« relique », définition dans le dictionnaire Littré

relique

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

relique

(re-li-k') s. f.
  • 1Ce qui reste de Jésus-Christ, des saints et des martyrs, soit parties du corps, soit objets à leur usage, soit instruments de leur supplice. Un baudet chargé de reliques S'imagina qu'on l'adorait ; Dans ce penser il se carrait, Recevant comme siens l'encens et les cantiques, La Fontaine, Fabl. V, 14. Les corps saints sont habités par le Saint-Esprit jusqu'à la résurrection… c'est pour cette raison que nous honorons les reliques des morts, Pascal, Lett. sur la mort de son père. Nous ne pouvons pas appeler ces précieux restes les reliques de son corps ; mais nous ne nous éloignerons pas de la raison, quand nous les nommerons les reliques de la sainteté, Bossuet, Panég. St Gorgon, préambule. J'ai eu le courage de revoir [après la mort de Louis XIV] les reliques que le roi portait sur lui, Maintenon, Lett. à Mme de Caylus, 15 déc. 1715. On vit des généraux lever un siége et perdre une ville pour avoir une relique, Montesquieu, Rom. 22. Les serments les plus ordinaires des anciens Français se faisaient sur les reliques des saints, Voltaire, Dict. phil. Reliques. Le catéchisme du concile de Trente approuve la coutume de jurer par les reliques, Voltaire, ib. Les saints supposés, les faux miracles, les fausses reliques commencèrent à être décriés, Voltaire, Louis XIV, 35. Ce pèlerin espagnol, tout glorieux d'avoir visité plus de reliques qu'aucun de ses pareils, D'Alembert, Éloges, St-Aulaire. Ce sont les femmes qui ont dû inventer le culte des reliques, par le même sentiment qui leur fait attacher tant de prix à un chiffre, à un nœud de ruban, ou à une boucle de cheveux qui leur vient d'un objet aimé, Genlis, Vœux téméraires, t. II, p. 38, dans POUGENS.

    Garder une chose comme une relique, la garder soigneusement.

    Il en fait une relique, des reliques, se dit d'un homme qui fait grand état de quelque chose.

    Familièrement. Je n'en veux pas faire des reliques, se dit d'une chose dont on veut se servir, dont on permet de se servir.

    Fig. et familièrement. Je n'ai pas grande foi à ses reliques, je ne prendrai pas de ses reliques, il ne m'inspire aucune confiance.

  • 2 Reliques d'affection, se disait d'objets que la piété filiale traitait comme des reliques ; c'étaient des souvenirs de famille légués par affection de génération en génération, De Laborde, Ém. p. 478.
  • 3 Au plur. Dans le style élevé. Débris, restes de quelque chose de grand (mot qui vieillit, mais qui est défendu par l'autorité de Racine, et que A. de Musset a heureusement rajeuni). Il ne faut pas que tu penses Trouver de l'éternité En ces pompeuses dépenses Qu'invente la vanité ; Tous ces chef-d'œuvres antiques Ont à peine leurs reliques…, Malherbe, II, 2. Il rentra dans Babylone avec les tristes reliques de l'armée, Vaugelas, Q. C. IV, 16. Je les blâme de condamner reliques, qui sans doute est meilleur et beaucoup plus noble que restes dans la majesté du style de l'histoire, Vaugelas, Nouv. rem. obs, de M*** p. 118, dans POUGENS. Voyons sous un tombeau ces muettes reliques, Rotrou, Herc. mour. IV, 3. Sur un vaisseau dans le port préparé, Chargeant de mon débris les reliques plus chères, Racine, Baj. III, 2. Ils s'arrêtent non loin de ces tombeaux antiques, Où des rois ses aïeux sont les froides reliques, Racine, Phèd. V, 6.

    Fig. Les morts dorment en paix dans le sein de la terre ; Ainsi doivent dormir nos sentiments éteints ; Ces reliques du cœur ont aussi leur poussière ; Sur leurs restes sacrés ne portons pas les mains, Musset, Poésies nouv. Nuit d'octobre.

HISTORIQUE

XIe s. Sur les reliques de s'espée jura, Ch. de Rol. XLV.

XIIIe s. Mais or sai bien ke reliques n'a mie En molt de lieus où li saint sont cuidié, Maetzner, p. 37. Des saintuaires ne des hautes reliques qui i estoient ne covient-il mie parler, Villehardouin, LXXXVII.

XIVe s. Ne passe tant d'oneur les termes, Que dedans ta chambre t'enfermes Pour homme qui veingne à ta court… On diroit : c'est une relique Qu'on ne voit qu'une fois l'année ; Pis en vauroit ta renommée, Machaut, p. 116. À Jehan du Vivier orfevre et varlet de chambre du roy, pour avoir fait et forgié un petit reliquaire d'or pendant à une chayenne d'or, ouquel a de la vraye croix de Rodes et de plusieurs autres reliques, pour mettre et porter au col dudit seigneur, De Laborde, Émaux, p. 478. Et à ce que Grisilidis n'apportast avecques soy aucunes reliques de la vile fortune de povreté…, Ménagier, I, 6.

XVe s. Compains, compains, ce ne poet estre, Que nullement voiiés le prestre Qui jà jour ses reliques blasme, Froissart, Poésies mss. p. 390, dans LACURNE. Et de très grans capitaines comme… dont je m'en tais ; car ce n'est point de mon temps, combien que j'en ay veu des reliques, Commines, I, 3.

XVIe s. C'est tout ce que j'ay peu recouvrer de ses reliques [deux livres de La Boétie], Montaigne, I, 206. S'il [l'envahisseur] venoit à la perte d'une battaille, [qu'il n'aurait] aulcun moyen de sauver les reliques de son armée, Montaigne, I, 357. Il se trouveroit alors plus de douze cens gentils-hommes, qui auroyent moyen, sans solde, de l'accompagner [le roi], qui sont encores de bonnes reliques de la France ruinée, et qui feroyent autant de miracles que celles de S. Mathurin de Larchant, Lanoue, 95. Chascun chapelain loue ses reliques, Génin, Récréat. t. II, p. 236. Brutus et Cassius, qui, se tuans, avec le temps et l'occasion perdirent les reliques de la liberté romiane, de laquelle ils estoient protecteurs, Charron, Sagesse, p. 382, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, rilik ; provenç. reliquias ; espagn. et ital. reliquia ; du lat. reliquiae, restes, de relinquere, laisser, de re, et linquere, de même radical que λιπ dans λείπειν, laisser ; sansc. ric.