« clerc », définition dans le dictionnaire Littré

clerc

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

clerc

(klèr ; le c ne se prononce jamais, excepté dans la locution clerc à maître, dites : clèr-k à maître ; au pluriel l's ne se lie pas : des clercs en vacances, dites : des clèr en vacances ; cependant d'autres disent : des clèr-z en…) s. m.
  • 1Par opposition à laïque, toute personne qui étudie pour entrer dans l'état ecclésiastique. Il naît un autre clerc pour remplir la place, La Bruyère, XIV. Un clerc mondain ou irréligieux, s'il monte en chaire, est déclamateur, La Bruyère, XV. On sauve l'innocence des clercs de la contagion du monde, Massillon, Or. fun. Villeroy. Il n'était pas permis [sous Charlemagne] de se dire clerc sans l'être, Voltaire, Mœurs, 20.

    Dans les anciens parlements, conseiller-clerc, conseiller qui était pourvu d'une charge affectée aux ecclésiastiques.

    Clerc de la chapelle, ecclésiastique qui était un des officiers de la chapelle du roi.

    À Rome, clerc de la chambre, prélat officier de la chambre apostolique.

    Fig. Parler latin devant les clercs, parler de choses devant des personnes qui les connaissent mieux que vous ne les connaissez.

    Adjectivement. C'est qu'on avait toujours devant les yeux les tribunaux clercs, Montesquieu, Espr. XXVIII, 40.

  • 2Autrefois, par extension, tout homme lettré ou savant. Salomon qui grand clerc était, La Fontaine, Joc. M. de Châlons, qui en affaires du monde n'était pas grand clerc, alla nasiller coup sur coup au régent, Saint-Simon, 450, 38. Pour être, S'il se peut faire, en mal plus grands clercs que leur maître, Régnier, Sat. VI. N'en déplaise aux docteurs, cordeliers, jacobins, Pardieu, les plus grands clercs ne sont pas les plus fins, Régnier, Sat. III.

    Clerc du secret, ancien nom de ceux qu'on a appelés plus tard secrétaires d'État.

    Adjectivement. Un loup quelque peu clerc prouva par sa harangue Qu'il fallait dévouer ce maudit animal, La Fontaine, Fabl. VII, 1.

  • 3Celui qui travaille dans l'étude d'un notaire, d'un avoué, etc. Clerc d'huissier. Clerc de procureur. Aborder sans argent un clerc de rapporteur, Boileau, Lutr. II. George… Qu'un million comptant, par ses fourbes acquis, De clerc, jadis laquais, a fait comte et marquis, Boileau, Sat. I.

    Maître clerc, principal clerc, premier clerc, le clerc qui dirige une étude.

    Petit clerc, jeune homme qui, dans une étude, fait les commissions et rend les petits services.

    Vice de clerc, faute qui, se trouvant dans un acte par l'étourderie d'un clerc, n'est pas imputable à l'auteur de l'acte, et peut se corriger par ce qui suit ou précède. Cette locution vieillit.

    Familièrement. Pas de clerc, faute commise par ignorance ou par étourderie dans une affaire ; démarche inutile, maladroite. Et il n'est pas question d'aller faire ici un pas de clerc, Molière, G. Dand. I, 4. Ma langue en cet endroit a fait un pas de clerc, Molière, le Dép. I, 4. Que sûtes-vous par le rapport de votre envoyé ? Peu de chose ; à la fin on imprime, tout devient public, et il se trouve qu'il n'y a point eu de conspiration ; cependant les têtes étaient coupées ; voilà un furieux pas de clerc, une bévue qui coûte cher, et que la liberté des journaux vous eût épargnée, Courier, I, 216. Le parlement de Toulouse, qui voit qu'il a fait un horrible pas de clerc, empêche que la vérité ne soit connue, Voltaire, d'Argental, 15 mai 1762.

    Compter de clerc à maître, rendre seulement compte de ce qu'on a reçu et déboursé, sans autre responsabilité.

  • 4Dans les paroisses, clerc de l'œuvre, celui qui a soin de certaines choses concernant l'œuvre de la paroisse.

    Autrefois, chez le roi ou chez les grands princes, clerc d'office, officier suivant les plats servis devant le roi et ayant soin des choses qui se faisaient dans l'office.

    Autrefois, celui qui servait quelque corps de métier et qui en faisait partie. Le clerc des orfévres.

    Autrefois, clerc du guet, officier du guet dans les ports de mer et sur les côtes.

  • 5Autrefois, clerc d'armes, jeune gentilhomme qui apprenait les exercices militaires et qui était un novice de chevalerie.

    PROVERBE

    Les bons livres font les bons clercs, c'est-à-dire c'est dans les bons livres qu'on prend la science.

HISTORIQUE

XIe s. Ensemble od lui si clerc et si chanoine, Ch. de Rol. CCLXVI.

XIIe s. Li clers i vint sur un mulet amblant, Ronc. p. 163. Faites faire erramant Vos chartres et vos briés [brefs] à clerz bien escrivanz, Sax. XX. Sire clerz, tout en haut [à haute voix] nous dites la leçon, ib. XX. Arcevesques, evesques, e clerc de grant clergie, Th. le mart. 113. As leis [lois] ecclesiaus deit laie leis servir ; Nulz ne deit plaiz d'iglise, se n'est clers, maintenir, ib. 75.

