantôme, Sur les duels, p. 322, dans LACURNE. Depuis tous ces noms se sont perdus et se sont convertis au beau nom de soldat, à cause de la solde qu'ils tirent ; les Espagnols et Italiens nous les ont mis en usage, encore que quelquefois les Italiens les appellent fantassins ; mais l'Espagnol use toujours de ce mot soldados, qui est le plus beau nom qu'on peut imposer aux gens de pied, et n'en déplaise aux Latins avec leurs mots milites et pedites qui sont fort sots et laids auprès de celuy de soldats, Brantôme, Capit. franç. t. IV, p. 47. Quant aux sommes imposées pour les petits soldats [pionniers], Sully, Mém. t. III, p. 269. À jeune soldat vieil cheval, Cotgrave Soldat de courte espée [larron, coupe-bourse], Oudin, Dict. De charron soldat, de soldat gentilhomme, et puis marquis, si fortune en dit, Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 103.

ÉTYMOLOGIE

Espagn. soldado ; ital. soldato, de soldare, solder (voy. SOLDER). L'ancienne langue disait soldoier, d'où l'anglais a fait soldier.