« pomme », définition dans le dictionnaire Littré

pomme

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

pomme

(po-m') s. f.
  • 1Sorte de fruit à pepins, de forme ronde, bon à manger. Il [Escobar] ne dit pas qu'on peut tuer un homme Qui sans raison nous tient en altercas, Pour un fétu ou bien pour une pomme, Mais qu'on le peut pour quatre ou cinq ducats, La Fontaine, Ballade sur Escobar. C'est alors [par les casuistes] que l'on sut qu'on peut pour une pomme, Sans blesser la justice, assassiner un honme, Boileau, Sat. XI. Envoyer des nouvelles à Genève, c'est justement envoyer des pommes en Normandie, Bayle, Lett. p. 553, dans POUGENS.

    Pomme à cidre, pomme qu'on ne mange point et dont on fait du cidre.

    On les apaisera comme un enfant avec une pomme, se dit de ceux dont la colère s'apaise facilement.

    Il s'est donné à plus de diables qu'il n'y a de pommes en Normandie, se dit d'un homme qui a fait de grandes imprécations.

  • 2Les botanistes appellent pomme, un fruit charnu couronné par les lobes du calice, avec lequel l'ovaire était soudé, et renfermant plusieurs loges, formées par des valves membraneuses ou ligneuses
  • 3Sucre de pomme, voy. SUCRE.
  • 4Pomme tapée, pomme séchée au four.
  • 5Pomme cuite, pomme qui a été exposée au feu, et que la cuisson a rendue molle. Une nourriture simple, de pommes cuites, par exemple, vous ne seriez pas présentement tourmenté de la goutte, Lesage, Gil Blas, II, 2.

    Il lui a rendu, à coups de poing, la tête comme une pomme cuite, il lui a fait beaucoup de meurtrissures à la tête.

    Familièrement. Son petit visage de pomme cuite, son air mou, Rousseau, Conf. I.

    On l'abattrait à coups de pommes cuites, se dit d'une place faible, mal fortifiée. D'abord on a cru ici qu'il ne fallait que des pommes cuites pour ce siége, Sévigné, 170. Sur quoi M. Leti réfute fortement ceux qui s'imaginent qu'on peut renverser la France à coups de pommes cuites, et montre aux alliés qu'ils doivent faire de grands préparatifs pour réduire au bon pied cette formidable puissance, Bayle, Lett. 6 juin 1691.

  • 6Nom qu'on donne dans le style familier au fruit de l'arbre qui a causé le péché d'Adam dans le paradis terrestre. Toi… Qui, par l'éclat trompeur d'une funeste pomme Et tes mots ambigus, fis croire au premier homme…, Boileau, Sat. XI. Et vous, jardin de ce premier bonhomme, Jardin fameux par le diable et la pomme, Voltaire, le Mondain.
  • 7Par allusion à la Discorde qui jeta une pomme parmi les déesses en disant : à la plus belle. Pomme de discorde, chose contentieuse que plusieurs personnes veulent avoir. De ce qu'il avait jeté cette pomme de discorde parmi de telles concurrentes, Hamilton, Gramm. 7.

    Par allusion à la fable du berger Pâris qui fut chargé d'adjuger la pomme de la Discorde. Il n'est pas une cité Qui dispute sans folie, à Grenade la jolie La pomme de la beauté, Hugo, Orient. 31.

    Donner la pomme à une femme, juger qu'elle l'emporte en beauté sur les autres femmes de la même assemblée, de la même société.

    On dit dans le même sens : elle mérite la pomme, elle obtiendrait la pomme.

    Il a emporté la pomme, se dit de celui qui a emporté un prix, une chose contestée. Et je ne doute point… qu'à son jugement vous n'emportiez la pomme Des plus grandes beautés de Capoue ou de Rome, Mairet, Sophon. III, 2.

  • 8 Terme de mythologie. Les pommes du jardin des Hespérides, pommes d'or qui étaient gardées par un dragon et qu'Hercule enleva. Vos fruits [des orangers] aux écorces solides Sont un véritable trésor, Et le jardin des Hespérides N'avait point d'autres pommes d'or, La Fontaine, Psyché, I, p. 14. Homère fait un roman qu'il donne pour tel ; car personne ne doutait que Troie et Agamemnon n'avaient non plus été que la pomme d'or, Pascal, Pens. XIV, 6, éd. HAVET.
  • 9Pomme de pin, le fruit que produit le pin, le sapin. Ayant vu des paysannes mettre des pommes de pin dans leurs armoires, pour les garantir des teignes, il [Réaumur] trouva dans cette méthode l'idée excellente d'employer la térébenthine pour faire périr ces insectes, Sennebier, Art d'observ. t. II, p. 340, dans POUGENS.

