« mignon », définition dans le dictionnaire Littré

mignon

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

mignon, onne

(mi-gnon, gno-n') adj.
  • 1Qui plaît par la délicatesse et la gentillesse. Visage mignon. Bouche mignonne. Une beauté mignonne. Des souliers mignons. Si mignonne et si belle… Que la beauté plus grande est laide auprès de vous, Régnier, Sat. XII. Est-il un homme qui, à la vue de cette mignonne créature [l'oiseau-mouche], balancée sur ses petites ailes bourdonnantes…, Cap, Audubon, p. 18.

    Se dit des ouvrages d'esprit où il y a de la finesse. Sonnet mignon.

    Ironiquement. Certes pour un amant la fleurette est mignonne, Molière, Misanthr. II, 1.

    Bleu mignon, sorte de bleu. …Doivent être guédées comme un bleu mignon, qui est la moitié de nuance d'un bleu céleste, Instruction générale pour la teinture, 18 mars 1671, art. 185.

    Familièrement. Argent mignon, somme d'argent comptant dont on peut disposer à son gré, pour ses fantaisies. Il n'eût pas convenu, pendant qu'elle était aux expédients, qu'elle eût su que j'avais de l'argent mignon, Rousseau, Conf. V.

    Péché mignon, péché qu'on se plaît à commettre, et dont on ne veut pas se corriger.

  • 2 S. m. et f. Mignon, mignonne, le bien-aimé, la bien-aimée. Anselme, mon mignon, crie-t-elle à toute heure, Quand est-ce que l'hymen unira nos deux cœurs ? Molière, l'Ét. I, 6.

    Mignon, mignonne, se dit en adressant la parole à des enfants, à de jeunes femmes. La fortune passa, l'éveilla doucement, Lui disant : mon mignon, je vous sauve la vie, La Fontaine, Fabl. V, II. Au contraire, mignonne, C'est me faire mieux voir ton amour et ta foi, Molière, Éc. des m. II, 5. Qui, mignonne, je songe à remplir ton attente, Molière, ib. II, 14. Voilà, ma belle mignonne, ma fille qui vient vous saluer, Molière, l'Avare, III, 9. Jamais elle [Mme de Maintenon] n'appela la duchesse de Bourgogne que mignonne, et celle-ci ne la nommait que ma tante, Duclos, Règne de Louis XIV, Œuv. t. V, p. 184.

    Avec une nuance de dédain. Mais, ma mignonne, dites-moi, Vous campez-vous jamais sur la tête d'un roi [la mouche à la fourmi] ? La Fontaine, Fabl. IV, 3.

    Vous êtes un joli mignon, un plaisant mignon, se dit ironiquement à quelqu'un qui a dit ou fait une sottise. Je vous trouve un plaisant mignon de ne m'avoir pas écrit depuis deux mois, Sévigné, à Bussy, 15 mars 1648. Vous êtes une gentille mignonne, de vouloir que je me gouverne par l'autorité de votre père, Destouches, Fausse Agn. I, 3.

  • 3 S. f. Mignonne, maîtresse. Tout vous rit ; votre femme est souple comme un gant ; Et vous pourriez avoir vingt mignonnes en ville, Qu'on n'en sonnerait pas deux mots en tout un an, La Fontaine, Coupe. Quelques heures après, le commandeur et sa mignonne se mirent en chemin avec la duègne, Lesage, Guzm. d'Alfar. I, 3. Un essaim de grivois Buvant à leurs mignonnes, Béranger, Grande orgie.

    Mignonne se dit aussi quelquefois pour jeune fille simplement. Figurez-vous la plus jolie petite mignonne, douce, tendre, accorte et fraîche, agaçant l'appétit, pied furtif, taille adroite, élancée, Beaumarchais, Barb. de Sév. II, 2.

  • 4Mignon de couchette, amant favorisé. Il s'en est donc allé, le mignon de couchette ? Scarron, Jodelet ou le maître val. III, 8. Le voilà, le beau fils, le mignon de couchette, Molière, Sgan. 6.
  • 5Favori. Cet enfant est le mignon de sa mère. Du siècle les mignons, fils de la poule blanche, Régnier, Sat. III. Je ne me dois regarder que comme un de ces indignes mignons de la fortune, que son caprice n'élève au plus haut de sa roue sans aucun mérite, que pour mettre plus en vue les taches de la fange dont elle les a tirés, Corneille, Disc. de récept. à l'Acad. Buckingham, mignon de Jacques, et qui troubla les premières années du règne de Charles 1er, a fait plus de bruit dans l'histoire passée qu'il n'en fera dans l'histoire à venir, Chateaubriand, Stuarts, Charles 1er.

