« dureté », définition dans le dictionnaire Littré

dureté

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

dureté

(du-re-té) s. f.
  • 1Propriété qu'ont les corps solides de résister à ce qui tend à en entamer la substance. La dureté du fer.

    Défaut de mollesse, de la qualité tendre. La dureté de ce morceau de bœuf. La dureté d'un lit.

  • 2 Terme de pathologie. Tumeur dure. Le palper fit sentir une dureté dans le ventre.

    Dureté de ventre, constipation.

  • 3Défaut de sensibilité de l'oreille. Cet homme a une grande dureté d'oreille.
  • 4Défaut de sensibilité, d'humanité. Grande dureté de cœur. La dureté pour les pauvres. Un peu de dureté sied bien aux grandes âmes, Corneille, Suréna, V, 3. Quoi ! dans la dureté ces cœurs d'acier s'obstinent ! Corneille, Hor. III, 2. Mais si la dureté de votre aversion Nomme encor notre amour une rébellion, Corneille, Rodog. IV, 3. Ils habitaient un bourg plein de gens dont le cœur Joignait aux duretés un sentiment moqueur, La Fontaine, Phil. et Baucis. Tant il a de dureté pour les pauvres, Pascal, Prov. 12. Quelle dureté est semblable à la nôtre, si un accident si étrange [la mort de la duchesse], qui devrait nous pénétrer jusqu'au fond de l'âme, ne fait que nous étourdir pour quelques moments ! Bossuet, Duch. d'Orl. C'est là que lui est non-seulement permise, mais en quelque façon ordonnée, une pieuse dureté pour voir sans se troubler le trouble d'un père, Bourdaloue, Pensées, t. II, p. 372. Rien ne vous a pu vaincre, et votre dureté Aurait dû dans son cours arrêter ma bonté, Racine, Brit. IV, 2. Trouve en lui d'un rival toute la dureté, Racine, Mithr. IV, 1.

    Dans le même sens, en parlant des paroles, des dehors, des manières. La dureté de cette réponse l'atterra. La dureté du regard, des traits. Cet officier lui parla avec la dernière dureté, et lui reprocha sa faute d'une manière propre à le jeter dans le désespoir, Rollin, Traité des Ét. liv. V, 3e part. ch. II, art. 1.

    Au plur. Paroles dures, offensantes. Vendôme s'emportant de plus en plus [contre Roquelaure], lui répliqua des duretés, Saint-Simon, 27, 53. Je tombe des nues quand vous m'écrivez que je vous ai dit des duretés, Voltaire, Roi de Pr. 128. Moi, je vous dois ici dire vos vérités, Et vais d'un bon avis payer vos duretés, Boissy, Deh. tromp. II, 6.

  • 5Excessive sévérité. La dureté d'un gouvernement. La dureté d'un régime politique. Je sais de votre loi la dureté barbare, Voltaire, Tancr. II, 6.
  • 6La dureté du travail, l'opiniâtreté au travail. On est plus flatté de certaines théories brillantes où la finesse de l'esprit semble avoir plus de part que la dureté du travail, Fontenelle, Rolle.
  • 7Qualité qui est pour l'oreille ce que la dureté est pour le toucher. Dureté de prononciation. Dureté de style. La dureté de ces vers.

    Qualité qui pour la vue est ce que la dureté est pour le toucher. La dureté des contours. Dureté de crayon, de pinceau. La dureté des tons. Cela donne à l'effet du tableau quelque dureté.

  • 8La dureté d'un climat, d'un hiver, la rigueur de la température qui s'y fait sentir. Pour adoucir en moi cette âpre dureté Des climats où mon sort en naissant m'a jeté, Voltaire, Orphel. IV, 4.

    La dureté du temps, la rigueur de la température ; et fig. la misère, la souffrance qui pèse sur une ville, sur un pays en certaines circonstances mauvaises.

HISTORIQUE

XIIIe s. Se la durté d'eür [la rigueur de l'heur, de la fortune] me nel envoie, Poésies mss. du Vatican, dans LACURNE. Les durtez que la royne Blanche fist à la royne Marguerite furent tiex [telles] que la royne Blanche ne vouloit soufrir à son pooir que son fils feust en la compaingnie sa femme, Joinville, 281.

XIVe s. Laquelle dureté avironne la fistule par dedens, H. de Mondeville, f° 80 bis.

XVe s. Print les lettres, et puis les leut par grand loisir, et trouva comment piteusement le roy dom Pietre luy rescrivoit et luy signifioit ses durtés [embarras] et pouretés, Froissart, liv. I, p. 297, dans LACURNE. Obeirent, mais ce fut à trop grant durté [avec beaucoup de peine], Froissart, ib. p. 253. Or pren garde à la durté De ton aage [jeunesse] et l'orfenté, Deschamps, Poésies mss. f° 95, dans LACURNE.

XVIe s. Mais quelle durté est soubs vos peaux tant doucettes ? Marot, III, 16. Ilz ont vescu : ce qui est une façon de parler, dont usent quelquefois les Romains, quand ilz veulent eviter la dureté de ceste rude parole de dire : il est mort, Amyot, Cicéron, 25. La dureté du temps avoit rendu fevrier de peu d'effet aux sorties qui se firent, D'Aubigné, Hist. II, 95. Au milieu du cor se trouve une petite dureté noire, Paré, V, 21.

ÉTYMOLOGIE

Lat. duritatem, de durus, dur. L'ancien français avait aussi duresse, du latin duritia. plus anciennement encore duretie : Xe s. Per Judaeos porquant il en cele duretie e en cele encredulitet permessient [demeurassent]…, Fragm. de Valenc. p. 469. Mais duretie n'est qu'une forme orthographique, et se prononçait sans doute duresse, comme l'indique l'accent de duritia.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

DURETÉ.
1Ajoutez :

En minéralogie, la résistance d'un corps à l'action qui tend à le rayer avec une pointe.