« habitude », définition dans le dictionnaire Littré

habitude

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

habitude

(a-bi-tu-d') s. f.
  • 1 Terme d'histoire naturelle. Conformation, configuration d'un végétal ou d'un animal. Nous ignorons quelle sorte de respiration s'opère dans la chenille ; nous savons seulement qu'elle ne saurait respirer à la manière des grands animaux, puisque les parties qui font chez elle l'office de poumons, sont répandues dans toute l'habitude du corps et jusque dans le cerveau, Bonnet, Contempl. nat. III, 20, note 1.

    Terme de médecine. Habitude extérieure, habitude du corps, la constitution, l'aspect général du corps. Cette habitude du corps menue, grêle, noire et velue, Molière, Pourc. I, 11.

    Dans le langage général, habitude du corps, l'air qui résulte généralement du maintien, de la démarche, des attitudes. Reconnaître quelqu'un à l'habitude du corps.

  • 2 Par extension, disposition acquise par la répétition des mêmes actes. Prendre une habitude. Si le péché dont on s'accuse est un péché d'habitude, Pascal, Prov. 10. Ceux qui sont dans les habitudes de crime contre la loi de Dieu, Pascal, Prov. 15. Encore qu'elle [l'âme du pécheur] ne sente pas ces charmes dont Dieu récompense l'habitude dans la piété, Pascal, Convers. du pécheur, édit. FAUGÈRE. L'Espagne sur ce sujet [certaines observances] a des coutumes que la France ne suit pas ; mais la reine se rangea bientôt à l'obéissance ; l'habitude ne put rien contre la règle, Bossuet, Mar.-Thér. Ce qui forme les habitudes, ce sont les actes fréquents et réitérés, Bourdaloue, Pensées, t. III, p. 73. Quand il luirait quelque rayon de connaissance [sur le lit de mort], les puissances de l'âme se trouvent ou liées par la douleur ou usées par l'habitude, Fléchier, Mar.-Thér. Il met du rouge, mais rarement, il n'en fait pas habitude, La Bruyère, XIII. Je crois qu'alors [dans le cas de chefs-d'œuvre] l'ancienne école a raison, elle qui l'a si rarement : habitude ne fait point passion, Voltaire, Dict. phil. Rare. Lisez Tacite sur les mœurs des Germains, c'est le tableau de celles des Hurons, ou plutôt les habitudes de l'espèce humaine entière sortant de l'état de nature, Buffon, 7e ép. nat. Œuv. t. XII, p. 327. La force de l'habitude, qui étouffe si souvent le cri de la raison, et qui gouverne encore plus absolument les États que les individus, Raynal, Hist. phil. VIII, 13. Je m'avoue, non sans amertume et sans regret, qu'on a des liaisons d'habitude dans l'âge avancé ; mais qu'il ne reste en nous, à côté de nous, que le vain simulacre de l'amitié, Diderot, Claude et Nér. II, 51. Les besoins répétés amènent l'habitude, Delille, Trois règnes, VII.

    Habitude se dit des animaux. Nous n'avons rien appris des habitudes naturelles de ces oiseaux ; cependant cette connaissance seule anime le tableau des êtres vivants, et les présente dans la véritable place qu'ils occupent dans la nature, Buffon, Ois. t. IX, p. 336.

    Familièrement. C'est un homme d'habitude, le moindre changement dans sa manière de vivre le dérange.

    Fig. et familièrement, et dans le même même sens : C'est un animal, une bête d'habitude. Je suis bête d'habitude.

