« couronne », définition dans le dictionnaire Littré

couronne

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couronne

(kou-ro-n') s. f.
  • 1Ornement de tête fait de feuillage ou de fleurs. Une couronne de feuilles de chêne ou de laurier. Apollon à portes ouvertes Laisse indifféremment cueillir Les belles feuilles toujours vertes Qui gardent les noms de vieillir ; Mais l'art d'en faire des couronnes N'est pas su de toutes personnes, Malherbe, III, 2. Les couronnes ne s'acquièrent pas sans travail ; même celles qui ne sont que de laurier ou de myrte s'achètent bien chèrement, Voiture, Lett. 46. La chevelure que Dieu jeta comme un voile sur les épaules du jeune homme, et comme une couronne sur la tête du vieillard, Chateaubriand, Mart. 128.

    Poétiquement. Belles, vous portez à quinze ans La couronne de l'innocence, Béranger, Couronne.

    Terme de géométrie. Couronne circulaire, espace renfermé entre deux cercles concentriques. Pour avoir la surface d'une couronne, il faut multiplier sa largeur par la circonférence moyenne.

  • 2Couronne a été prise de très bonne heure comme un signe de distinction, de mérite supérieur ou d'autorité.

    Terme d'antiquité romaine. Couronne triomphale, celle qui appartenait aux généraux qui obtenaient les honneurs du triomphe ; elle fut d'abord de laurier, et d'or dans la suite. Couronne de l'ovation, couronne de myrte qui se donnait aux généraux qui obtenaient l'ovation. Couronne obsidionale, couronne d'épis qui se donnait au général qui avait fait lever un siége. Couronne civique, couronne de chêne qui se donnait à celui qui avait sauvé la vie à un citoyen. Couronne murale, couronne dont les fleurons avaient la forme de créneaux et qui se donnait à celui qui était entré le premier dans une ville assiégée. Couronne navale, couronne qui se donnait à celui qui, dans un combat naval, sautait le premier dans un vaisseau ennemi. Une couronne de feuilles de chêne, de laurier ou de quelque herbe plus vile encore, devenait inestimable parmi les soldats, qui ne connaissaient pas de plus belles marques que celles de la vertu, ni de plus noble distinction que celle qui venait des actions glorieuses, Bossuet, Hist. III, 6.

    Aujourd'hui, couronne académique, ou, simplement, couronne, prix remporté dans les concours académiques.

    Se dit aussi de la couronne qu'on donne dans les colléges en même temps que les livres aux écoliers qui ont remporté un prix.

    Fig. Prix, récompense, ornement. Il y a de fausses vaillances qui ont leur couronne, Bossuet, Honn. 1. Mes frères, vous serez ma couronne au jour de Notre-Seigneur, Bossuet, Pasc. Vous êtes leur couronne, leur joie, leur consolation, Massillon, Myst. Résurr.

  • 3Ornement de tête, signe de dignité. La couronne est l'insigne de la puissance royale et de diverses dignités féodales. Couronne de duc, de comte, de baron. Il reste encore aux meilleurs bourgeois une certaine pudeur qui les empêche de se parer d'une couronne de marquis, trop satisfaits de la comtale ; quelques-uns même ne vont pas la rechercher fort loin, et la font passer de leur enseigne à leur carrosse, La Bruyère, XIV. [Le milan] va tout droit imprimer sa griffe Sur le nez de Sa Majesté ! - Quoi ! sur le nez du roi ! - Du roi même en personne. - Il n'avait donc alors ni sceptre ni couronne ? - Quand il en aurait eu, ç'aurait été tout un, La Fontaine, Fabl. XII, 12.

    Couronne fermée, celle dont le cercle est rehaussé de fleurons ou ornements qui viennent se rejoindre au-dessus de la tête ; couronne ouverte, celle qui n'a que le cercle inférieur plus ou moins orné. Au commencement toutes les couronnes étaient ouvertes ; plus tard la couronne impériale et la couronne royale furent fermées.

    Couronne impériale, couronne fermée de forme hémisphérique, terminée par un globe surmonté d'une croix ; couronne royale, couronne fermée plus large par en haut et surmontée d'un ornement particulier, qui, en France, était la fleur de lis ; couronne ducale, couronne ouverte, garnie de huit feuilles ou fleurons ; la couronne de marquis n'avait que quatre feuilles et, entre les feuilles, des pointes ornées de trois perles ; la couronne de comte était tout autour garnie de perles ; celle du vicomte ne portait que quatre perles, et, entre elles, de simples pointes ; celle de vidame [lieutenant civil et militaire d'un évêque] portait quatre croix au lieu des quatre perles du vicomte ; la couronne de baron, plus exactement nommée torfil, consistait en un cercle entouré de plusieurs cordons de perles.