    Fig. La précoce hyacinthe est le tendre mignon Que sur ces prés fleuris caressait Apollon, Voltaire, Poëmes, Apol. de la fable.

  • 6Dans un mauvais sens. Un mignon, un Ganymède, un Giton. Passer sa vie avec ses infâmes mignons, découper, coller des images, et se jeter en même temps dans les curiosités de la magie, Fénelon, Dial. des morts mod. dial. 13 (Henri III, la Duch. de Montpensier). C'étaient eux qu'on appelait les mignons de Henri III ; Livarot, Villequier, Duguast et Maugiron eurent part aussi et à sa faveur et à ses débauches, Voltaire, Henr. II, notes. Antinoüs, le mignon d'Adrien, à qui cet empereur fit rendre les honneurs divins, Bailly, Astron. moderne, t. I, p. 199.

SYNONYME

MIGNON, MIGNARD. Le mot est le même, la désinence seule est différente. Aussi le mignard n'est-il que le mignon avec le sens légèrement péjoratif qu'a la finale ard ; c'est le mignon, plus un peu d'afféterie ou d'excès.

HISTORIQUE

XIIIe s. Deus damoiselles moult mignotes, la Rose, 764. Fame est plus cointe et plus mignote En sorquanie [souquenille] que en cote, ib. 1225. Et sur un destrier delés lui [elle] Avoit cascune son ami Cointe et mignot et bien seant, Lai du trot.

XVe s. Pariset requit le suppliant qu'il lui voulsist prester deux escus d'or, en lui disant qu'il avoit de l'argent mignon, Du Cange, mignonetus. Aussi y estoit le conte de Lodesme son mignon en grant triumphe, Commines, II, 8.

XVIe s. Ma mignonne, Je vous donne Le bon jour, Marot, II, 114. N'ayez pas peur, dames gentes, mignonnes, Marot, II, 233. Ne plus ne moins que les oiseleurs avec leurs oiseaux mignons [apprivoisés]…, Amyot, Sylla, 58. Ces beaux danseurs icy mignons [les cavaliers pompéiens à Pharsale] n'attendront jamais, de peur que vous ne leur gastiez leurs beaux visages, Amyot, Pomp. 98. Socrates, son premier mignon [de la vraie vertu], Montaigne, I, 177. Pourquoy ne dira un oyson ainsi : toutes les pieces de l'univers me regardent… je suis le mignon de nature ? Montaigne, II, 274. Je ne leur respondray autre chose, sinon qu'encores que nostre nation ne soit la plus mignonne du pape, si est-ce que…, Lanoue, 358. Ces mignons [les favoris d'Henri III] (car c'est le terme du siècle) avoient des familiaritez avec leur maistre, que je ne puis ni ne veux exprimer, D'Aubigné, Hist. II, 375. Ganimede mignon de couchette de ce grand dieu haut tonnant, Dialogues de Tahureau, p. 125, dans LACURNE. Aussi n'a faict Belleau aucune difficulté d'en user, quand, parlant d'un enfançon (car il use de ce diminutif), il dit : Tant que sa levre mignotte à petits soupirs suçotte, H. Estienne, Préc. du lang. franç. éd. FEUGÈRE, p. 102. Donc, si vous m'en croyez, mignonne, Tandis que vostre age fleuronne En sa plus verte nouveauté, Ronsard, à Cassandre.

ÉTYMOLOGIE

Bourg. mignô ; ital. mignone, mignon, mignolo, petit doigt. On a dans le bas-breton miñonez, amie, miñoni, amitié, dans l'irl. mian, mion, amour ; dans l'allemand Minne, amour, ancien haut allem. minni ou minnia. Le celtique et l'allemand paraissent de même racine et avoir produit le français mignot, mignon, mignard, dont le sens primitif semble être gracieux, donnant de l'amour. La dérivation par minimus n'est pas acceptable, vu les formes.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

MIGNON. Ajoutez :
7 Substantivement. Ce qu'il y a de mignon dans une chose. En sens-tu [d'une expression] tout le brillant, toute la délicatesse, tout le mignon ? Lesage, Gil Blas, VIII, 13.