« hauteur », définition dans le dictionnaire Littré

hauteur

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

hauteur

(hô-teur) s. f.
  • 1Dimension d'un corps considéré du bas à son sommet. Cet animal a trois pieds et demi de hauteur. La hauteur de la marée. Les eaux atteignirent une hauteur considérable. En Grèce, M. Bernoulli a déterminé la hauteur de l'Olympe à 1017 toises, Buffon, Add. théor. terr. Œuv. t. XII, p. 437.

    Tomber de sa hauteur, tomber tout de son long.

    Fig. Penser tomber de sa hauteur, être saisi de surprise. Et le pauvre voleur, ne trouvant plus son gage, Pensa tomber de sa hauteur, La Fontaine, Fabl. X, 5.

    Hauteur d'appui, hauteur suffisante pour qu'on puisse s'appuyer et qui est évaluée à un mètre environ.

    Fig. Vous les remettriez bientôt à hauteur d'appui [à leur place], Sévigné, 111.

    Hauteur de marche d'escalier, 27 centimètres.

    Terme de construction. Bâtiment arrivé à sa hauteur, bâtiment dont les assises sont assez élevées pour recevoir la charpente. Le roi alla faire le tour de son nouveau parc, et trouva les murailles à hauteur presque partout, Dangeau, I, 45, 22 août 1684.

    Hauteur du baromètre, la longueur de la colonne de mercure, qui varie suivant les lieux et les temps.

    Terme de géographie. Hauteur absolue, hauteur d'une montagne, d'un lieu au-dessus du niveau de la mer. Hauteur relative, hauteur d'une montagne au-dessus du sol sur lequel elle s'appuie.

    Terme de géographie botanique. Hauteur de la végétation, hauteur à laquelle les végétaux cessent de croître.

  • 2Il se dit de ce qui va en montant. Un chemin que sa hauteur et son âpreté rendent toujours assez difficile, Bossuet, Reine d'Anglet.
  • 3L'élévation d'un corps au-dessus de la terre ou d'une surface. Les aigles volent à une très grande hauteur. La hauteur des nuages.

    Terme de géométrie. Distance la plus courte d'un point à une ligne ou à un plan. La hauteur d'un triangle ou d'une pyramide est la longueur de la perpendiculaire abaissée du sommet sur la base.

    Terme de marine. La hauteur entre les ponts, intervalle qui sépare deux ponts.

  • 4 Terme d'astronomie. Quantité, mesurée par un arc de grand cercle, dont un astre est élevé au-dessus de l'horizon. La hauteur d'un astre. La hauteur du pôle.

    Hauteur méridienne, la distance d'un astre à l'horizon, au moment où cet astre passe par le méridien.

    Hauteur du soleil, le point où cet astre est à midi. Prendre la hauteur du soleil, ou, simplement, prendre hauteur, observer avec un instrument la hauteur angulaire du soleil sur l'horizon. Les Arabes n'ont pas un pilote qui sache prendre hauteur, Voltaire, Mœurs, 161. Parler de faire le point ou de prendre hauteur eût été de l'hébreu pour nos marins, Chateaubriand, Itin. partie 3e.

    Terme de marine. Être à la hauteur d'une île, d'une ville, être dans le même parallèle, dans le même degré de latitude ; locution qui vient de ce que, quand on est dans le même parallèle que l'île, on n'est ni au-dessus ni au-dessous de cette île, par rapport au pôle, par exemple.

  • 5Colline, éminence. J'approche d'une petite ville, et je suis déjà sur une hauteur d'où je la découvre ; elle est située à mi-côte, une rivière baigne ses murs, La Bruyère, V. Chargé de m'emparer d'une hauteur voisine Qui voit le camp romain, le serre et le domine, Saurin, Spart. IV, 1. Enfin une dernière hauteur reste à dépasser ; elle touche à Moscou, qu'elle domine ; c'est le Mont du Salut ; il s'appelle ainsi parce que, de son sommet, à l'aspect de leur ville sainte, les habitants se signent et se prosternent, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 4.

    Fig. Obstacle moral comparé à une hauteur. Vous qui amollissiez devant lui les duretés des cœurs obstinés, et qui aplanissiez les hauteurs des esprits superbes, Fléchier, Panég. II, p. 280. Triomphez, par les prodiges secrets de votre grâce, de la même incrédulité dont vous triomphâtes autrefois par les opérations éclatantes de votre puissance, et détruisez, par ces lumières vives qui éclairent les cœurs, toute hauteur qui s'élève encore contre la science de vos mystères, Massillon, Carême, Vérité de la religion.