    La triple couronne, la tiare du pape, ainsi dite parce que c'est un bonnet rond et élevé, entouré de trois couronnes d'or enrichies de pierreries, et mises, la première par le pape Hormisdas, la seconde par le pape Boniface VIII, la troisième par Jean XXII ; le bonnet est surmonté d'un globe portant une croix.

    Couronne de fer, la couronne des rois lombards d'Italie.

    Couronne antique, couronne formée par une feuille tournée en cercle, et découpée à grandes pointes jusque vers la base ou cercle qui entoure le front ; telles étaient les couronnes des princes d'Italie.

    La couronne d'épines, celle que l'on mit sur la tête de Jésus-Christ par dérision, à cause qu'il s'était appelé roi des Juifs ; et, figurément, ce qui cause un vif déplaisir, une profonde douleur. Cela lui est une couronne d'épines.

  • 4 Absolument, la puissance royale, impériale. Les prérogatives de la couronne. Tous ces crimes d'État qu'on fait pour la couronne, Corneille, Cinna, V, 2. Il crut pouvoir saisir la couronne ébranlée, Corneille, Rodog. I, 1. La justice n'est point une vertu d'État ; Le choix des actions ou mauvaises ou bonnes Ne fait qu'anéantir la force des couronnes, Corneille, Pomp. I, 1. Le ciel pour vous ailleurs n'a point fait de couronne, Et l'on s'en rend indigne alors qu'on l'abandonne, Corneille, Rodog. III, 2. La plus belle couronne N'a que de faux brillants dont l'éclat l'environne, Corneille, Héracl. I, 1. Qui sait porter une couronne, Quand il a prononcé, n'aime pas qu'on raisonne, Corneille, Sertor. IV, 2. La couronne, seigneur, orne bien une tête, Corneille, Agésilas, II, 7. De peur que quelque jour, venant à la couronne…, Mairet, Soliman, I, 1. Et l'art et le pouvoir d'affermir les couronnes Sont des dons que le ciel fait à peu de personnes, Corneille, Hor. V, 3. Harrington ne voyait que la république d'Angleterre, pendant qu'une foule d'écrivains trouvaient le désordre partout où ils ne voyaient point de couronne, Montesquieu, Espr. XXIX, 19.

    Mettre la couronne sur la tête de quelqu'un, lui donner la puissance souveraine.

    Discours de la couronne, discours prononcé par le souverain à l'ouverture d'une session législative.

    Fig. C'est un des plus beaux fleurons de sa couronne, c'est une des plus riches possessions ou une des plus nobles prérogatives du prince ; et aussi en général, c'est ce qu'une personne a de plus considérable, de plus avantageux.

  • 5État gouverné par un monarque. Quand ils apprendront que, du temps de son ministère, les Anglais ont été battus et chassés, Pignerol conquis, toute la Lorraine jointe à cette couronne, la plus grande partie de l'Alsace mise sous notre pouvoir, Voiture, Lett. 74. Le pape saint Grégoire a fait cet éloge singulier de la couronne de France, qu'elle est autant au-dessus des autres couronnes du monde que la dignité royale surpasse les fortunes particulières, Bossuet, Reine d'Anglet. Ne lui dites pas que la vie d'un premier prince du sang si nécessaire à l'État doit être épargnée ; il répond qu'un prince du sang, plus intéressé par sa naissance à la gloire du roi et de la couronne, doit, dans le besoin de l'État, être plus dévoué que tous les autres pour en relever l'éclat, Bossuet, Louis de Bourbon. Cette couronne [le gouvernement espagnol] pourrait être excitée par l'excellente qualité du coton qu'on cultive dans les Philippines, à y élever, avec le secours des habitants du continent, de belles et nombreuses manufactures, Raynal, Hist. phil. V, 16.

    Le souverain même. Les officiers, le domaine de la couronne. Les diamants de la couronne.

    Traiter de couronne à couronne, traiter de souverain à souverain. Cela se dit aussi par raillerie d'un inférieur qui veut traiter avec son supérieur comme s'il était son égal. Le roi [Louis XIII] traita avec le duc d'Épernon de couronne à couronne, Voltaire, Mœurs, 175. Je ne sais ce que c'est qu'un reproche qu'on fait à nos petits États [de Gex], d'avoir traité de couronne à couronne avec la république de Berne, pour saler notre pot [acheter du sel], Voltaire, Lett. Dupont, 23 février 1776.

  • 6 Terme de théologie. La couronne de gloire, la béatitude éternelle. Quand je viens à penser que ces personnes [personnes d'une sainte vie] peuvent tomber et être au nombre malheureux des jugés, et qu'il y en aura tant qui tomberont de leur gloire et qui laisseront prendre à d'autres, par leur négligence, la couronne que Dieu leur avait offerte, Pascal, Lettres, 1er fragment.