    Pomme de pin, ornement de sculpture qu'on place dans les angles des plafonds de corniche, ou au sommet des coupoles.

  • 10Pomme d'amour, voyez TOMATE.

    Dans certaines localités, pomme d'amour désigne la baie d'un arbrisseau qu'on y nomme pommier d'amour, et qui est le solanum pseudo-capsicum, dit aussi amome des jardiniers, faux piment, morelle, cerisette, petit cerisier d'hiver, oranger du savetier.

  • 11Pomme épineuse, nom du fruit du datura stramonium, L.

    Pomme épineuse d'Égypte, nom vulgaire du datura fastueux dont le nom spécifique vient de l'ampleur de ses fleurs.

  • 12Pomme-figue, synonyme de sans-fleur.

    Pomme de chien, nom donné au fruit de la belladone mandragore.

  • 13Pomme de raquette, fruit du cactier en raquette.

    Pomme rose, fruit d'une espèce de citronnier.

    Pomme de paradis, banane.

  • 14Pomme de chêne ou noix de galle, voy. GALLE 1.

    Pomme d'églantier, excroissance velue produite sur les branches de l'églantier par la piqûre d'un insecte.

  • 15Pomme de sauge, excroissance qui se trouve sur la sauge pomifère, et qui est le produit de la piqûre d'un insecte, vraisemblablement un cynips.
  • 16Pomme de terre, plante dont les racines sont garnies de tubercules bons à manger, originaire des contrées centrales de l'Amérique, depuis la Caroline jusqu'au Chili, importée et cultivée en Europe depuis le XVIe siècle ; elle trouva peu d'accueil en France ; c'est Parmentier, d'où le nom de parmentière qu'elle a un moment porté, qui en généralisa chez nous la culture. Les pommes de terre seraient un luxe sur nos tables si nos champs n'en produisaient pas, et qu'il fallût les faire venir à grands frais de l'Amérique septentrionale, d'où elles viennent originairement, Condillac, Comment. gouvern. I, 27. Il établit dans sa terre la culture des pommes de terre, production inconnue en France dans sa jeunesse, Condorcet, Duhamel. Les pommes de terre qu'on destine pour la table doivent être mises dans une cuve ou dans un tonneau, avec des feuilles sèches de noyer ou de chêne, par couches alternatives, Genlis, Maison rustique, t. II, p. 462, dans POUGENS.

    Maladie de la pomme de terre, sorte d'affection qui atteint les pommes de terre encore dans le sol et qui les rend impropres à être mangées.

    Eau-de-vie de pommes de terre, eau-de-vie faite avec la pomme de terre.

  • 17Pomme d'Adam, nom vulgaire de la saillie formée par le cartilage thyréoïde à la partie antérieure du cou de l'homme.
  • 18Pomme se dit des feuilles des choux et des laitues, lorsqu'elles sont compactes et ramassées.
  • 19Ornement de bois, de métal, etc. fait en forme de pomme ou de boule.
  • 20Pomme d'arrosoir, sorte d'entonnoir fermé au gros bout par une plaque percée d'une grande quantité de petits trous pour laisser arriver l'eau en pluie sur la terre ; le petit bout s'adapte au goulot de l'arrosoir.
  • 21 Terme de marine. Sphère de bois, plus ou moins aplatie vers ses pôles, suivant l'usage auquel elle est destinée.

    Pomme d'un mât, sphère de bois extrêmement aplatie dont on couvre la tête d'un mât.

    Pomme de racage, sphère de bois, percée diamétralement d'un trou qui reçoit le bâtard du racage.

    Bourrelet fait d'une masse d'étoupe et de bitord, tournés autour d'un cordage et recouverts d'un travail fait en filet.

