« universel », définition dans le dictionnaire Littré

universel

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

universel, elle

(u-ni-vèr-sèl, sè-l') adj.
  • 1Qui s'étend à tout, qui s'étend partout. Tout se trouvait en eux, hormis ce que les hommes Font marcher avant tout dans le siècle où nous sommes : Ce sont les biens, c'est l'or, mérite universel, La Fontaine, Filles de Minée. Les seules règles universelles sont les lois du pays aux choses ordinaires, et la pluralité aux autres ; d'où vient cela ? de la force qui y est, Pascal, Pens. VI, 7, édit. HAVET. Il faut qu'on ne puisse dire, ni il est mathématicien, ni prédicateur, ni éloquent ; mais, il est honnête homme ; cette qualité universelle me plaît seule, Pascal, ib. VI, 15 ter. Si ses sujets, si ses alliés, si l'Église universelle a profité de ses grandeurs, elle-même a su profiter de ses malheurs, Bossuet, Reine d'Anglet. Peut-être que moi qui existe n'existe ainsi que par la force d'une nature universelle qui a toujours été telle que nous la voyons, en remontant jusqu'à l'infinité des temps ; mais cette nature, ou elle est seulement esprit, et c'est Dieu ; ou elle est matière, et ne peut par conséquent avoir créé mon esprit, La Bruyère, XVI. [Louis XIV, mille fois accusé par ses ennemis] d'avoir formé et conduit le projet de la monarchie universelle ; s'il y avait réussi, rien n'aurait été plus fatal à l'Europe, à ses anciens sujets, à lui, à sa famille, Montesquieu, Esp. IX, 7. Un préjugé universel permet rarement l'examen, Voltaire, Dict. phil. Figure. Mais le mal moral, les crimes, Néron, Alexandre VI !… cela empêche-t-il qu'il y ait une cause universelle ? Voltaire, Philos. Comm. Malebranche, Résultat. La foule innombrable des animaux jouit de ses sens par des lois universelles ; ces lois sont communes à eux et à nous, Voltaire, ib. Mécan. des sens. Cette date où la mer était universelle et couvrait toute la surface du globe, à l'exception des lieux élevés, Buffon, 4e ép. nat. Œuv. t. XII, p. 205. On ne saurait imaginer quel respect, quel amour les Chinois ont pour leur empereur, ou, comme ils le disent, pour le père commun, pour le père universel, Raynal, Hist. phil. I, 20. Me voilà seul, portant la haine universelle ! Legouvé, Épichar. et Nér. v, 4. Un fluide universel extrêmement subtil, agité par les mouvements rapides des particules des corps lumineux, Fresnel, Inst. Mém. scienc. 1821 et 1822, t. v, p. 340. Jusqu'à ce qu'étendue enfin sur la terre et les mers, L'universelle nuit pèse sur l'univers, Lamartine, Harm. II, 12. Les dispositions testamentaires sont ou universelles, ou à titre universel, ou à titre particulier, Code civ. art. 1002. Le legs universel est la disposition testamentaire par laquelle le testateur donne à une ou plusieurs personnes l'universalité des biens qu'il laissera à son décès, ib. art. 1003.

    Suffrage universel, droit de voter dans les élections accordé à tout citoyen d'un certain âge.

    Concile universel, se dit quelquefois pour concile oecuménique.

    Évêque universel, nom qui a été donné quelquefois au pape.

    Jubilé universel, celui qui est accordé à toute l'Église.

    Terme de théologie. Grâce universelle, se dit, parmi les réformés, de la grâce répandue sur tous les hommes par le sacrifice de Jésus-Christ.

  • 2Qui a de la capacité pour toute chose. Les gens universels ne sont appelés ni poëtes, ni géomètres, mais ils sont tout cela, et jugent de tous ceux-là, Pascal, Pens. VI, 15. Arias a tout vu, a tout lu, il veut le persuader ainsi : c'est un homme universel, et il se donne pour tel, La Bruyère, V. Le fameux Leibnitz naquit à Leipzick ; il mourut en sage à Hanovre, adorant un Dieu, comme Newton, sans consulter les hommes ; c'était peut-être le savant le plus universel de l'Europe, Voltaire, Louis XIV, 34. Il n'arrive jamais que le même homme puisse exercer également sa mémoire, son imagination et sa réflexion sur toutes sortes de matières… cela nous apprend pourquoi ceux qui aspirent à être universels, courent risque d'échouer dans bien des genres, Condillac, Connais. hum. I, II, 5. Il a un esprit universel, non par les lumières, mais par la faculté d'en acquérir, Rousseau, Ém. III.

    Cet homme est universel, il a une grande étendue de connaissances. Vous êtes universel, monsieur, vous vous connaissez à tout, Lesage, Turcar. III, 4.

    On dit de même : science universelle.

    Fig. et par plaisanterie. Je sers un jeune homme nommé Damis ; c'est un aimable garçon : il aime le jeu, le vin, les femmes ; c'est un homme universel, Lesage, Crispin rival, 3.

  • 3 Terme de logique. Qui comprend toute chose, qui a le caractère de généralité abstraite. Notre âme étant de telle nature, que ses idées intellectuelles sont universelles, abstraites, séparées de toute matière particulière, Bossuet, Conn. IV, 1. Toute vérité certaine en matière universelle est éternelle, Bossuet, ib. I, 13. Toute proposition universelle est une voie abrégée de l'esprit, qui ne peut ni voir ni embrasser ensemble tous les particuliers, et les envelopper tous ensemble dans une seule idée, Fontenelle, Frag. Rais. hum.
  • 4 S. m. L'universel, ce qu'il y a de commun dans les individus d'un même genre, d'une même espèce. L'universel a parte rei, l'universel a parte mentis.

    Voy. UNIVERSAUX.

REMARQUE

Il ne faut pas en général donner de comparaison à universel ; cependant de bons écrivains l'ont fait. Une erreur si stupide et si brutale n'était pas seulement la plus universelle, mais…, Bossuet, Hist. II, 3. Rédemption la plus universelle dans son étendue : tous les hommes y sont compris ; tous en général, chacun en particulier, Bourdaloue, Pensées, t. III, p. 193. L'aveuglement est, de toutes les peines du péché, la plus universelle, Massillon, Carême, Confession.

HISTORIQUE

XIIIe s. Savoir les universels choses n'est pas seure chose sanz l'esperience, Latini, Trésor, p. 333.

XIVe s. Environ aucunes choses universeilz, et environ aucunes choses particulieres, H. de Mondeville, f° 36, verso. Afin que… tentée la fortune de ceulz petiz debaz, il peust comander aus siens concevoir esperance de la victoire universal, Bercheure, f° 84, verso.

XVe s. C'est luy [Dieu] par qui l'universel est fait, les Triomphes de la noble dame, f° 123, dans LACURNE.

XVIe s. L'edit de pacification fait devant Orleans avoit donné quasi à l'universel de la France beaucoup de contentement, Lanoue, 605. Leur premier et principal acte fut l'universelle prise des armes par toute la France en un mesme jour, Lanoue, 613. Ce qui est particulier est plus sanable que ce qui est universel, Paré, t. III, p. 688. Les plus beaux et plus grands esprits sont les plus universels, Charron, Sagesse, II, 2. Demeurer universel et ouvert à tout, Charron, ib. Se nommer evesque universel, ou evesque de l'Eglise catholique, comme font maintenant les papes, le Bureau du concile de Trente, p. 3.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. et espagn. universal ; ital. universale ; du lat. universalis, dérivé de universus (voy. UNIVERS).