    La couronne du martyre, la récompense qui est réservée aux martyrs.

    Terme de peinture. Ornement que l'on place sur la tête de la Vierge et des saints.

  • 7Couronne ou tonsure cléricale, petit rond que l'on rase au sommet de la tête et qu'on fait plus ou moins grand suivant la qualité des ordres reçus. Couronne d'évêque, de prêtre, de diacre.
  • 8Petit chapelet qui n'a qu'une dizaine et qu'on dit à l'honneur de la sainte Vierge.
  • 9 Terme d'astronomie. Couronne australe, Couronne septentrionale, constellations.
  • 10 Terme de physique. Foyer d'une aurore boréale vers lequel s'élancent les gerbes de feu.

    Météore qui paraît autour du soleil et de la lune, quand la lumière en est réfléchie sur des nuées médiocrement épaisses. On l'appelle plus ordinairement halo.

  • 11 Terme de botanique et de jardinage. Réunion, en cercle, des écailles ou lamelles qui naissent de la face interne du sommet de l'onglet des pétales dans certaines corolles.

    Touffe de feuilles qui surmonte le fruit de l'ananas.

    Greffe en couronne, greffe où, sciant le sujet, on met plusieurs greffes autour de la coupe, entre le bois et l'écorce.

    Couronne impériale, fleur rouge ou jaune, composée de plusieurs petites cloches qui lui donnent l'apparence d'une couronne ; elle est printanière. Couronne royale, espèce de mélilot. Couronne de terre, le lierre terrestre.

  • 12 Terme d'anatomie, de médecine et de chirurgie. Couronne des dents, partie des dents qui se trouve hors des gencives et qui est revêtue d'émail.

    Couronne radiante, l'épanouissement des fibres médullaires des pédoncules cérébraux dans les lobes des hémisphères du cerveau.

    Couronne de Vénus ou chapelet, pustules sèches ou suppurantes, qui se voient souvent sur le front des individus affectés de syphilis invétérée.

    Couronne de trépan, espèce de petit cylindre d'acier, légèrement conique, dont l'extrémité la plus étroite est dentelée en forme de scie, et qui sert à enlever une rondelle d'os, particulièrement au crâne.

  • 13 Terme de vétérinaire. Partie du pied du cheval qui correspond à la deuxième phalange des orteils de l'homme, qui est située entre le paturon et le pied, à l'endroit où le poil joint et couvre le haut du sabot, et qui est formée d'un seul os, portant le nom d'os de la couronne ou de second phalangien.

    Terme de vénerie. Bois du cerf, quand les andouillers sont disposés en une sorte de cercle.

    Terme de fauconnerie. Duvet au bec de l'oiseau, près de la tête.

  • 14 Terme de fortification. Ouvrage à couronne, ou, simplement, couronne, ouvrage fait en forme de couronne qui est avancé vers la campagne, pour communiquer à quelque éminence. Dans ces demi-lunes était un grand ouvrage à couronne, Voltaire, Louis XIV, 13.
  • 15 Terme de géologie. Cratère de volcans portant une sorte de couronnement ou rempart circulaire.
  • 16 Terme de blason. Représentation des ornements qu'on met pour timbre aux armoiries afin de marquer la dignité de la personne. La ville de Cologne porte trois couronnes en mémoire des trois rois ou mages que la légende y dit enterrés.
  • 17Nom des ornements qu'on met aux quatre coins d'une couverture de laine.
  • 18 Terme d'architecture. La partie plate et la plus avancée de la corniche, et qui se nomme aussi larmier.
  • 19Ornement en faïence qui se met au haut des colonnes de poêle.

    Partie d'une lampe qui porte le verre.

    Cercle de fer qui entoure la tête d'un pieu pour l'empêcher de se fendre quand on l'enfonce.

    Terme de joaillier. La partie la plus éminente d'un diamant rose partagé en deux parties égales.

    Terme de marine. Cercle en fer creusé, fixé au cabestan pour virer les câbles-chaînes.

  • 20 Terme de musique. Trait en demi-cercle qui surmonte le point d'orgue et le point de repos.
  • 21Couronne, sorte de papier qui est marqué d'une couronne.

    Adj. Papier couronne.

  • 22Monnaie d'argent d'Angleterre, qui vaut actuellement 5 fr. 81 cent.

    Ancienne monnaie de France, frappée sous le règne de Philippe de Valois.

  • 23Nom des coquilles qui sont amples et très minces.