    Pommes gougées, pommes ayant une cannelure d'une certaine profondeur à leur circonférence équatoriale, et percées, d'un pôle à l'autre, d'un trou perpendiculaire à cette cannelure. Pomme gougée et cochée, pomme portant une cannelure perpendiculaire à la première, et faite de telle sorte qu'elle embrasse en partie un cordage auquel on veut faire adhérer cette sphère. La pomme gougée, comme la pomme cochée, sert au passage d'une manœuvre courante.

  • 22 Terme de serrurier. Râteau en pomme, celui qui porte de petites pommes au bout de ses tiges.
  • 23Pomme de mer, nom vulgaire des oursins.

HISTORIQUE

XIe s. En sa main [il] tint une vermeille pume, Ch. de Rol. XXVIII.

XIIIe s. De le [la] navée de puns, [on payera] une coupe [sorte de mesure] de puns, Tailliar, Recueil, p. 475. Blancheflur traïrai [j'empoisonnerai] en pomme ou en cerise, Berte, LXXVI. La face avoit [Déduit] cum une pomme, Vermoille et blanche tout entour, la Rose, 808. Et s'en entrent dans le cuer [chœur] o ses barons qui portent sa corone et la pome, Ass. de J. I, 30.

XIVe s. Pommes de chou, Ménagier, II, 5. Une pomme d'argent à chauffer mains en hiver, De Laborde, Émaux, p. 456.

XVe s. Une pomme de cristal ronde à refroidir mains, De Laborde, ib. p. 455. Si n'osera nullement Choses celestiaument Comparer ne que une pomme, Deschamps, Poésies mss. f° 82.

XVIe s. Il prenoit son passe-temps à leur jouer plusieurs tours, qui estoient (comme on dit en proverbe) jeux de pommes, c'est à dire jeux qui plaisent à ceux qui les font, Despériers, Contes, CXII. M. le connestable, qui estoit un grand capitaine, disoit qu'il ne vouloit que des pommes cuites pour les abattre [les murs], Lanoue, 580. Le patient usera aussi de quelque pomme aromatique [boule parfumée], Paré, IX, 13. Ayant odoré une pomme de senteur envenimée, subit le visage luy enfla…, Paré, XXIII, 10. La pomme de l'artichau excede en bonté celle de la carde, Paré, 518. Les pommes d'amour, de merveille, et dorées, demandent commun terroir et traittement, comme aussi communement servent-elles à couvrir cabinets et tonnelles, De Serres, 563. Entendans parler en cest endroit des pommes vulgaires, laisserons les pommes de coin, les pommes de grenade, d'orange, de pin, et autres portans ce titre, pour estre remarquées à leurs speciales appelations, De Serres, 685. Les noms suivans. comme les plus remarquables de ce siecle et en ces climats-ci, nous serviront de guide, la melle ou pomme-appie, ainsi ditte de Claudius Appius qui du Peloponese l'apporta à Rome, la roze, le court-pendu, la reinette, le blanc-dureau, la passe-pomme, la pomme-de-paradis, la pomme-de-curtin, de rougelet, de rambure, de chastinier… s'en treuvent… des noires, comme la pomme de caluau, noir en l'escorce, blanc en la chair… Il y a peu de pommes d'esté, ne s'en recognoissant guere plus que de deux especes, l'une est la petite pomme saint-jan, meure environ le commencement de juillet, l'autre est du mois d'aoust, ditte de grillot, De Serres, 685. Le suc des pommes de chesne, non du tout meures, De Serres, 967. Ce grand capitaine se resolut à la fin de mordre à la pomme de ceste ligue, Brantôme, Pescayre. Proposa de se faire aimer par force et contre nature, par le moyen d'un philtre ou poison amatoire, qu'il composa en une pomme de Venus, appellée vulgairement pomme d'amours ou pomme folle, Alector, roman, p. 26, dans LACURNE. Trois pommes rondes, d'or, à mectre senteurs, en chascune desquelles y a ung myrouer et ung caderan, De Laborde, Émaux, p. 456.

ÉTYMOLOGIE

Berry, poume ; picard, peime ; prov. pom, s. m. et poma, s. f. ; esp. et ital. pomo ; du lat. pomum, fruit à pepin ou à noyau.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

POMME. - ÉTYM. Ajoutez : Le bas-latin pomum au sens de pomme est dans un texte du Xe siècle, Boucherie, Rev. des langues romanes, t. VI, p. 459.