XIIIe s. Si vot li quens Gautiers que Jehans ses fius fust clers ; mais il ne le vot iestre, Chr. de Rains, 83. Homs qui aime ne puet bien faire, N'à nul preu de ce mont [monde] entendre ; S'il est clers, il pert son aprendre, la Rose, 3058. Sel [si vous le] demandés as clers lisans, ib. 370. Cascuns des auditeurs pot avoir son clerc por escrire ce qui est dit en l'enqueste, Beaumanoir, XL, 26. Fors escoliers, autre clergié Sont tuit d'avarice vergié ; Plus est bons clers qui plus est riches, Rutebeuf, 227.

XIVe s. Au dit mestier n'aura que dix vendeurs tant seulement, lesquels vendront les dits poissons en leurs personnes, sans ce qu'il les puissent faire vendre par leurs femmes, par leurs clercs mesmes, ne par aucune autre personne que par eux, Ordonn. des rois de Fr. t. II, p. 358. Assez puet impetrer qui donne largement ; Car li homs est bons clers qui a assez d'argent, Guesclin. 17428.

XVe s. Aussi [de même] les sciences sont extraites et compilées de plusieurs clercs, et ce que l'un sait, l'autre ne sait mie, Froissart, Prol. Escoutés donc ce qu'on dira ; Aprenez, soyez clergeresse, Coquillart, Droits nouv. Les bons livres font les bons clercs, Gerson, dans Hist. littér. de la Fr. t. XXIV, p. 283. Clercs et femmes sont tout ung, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 121. Car chevaliers ont honte d'estre clers, Deschamps, Poésies mss. f° 137, dans LACURNE. Maint sont clers où n'a que folie ; Car sans savoir sont hors du sens ; Si se puet l'en bien chevir sans Tels clers où science n'est mie, ib. f° 282. Il avoit plusieurs clercs [commis] et facteurs sous luy, qui se mesloient des dites marchandises, Mathieu de Coucy, Hist. de Charles VII, p. 691, dans LACURNE. Mais dit le sage que tous ceulx ne sont pas clercs qui en portent le semblant, ne chevaliers qui portent esperons, Perceforest, t. IV, f° 42. Et combien qu'elle ne l'eust jamais vu exercer l'office de clergie, toutefois elle jugea tantost qu'il est très grand clerc, Louis XI, Nouv. C.

XVIe s. Divisons l'Eglise en deux estats : assavoir qu'elle contienne le clergé et le peuple. J'use de ce mot de clercs, pource qu'il est commun, combien qu'il soit impropre : par lequel j'enten ceux qui ont office et ministere en l'Eglise, Calvin, Instit. 965. … Mais trop plus est à craindre une femme clergesse, Sçavante en l'art d'amour, quand elle est tromperesse, Ronsard, 125. Il ne s'y entend comme clerc d'ar mes [il y est habile], H. Estienne, Précell. p. 79. Jadis un antique prophete de la nation judaique mangea un livre, et fut clerc jusqu'aux dents ; presentement vous en boirez un, et serez clerc jusques au foye, Rabelais, Pant. V, 46. Gens de condition ne peuvent faire leurs enfants clercs sans l'exprès consentement de leurs seigneurs, Coustum. génér. t. I, p. 880. Entre les clers, aucuns sont mariez, aucuns non ; les mariez jouissent de leurs privileges si longuement qu'ils portent la tonsure et l'habit clerical et servent à une eglise, hospital ou seminaire, et à faute de ce ils les perdent, ib. t. II, p. 1057. Je ne parle point en clerc d'armes, je l'ay vu, Contes de CHOLIÈRES, f° 220, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. clor, clar ; provenç. clerc, clergue, clerge ; espagn. clerigo ; ital. chierico ; de clericus, de ϰληριϰὸς, de ϰλῆρος, clergé, proprement lot, bon lot, terme appliqué dans les premiers temps aux chrétiens par opposition aux païens, et finalement à ceux qui avaient charge de prêtrise. Régnier s'est encore servi de clergesse dans le sens de femme habile : Clergesse, elle fait jà la leçon aux prêcheurs, Régnier, Sat. XIII. Dans l'ancien français, au singulier, nominatif li clers, et régime le clerc ; au pluriel, nominatif li cler, régime les clers.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CLERC. Ajoutez :
6Clerc d'à bas, dans l'Anjou, nom du contre-maître, dans les travaux de mine. On écrit d'Angers : avant-hier matin, à sept heures et demie, le contre-maître ou clerc d'à bas de la Grande-Maison de Trélazé, après s'être fait descendre dans le puits, vint prévenir M. M… directeur de cette exploitation, que des craquements s'étaient fait entendre dans la voûte, et que des fissures avaient été aperçues, Journ. offic. 13 avr. 1876, p. 2676, 2e col.

REMARQUE

Il est singulier qu'en anglais la locution qui répond à notre pas de clerc soit clerical oversight. Ici le sens est certainement manquement d'homme du clergé ; au lieu que dans le français c'est manquement d'un clerc de notaire ou d'avoué.