    Habitude avec la préposition de suivie d'un substantif ou d'un verbe. Ces grands cœurs… Font du commandement une douce habitude, Corneille, Nicom. II, 1. Je n'ai reçu qu'une lettre de vous, ma chère fille, et j'en suis fâchée, j'étais dans l'habitude d'en avoir deux, Sévigné, 67. Je me suis fait une habitude nécessaire de vous voir, Sévigné, 160. La dernière heure [de la vie] n'en sera pas moins insupportable, et l'habitude de vivre ne fera qu'en accroître le désir, Bossuet, le Tellier. L'un [Louis XIV] nourri dans ses camps et dans ses armées commençait à prendre cette glorieuse habitude qu'il a de vaincre, Fléchier, Mar.-Thér. Vous vous êtes fait une habitude de votre présomption, Bourdaloue, Sur la fausse conf. 1er avent, p. 180. J'ai déjà vieilli dans l'habitude de ne dire jamais mon secret, et encore plus de ne trahir jamais, sous aucun prétexte, le secret d'autrui, Fénelon, Tél. III.

    Habitude avec la préposition à suivie d'un substantif ou d'un verbe. L'habitude à régner et l'horreur d'en déchoir, Corneille, Pulch. I, 1. Instruit par tes maximes, Il s'est fait de ton ordre une habitude aux crimes, Corneille, Attila, IV, 3. L'habitude qu'elle a aux péchés où elle a vécu…, Pascal, Conv. du pécheur, édit. FAUGÈRE. J'ai une si grande habitude à être faible, que, malgré vos bonnes leçons, je succombe souvent, Sévigné, 188. L'habitude qu'il a à la flatterie, La Bruyère, V. L'habitude à souffrir pourra fortifier Mon courage éperdu qui craignait de plier, Voltaire, Scythes, III, 4.

    Par habitude, pour obéir à ses propres habitudes. M. de Luxembourg ne sait pas fuir : il gagne des batailles par habitude, Maintenon, Lett. à Mme de St-Géran, 14 avr. 1694.

    D'habitude, selon l'habitude qu'on a.

  • 3Bonne, mauvaise habitude, se dit particulièrement de certaines dispositions de corps ou d'esprit auxquelles on s'habitue. Prendre de bonnes, de mauvaises habitudes. Vous avez une mauvaise habitude, c'est de toujours disputer.

    Absolument. Avoir de mauvaises habitudes, se dit, par euphémisme, de l'onanisme.

  • 4Accès auprès de quelqu'un, fréquentation ordinaire. Vous avez habitude avec ce cavalier, Corneille, Suite du Ment. IV, 6. L'amant et lui, comme étant gens d'étude, Avaient entre eux lié quelque habitude, La Fontaine, Mandr. Mon père était homme savant dans les mathématiques et avait habitude par là avec tous les habiles gens en cette science, Mme Périer, Vie de Pascal. Je vous avoue que je n'ai aucune habitude avec ces messieurs-là, et que je ne suis point les règles de l'art, Molière, Crit. sc. 7. Les habitudes qu'il avait eues avec les plus renommés politiques, Fléchier, le Tellier. Suivant de Démocrite en cette solitude, Ce n'est qu'avec les ours que j'ai quelque habitude, Regnard, Démocrite, I, 1.

    On dit, et surtout on disait, dans le même sens, faire des habitudes. Cultiver, entretenir ses habitudes. Acquérir des habitudes.

    Avoir une habitude, se dit quelquefois d'un commerce de galanterie. Ce jeune homme a une habitude qui le dérangera.

  • 5 Terme de liturgie. État d'un prêtre habitué.

    PROVERBE

    L'habitude est une autre nature, une seconde nature, c'est-à-dire elle a beaucoup d'influence sur l'esprit.

HISTORIQUE

XIVe s. Il va hors de bonne habitude ou habilité de corps, Oresme, Thèse de MEUNIER.

XVe s. Habitude est une seconde nature, Barlete, Sermons, 1re part. f° 21, dans LACURNE.

XVIe s. Si c'estoit une habitude de vertu, et non une saillie, Montaigne, II, 7. T. Quintius luy dit un jour, semblant se mocquer de l'habitude de son corps : Ô Philopoemen, tu as bien belles mains et belles jambes, mais tu n'as point de ventre, Amyot, Philop. 3.

ÉTYMOLOGIE

Lat. habitudinem, état extérieur, manière d'être, de habitum, supin de habere, avoir, être en un certain état.