  • 6La hauteur d'un bataillon, d'un escadron, la quantité de rangs qui le composent. Il donna beaucoup de hauteur à la bataille, Perrot D'Ablancourt, Arrien, dans RICHELET. S'il passe en revue ses différents corps d'armée, comme leurs bataillons réduits ne lui offrent plus qu'un front court qu'en un instant il a parcouru, cet affaiblissement l'importune ; et, soit qu'il veuille le dissimuler à ses ennemis ou même aux siens, il déclare que jusqu'alors c'est par erreur qu'on les a rangés sur trois hommes de hauteur, que deux suffisent ; il ne forme donc plus son infanterie que sur deux rangs, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 11.
  • 7Profondeur. Ils jetèrent la sonde pour prendre la hauteur. Savez-vous bien que je suis entouré de quatre pieds de neige ? j'entends quatre pieds de hauteur ; car j'en ai quarante lieues en longueur, Voltaire, Lett. d'Argental, 5 mars 1764.

    Fig. La hauteur de l'abîme où je suis descendue, Voltaire, Scythes, V, 4.

  • 8 Fig. Ce qui est supérieur, d'un ordre élevé. Ni la hauteur des entreprises ne surpassait son courage, ni…, Bossuet, le Tellier. Il [Moïse] rapporte ce que Dieu dit, et le fait parler avec tant de hauteur et tant de bonté qu'on ne sait ce qu'il inspire le plus, ou la crainte et la confusion, ou l'amour et la confiance, Bossuet, Hist. II, 3. Les absurdités où ils tombent en niant la religion deviennent plus insoutenables que les vérités dont la hauteur les étonne, Bossuet, Anne de Gonz. Ceux qui désirent que ce mystère [l'eucharistie] passe en sa hauteur toute la mesure du sens humain, veulent néanmoins nous assujettir à résoudre les difficultés que le sens humain nous propose, Bossuet, Euchar. I, 4. C'est en vain qu'au Parnasse un téméraire auteur Pense de l'art des vers atteindre la hauteur, Boileau, Art p. I. Sophocle… Lui donna [à la tragédie] chez les Grecs cette hauteur divine Où jamais n'atteignit la faiblesse latine, Boileau, Art p. III.

    Être à la hauteur de…, être en état de comprendre, d'apprécier. Peu d'esprits sont à la hauteur de ce grand génie.

    Être à la hauteur de, signifie aussi occuper convenablement un poste. Il n'est pas à la hauteur de son emploi.

    Être à la hauteur de la situation, avoir les qualités nécessaires pour suffire aux exigences de la situation.

    Être à la hauteur du siècle, de son siècle, n'être pas étranger aux connaissances, aux idées de son temps.

    On dit de même : être à la hauteur des connaissances, des idées actuelles.

    Cela se dit aussi des ouvrages d'esprit. Ce livre n'est pas à la hauteur des connaissances actuelles.

  • 9 Fig. Caractère d'une âme haute, fière ; magnanimité. Je ne le cèle point, cette hauteur m'étonne, Corneille, Œdipe, II, 1. Il emporta l'affaire d'une hauteur extraordinaire, et, en quelque état qu'il ait été, il a toujours soutenu un air de grandeur qui faisait assez comprendre qu'il n'était pas né pour les affaires ordinaires, Mlle de Montpensier, Mém. ann. 1660. Il avait eu quelque démêlé avec notre ambassadeur d'Angleterre, et le roi avait pris l'affaire d'une grande hauteur, ID. ib. ann. 1669. Que dirai-je de sa libéralité ? elle donnait non-seulement avec joie, mais avec une hauteur d'âme qui marquait tout ensemble et le mépris du don et l'estime de la personne, Bossuet, Duch. d'Orl. Il [Hercule] avait une hauteur et une majesté qui n'avaient jamais paru si grandes en lui quand il domptait les monstres, Fénelon, Tel. X. Voilà ce qui vous donne une âme assez hardie… Pour affecter ici cette illustre hauteur, Voltaire, M. de César, I, 3. On s'est plaint de ne plus voir à la cour autant de hauteur dans les esprits qu'autrefois ; il n'y a plus en effet de petits tyrans, comme du temps de la Fronde, sous Louis XIII, et dans les siècles précédents, Voltaire, Louis XIV, 29. Et le dieu qu'il annonce avec tant de hauteur, Séide, est le vrai dieu, puisqu'il le rend vainqueur, Voltaire, Fanat. IV, 3. Alberoni mettait dans ses démarches une hauteur qui n'était pas d'une âme commune, et qui persuadait à chacune des puissances que ce ministre pouvait s'être assuré des autres, Duclos, Mém. Rég. Œuv. t. V, p. 335. Il [Chrysippe] avait de la hauteur dans le caractère : il méprisa les honneurs, Diderot, Opin. des anc. philos. (stoïcisme).

    Hauteur d'estime, haute estime qu'on a pour soi-même. Cette hauteur d'estime où vous êtes de vous, Molière, Mis. III, 5.

    En un sens analogue. Hauteur de maître, hauteur qui conviendrait à un maître en quelque science ou art. Il n'y a point d'ancienne fable, de vieille absurdité que quelque imbécile ne renouvelle, et même avec une hauteur de maître, pour peu que ces rêveries antiques aient été autorisées par quelque auteur ou classique ou théologique, Voltaire, Dict. phil. Fonte.