HISTORIQUE

XIe s. Icez plaid afierent à la coronne le rei, Lois de Guill. 2. De trestuz reis [je] vous present les curunes, Ch. de Rol. XXVIII. Jamais en terre [il] ne portera curone, ib. LXXII. Je lui toldrai [ôterai] la corune du chef, ib. CLXXXIX.

XIIe s. La corone de France doit estre mise avant, Car tuit autre roi doivent estre à lui [elle] apendant, Sax. I. Pris la curune de sun chief e le bou [bracelet] de sun braz, e aportés les ai à tei mun seignur, Rois, 121.

XIIIe s. Tel coronne [elle] ot au chef, qui mout lui atalente, Berte, X. Et de couronne d'or [je] fui par vous couronnée, ib. XVI. Tot environ siet en coronne Sa mesnie, qui l'avironne, Ren. 8265. Renart respont hastivement : Aurez corone [tonsure] grant et lée, Ne mès que l'eve soit chaufée, ib. 1087. Et clerc qui fet querone [ se fait prêtre] por tolir autrui son droit et por achever ses meffez, ne doit pas avoir privilege de clerc, Liv. de just. 32. Maintenant plede on bien contre cix qui ont couronne de servage, mes que ce soit avant qu'il soient diacre ou sous diacre, Beaumanoir, XLV, 28. Il n'afiert pas à clerc qu'il veste robe roiée, ne qu'il soit sans coronne aparant de clerc, puisqu'il a eu coronne d'evesque, Beaumanoir, XI, 43. Je en aurai une coronne es ciex, Joinville, 198.

XIVe s. Changeurs pour chacun marc d'argent que il vendront payeront deux deniers, et ceux qui vendront veselles dorées, esmaillées, couronnes, chapeaux, pelles [perles], pierres, payeront quatre deniers pour livres comme les autres marchandises, Ordonn. des rois, t. II, p. 320. Eussions donné cours aux blans à la couronne pour quatre deniers tournois la piece, et depuis ramené à trois, ib. t. III, p. 520.

XVe s. Celle ville [une sorte de logis en bois transportable] estoit tellement ouvrée, ordonnée et charpentée, qu'on la pouvoit deffaire par travées ainsi qu'une couronne et rasseoir membre à membre, Froissart, liv. III, p. 121, dans LACURNE. Considerez la grand valeur des presens et aussi la puissance des Parisiens ; car il fut dit à moy acteur de ceste histoire qui tous les presens vei, qu'ils avoyent cousté plus de soixante mille couronnes d'or, Froissart, liv. IV, p. 7. Quant le roi Pelion et la royne Dace furent couronnez, les chevaliers prindrent la royne es honneurs ; car l'or et les pierres precieuses gettoient la clarté si grande, qui estoient es couronnes et es chappeaulx qu'elles avoient sur leurs chiefz, que toute la place en resplendissoit, Perceforest, t. II, f° 148. Un barbier secret fit aux damoiselles chacune la couronne [tonsure] sur la teste, Louis XI, Nouv. LX.

XVIe s. Ils les rasent au sommet de la teste, afin que la couronne [tonsure], comme ils disent, signifie dignité royale, Calvin, Instit. 1181. Cheval aiant les couronnes deliées et pelues [garnies de poil], les pasturons courts…, De Serres, 300. Par la disposition des belles fleurs sortans de ceste plante, elle est ditte coronne imperiale [c'est l'impériale], De Serres, 578. Grande quantité de bons greffes est inserée en petite coronne sur le tronc d'un gros arbre de leur espece, De Serres, 673. La figue et le raisin, par jugement universel, sont estimés la coronne de tous autres, De Serres, 697. Si aucun veut faire retraict et chambres aisées [lieux d'aisance] au long du mur commun et moitoyen, il sera tenu faire un autre mur au long du dit mur, qui aura un pied et demy par bas d'espesseur, admortissant d'un pied jusques à la couronne de la voute des dits retraicts, Coust. génér. t. II, p. 264.

ÉTYMOLOGIE

Bourguig. côrône ; picard, corone ; provenç., espagn. et ital. corona ; portug. coroa ; du latin corona ; grec, ϰορώνη, chose courbe.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

COURONNE. Ajoutez :
24Sorte d'anneau formé avec un cordage dont les brins sont passés alternativement en dedans et en dehors d'une boucle.
25Nom d'un pain, dit aussi percé, en forme de couronne.
26 Couronne d'or, monnaie de Suède valant 1 franc 39 centimes, Journ. offic. 6 janv. 1877, p. 124, 1re col.

REMARQUE

L'ouvrage à couronne est un ouvrage avancé formé de deux branches réunies par deux fronts bastionnés. La double couronne est un ouvrage avancé formé de deux branches réunies par trois fronts bastionnés.