« épandre », définition dans le dictionnaire Littré

épandre

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

épandre

(é-pan-dr'), j'épands, nous épandons ; j'épandais ; j'épandis ; j'épandrai ; j'épandrais ; épands, épandons ; que j'épande, que nous épandions ; que j'épandisse ; épandant ; épandu v. a.
  • 1Étendre en versant, en dispersant, en éparpillant. Ce fleuve épand ses eaux dans la campagne. Épandre du fumier dans un champ. Où Polycrène épand ses libérales eaux, Rousseau J.-B. Ép. VI. Océan, qui sur tes rives Épands tes vagues plaintives, Lamartine, Harm. II, 13.

    Fig. La terreur de son nom qui devance ses armes Épandit dans les rangs de si vives alarmes…, Perrault, Poëme de la peinture.

  • 2Verser, faire couler. J'épandrais mon sang Plutôt que de rien faire indigne de mon rang, Corneille, Cid, I, 4. J'abandonne mon sang à qui voudra l'épandre, Corneille, Cinna, IV, 4.
  • 3 Fig. Verser, donner, accorder en abondance. L'astre qui luit aux grands… Épandit dessus moi tant d'heur et de puissance, Malherbe, V, 30. Daigne du juste ciel la bonté souveraine… n'épandre sur vous que des prospérités, Corneille, Rodog. II, 3. Une majesté douce épand sur son visage De quoi s'assujettir le plus noble courage, Corneille, Pomp. III, 3. Je ne sais d'homme nécessaire Que celui dont le luxe épand beaucoup de bien, La Fontaine, Fabl. VIII, 19. C'est un parterre où Flore épand ses biens, La Fontaine, ib. x, 1.
  • 4S'épandre, v. réfl. Être épandu. Les eaux s'épandent dans la campagne. Un peuple inconnu et renfermé jusqu'alors entre le fleuve Tanaïs et la Mer Glaciale sortit de son pays, et s'épandit comme un torrent dans toutes les provinces voisines, Fléchier, Théodose, I, 58. Tes cheveux déliés, soudain Par anneaux flottants s'épandirent, Et comme un nuage couvrirent L'ivoire poli de ton sein, Bernard, Poés. div. Ép. x, à Batilde.

    Fig. Pour ce trait de douceur le nom de Constantin S'épandra désormais du couchant au matin, Tristan, M. de Chrispe, I, 3. J'ai couru vers les lieux où le bruit s'épandait, Tristan, Mariane, I, 3. Retournez vite au camp où s'épand un murmure, Mairet, Sol. III, 3. Et si l'erreur s'épand jusqu'en nos garnisons, Corneille, Sertor. IV, 3. Un bruit s'épand qu'Enghien et Condé sont passés, Boileau, Ép. IV. Un embrasement qui s'épand au loin dans une forêt, La Bruyère, I.

    S'épandre en, produire avec abondance. En superfluités s'épandant d'ordinaire, Et poussant trop abondamment, Il [le blé] ôte à son fruit l'aliment, La Fontaine, Fabl. IX, 11.

  • 5Se promener au loin, en parlant des regards. En voyant ses regards s'épandre sur les eaux Pour jouir et juger d'un combat de vaisseaux, Corneille, Androm. I, 1.
  • 6Être versé, donné libéralement. Je souhaiterais… que vos bontés s'épandissent sur quelques personnes, Méré, Œuv. post. t. II, p. 125.

SYNONYME

ÉPANDRE, RÉPANDRE. Épandre indique, dans l'action, une sorte d'ordre et d'arrangement qui n'est pas dans répandre.

HISTORIQUE

XIe s. [Il] Tranche la teste por la cervele espandre, Ch. de Rol. CCLXIV.

XIIe s. Li sans de lui espant [se répand] parmi la prée, Ronc. p. 90. La novele espandue du saint martyr novel, Qui giseit au mustier ocis sur le quarrel, Th. le mart. 153. Venge le sanc des tuens [tiens], Deus, qui est espandus, ib. 76. [Il prie] Que Deus le mete en bone veie, E que sa grace li espande, Si qu'od lui truist [qu'avec lui il trouve] ceo qu'il demande, Benoit de Sainte-Maure, II, 6222.

XIIIe s. Si s'espandront de toutes pars parmi la terre pour querre viandes, Villehardouin, LXII. Les autres gens qui furent espandus parmi la ville gaaingnerent assés, Villehardouin, CVII. L'odor de lui [du bouton] entor s'espent, la Rose, 1676. Très bien les servent li serjant ; Vin aportent à espandant, En coupes, en hanas d'argent Aportent clair vin et piument, Fl. et Bl. 1265. Que vostre sang devés espandre, Et pour sainte eglise defendre, Barbazan, Fabliaux, I, 65.

XIVe s. Car des autres bourjois en y ot revenus, Qui tout ont confermé et les fais espandus, Guesl. 8435. Que ceste doctrine signée sous certain chapitre soit trouvée plus legierement que se ele estoit espandue en divers chapistres de çà et de là, H. de Mondeville, f° 104. Adonc s'espandirent nouvelles par le pays, Froissart, I, I, 18.

XVIe s. Sans espandre ny voix ny pleurs, Montaigne, I, 8. Tantost elles s'espandent d'un costé, tantost d'un aultre [les rivières], Montaigne, I, 232. Main à demy espandue et ouverte, Montaigne, II, 231. Il fault espandre le grain, non pas le respandre, Montaigne, IV, 9. La renommée de sa vaillance estoit fort espandue par toute la Grece, Amyot, Thés. 38. Il espandit sur l'heure grande quantité de larmes, Amyot, Péric. 69.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. espandre ; ital. spandere ; du latin expandere, de ex, et pandere, déployer.