  • 10Sorte d'orgueil ou même d'arrogance qui se manifeste par le ton, les manières, etc. À ses airs de hauteur il peut s'accoutumer, Hauteroche, Bourgeois de qualité, I, 2. Vous m'avez vu en France chercher du secours pour ma nation, sans me mettre en peine de votre hauteur, qui avait nui aux intérêts de votre maître, Fénelon, Dial. des morts mod. Richelieu, Oxenstiern. Les instructions de Lauriston portaient qu'il ne devait s'adresser qu'à Kutusof ; il rejeta donc avec hauteur toute communication intermédiaire, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 10.

    Au plur. Sentiments, actions, paroles de hauteur. On vit en sa personne également paraître Les grâces d'un amant et les hauteurs d'un maître, Corneille, Othon, III, 3. Il convient qu'il y a de la lâcheté dans le procédé de son ami ; mais il soutient que vos hauteurs diminuent sa faute, Maintenon, Lett. à Mme Palaiseau, 1654. Et nos humeurs, et nos bizarreries, et nos hauteurs, dont tous ceux qui nous environnent souffrent, nous les ignorons, Massillon, Panégyriques, St Jean-Bapt. Les emportements, les hauteurs, les duretés que l'on honore du nom de zèle, elle [la charité] les désavoue, Massillon, Conférences, Zèle contre les vices. Et sa présomption Mérite qu'avec lui prenant le ton de père, Je fasse à ses hauteurs une leçon sévère, Destouches, Glor. IV, 9. Je règne et je suis las, puisqu'il faut vous le dire, Des hauteurs d'un sénat qui croit me protéger, Voltaire, Sophon. II, 4. On ne le vit jamais acheter par des bassesses le droit de faire éprouver des hauteurs, Condorcet, Linné.

  • 11De hauteur, d'une manière grande et digne. Ce que des députés la fameuse assemblée, D'intérêts opposés trop souvent accablée, Ce que n'espérait plus aucun médiateur, Tu le fais par toi-même, et le fais de hauteur, Corneille, Au roi, sur la paix de 1678.

    De hauteur, signifie aussi haut la main, d'une manière haute, de haute lutte. Me condamnerez-vous à voir que Bérénice M'enlève de hauteur le rang d'impératrice ? Corneille, Tite et Bérén. IV, 3. La maison de Fondnid ne manque point de lustre ; Et vouloir, de hauteur, la contraindre à céder, C'est à quoi de plus près vous devez regarder, Hauteroche, Nobles de prov. I, 1. Les tribuns tentèrent d'emporter l'affaire de hauteur, Vertot, Rév. rom. IV.

    De hauteur, arrogamment. Et que, pour récompense on s'en vient, de hauteur, Me traiter de faquin, de lâche, d'imposteur, Molière, l'Ét. I, 10.

SYNONYME

HAUTEUR, ALTITUDE. Ce sont des termes de géographie. Ils expriment tous deux l'élévation d'un lieu au-dessus d'un certain niveau. Hauteur est plus général, il se dit aussi bien de l'élévation au-dessus du sol que de l'élévation au-dessus du niveau de la mer. Altitude ne se dit que de l'élévation au-dessus du niveau de la mer. De plus altitude ne s'emploie pas pour une évaluation : on ne dit pas l'altitude de cette montagne est de tant de mètres, mais la hauteur en est de tant de mètres.

HISTORIQUE

XIIe s. De grant haltor vendront [ils viendront] en bas, Adam, Mystère, p. 60. Et malement [il fait] lever sus en auzor, Ronc. p. 39.

XIIIe s. Demain irés droit à la tor Com se fuissiés engigneor ; Quans piés est lée [large] mesurés, à la hautor garde prendés, Fl. et Bl. 2119.

XVe s. Je ne puis apercevoir ni entendre que le comte n'eust toujours plus aimé la paix que la guerre, reservé la hauteur de lui et son honneur, Froissart, II, II, 62.

XVIe s. Les matelots se desroboient de tous les navires, en partie par la vieille querelle que nous avons ditte, en partie pour estre affriandéz à quitter les hauteurs [la haute mer], D'Aubigné, Hist. II, 302. Nostre dit avocat pourra donner conseil à nos officiers subalternes en chose qui concerne nos hauteurs [prérogatives des fiefs], droits et domaines, Nouv. coust. génér. t. II, p. 43. Crime de hauteur [crime pour lequel on devait aller au tribunal du prince souverain], ib. p. 57. Le demandeur est admis à affirmer la hauteur [le montant] de son deu par serment, ou à le verifier par tesmoins ou autrement, ib. t. I, p. 977. Haulteur sont les degrez dont le soleil, le polle ou l'equinoctial sont eslevez sur l'horison, ou les degrez dont quelque ville, citté, port ou isle est loing de l'equinoctial, Devaulx, (1583), dans JAL.

ÉTYMOLOGIE

Dérivé de haut ; prov. alzor.