« savant », définition dans le dictionnaire Littré

savant

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

savant, ante

(sa-van, van-t') adj.
  • 1Qui sait beaucoup, qui est versé dans les matières soit d'érudition, soit de science. Il est savant en histoire, en mathématique, en chimie. Les sociétés savantes. Les corps savants. N'étant point de ces rats qui, les livres rongeants, Se font savants jusques aux dents, La Fontaine, Fabl. VIII, 9. Mais j'aimerais mieux être au rang des ignorants, Que de me voir savant comme certaines gens, Molière, Femm. sav. IV, 3. Et les femmes docteurs ne sont pas de mon goût ; Je consens qu'une femme ait des clartés de tout ; Mais je ne lui veux point la passion choquante De se rendre savante afin d'être savante, Molière, ib. I, 3. … Je vous suis garant Qu'un sot savant est sot plus qu'un sot ignorant, Molière, ib. IV, 3. Ne paraissez point si savant ; de grâce ! humanisez votre discours, et parlez pour être entendu, Molière, Critique, 7. Les entretiens spirituels que saint Louis avait presque tous les jours avec les plus saints et les plus savants hommes de son siècle, Fléchier, Panég. St Louis. L'étude qu'il fit de cette noble et savante antiquité, qu'il regardait comme la source de la raison et de la politesse de nos siècles, Fléchier, Duc de Mont. Il est savant, dit un politique, il est donc incapable d'affaires, je ne lui confierais pas l'état de ma garde-robe, et il a raison, La Bruyère, XII. Qu'est-ce que l'homme savant, s'il n'est que savant, sinon assez souvent un homme vain, entêté, plein de lui-même, méprisant tous les autres, et, pour le dire en un mot, un animal de gloire ? c'est ainsi que Tertullien définit quelque part les savants du paganisme, Rollin, Traité des Ét. V, 1re part. § 6. Croyez que M. Abauzit, auteur de l'article Apocalypse et d'une partie de Christianisme, est non-seulement un des plus savants hommes de l'Europe, mais, à mon gré, le mieux savant, Voltaire, Lett. d'Argental, 14 nov. 1764. Ayez, mademoiselle, le courage d'être savante ; il ne faut que des exemples tels que le vôtre pour inspirer le goût des langues anciennes, Diderot, Lett. sur les Sourds et muets. Aristippe eut un disciple célèbre dans sa fille Arété, elle se distingua parmi les femmes savantes, Condillac, Hist. anc. III, 18. Le plus savant n'est pas toujours le mieux savant, Cambacérès, Inst. Mém. scienc. mor. et pol. t. III, p. 14.

    Fig. … Les grandes âmes, qui, ayant parcouru tout ce que les hommes peuvent savoir, trouvent qu'ils ne savent rien, et se rencontrent en cette même ignorance d'où ils étaient partis ; mais c'est une ignorance savante qui se connaît, Pascal, Pens. III, 18, édit. HAVET.

  • 2Où il y a soit de la science, soit de l'érudition. De savants travaux. Des recherches, des notes savantes. Savants et immenses recueils où il renferma la jurisprudence ancienne et nouvelle, Fléchier, Lamoignon.

    Armes savantes, l'artillerie et le génie, ainsi dites à cause des études mathématiques qu'elles exigent. Près de lui [dans la retraite de Moscou], des officiers des armes savantes dissertaient encore : dans notre siècle, que quelques découvertes encouragent à tout expliquer, ceux-là, au milieu des souffrances aiguës que leur apportait le vent du nord, cherchaient la cause de sa constante direction, Ségur, Hist. de Nap. XI, 10.

    Langues savantes, les langues anciennes et celles qui ne sont connues que d'un petit nombre de personnes, l'hébreu, l'arabe, le sanscrit, etc. et non, ainsi qu'on le dit quelquefois à tort, les langues synthétiques, comme étant d'une structure compliquée et plus systématiques que les nôtres.

  • 3Bien instruit, bien informé de quelque chose. Où avez-vous appris cela ? vous êtes bien savant. Me voici bien savant sur ce chapitre, Pascal, Provinc. VII. Je trouve ici les chrétiens trop savants : Chrétien, tu sais trop la distinction des péchés véniels d'avec les mortels, Bossuet, Mar.-Thér. Voilà donc saint Pierre changé, et sa chute l'a rendu savant, Bossuet, Panég. St Pierre, 2.

    Cette jeune fille est trop savante, est bien savante, elle sait des choses qu'elle devrait ignorer.

  • 4Qui a de l'habileté en quelque chose. Le plus savant s'y trompe, et deux yeux voient mieux qu'un, Rotrou, Antig. IV, 6.

    Savant à, même sens. Un homme si savant au langage des yeux Ne doit pas demander que je m'explique mieux, Corneille, Suivante, III, 9. Censeur un peu fâcheux, mais souvent nécessaire, Plus enclin à blâmer que savant à bien faire, Boileau, Art p. IV.

    Savant en, dans, qui est habile en, versé en. Accoutumée au meurtre et savante en poison, Corneille, Médée, IV, 3. Que les douleurs l'ont rendue savante dans la science de l'Évangile, et qu'elle a bien connu la religion et la vertu de la croix, quand elle a uni le christianisme avec les malheurs ! Bossuet, Reine d'Anglet. Tantôt, savant dans l'art par Neptune inventé, Rendre docile au frein un coursier indompté, Racine, Phèdre, I, 1. Lausus, savant dans l'art de dompter les coursiers ; Lausus, après Turnus, le plus beau des guerriers, Delille, Én. VII.

    Chien savant, chien dressé à certains exercices

    On a dit savant de, ce qui n'est plus guère usité. Quoiqu'il fût très savant de son humeur et de ses tromperies, si ne se put-il empêcher de se plaire à ses flatteries, D'Urfé, Astrée, I, 5. Sans le péché du premier homme, nous naissions tous savants des arts et des sciences nécessaires pour notre conservation, Racan, Harangue à l'Académie. Tes protestations ne font que m'offenser ; Savante, à mes dépens, de leur peu de durée, Je ne veux point en gage une foi parjurée, Corneille, Mélite, V, 3.

  • 5Où il y a de l'art, de l'habileté. L'organisation savante d'une machine. Une main savante. Les siéges, les assauts, les savantes retraites, Corneille, Sertor. III, 2. Qu'en savantes leçons votre muse fertile Partout joigne au plaisant le solide et l'utile, Boileau, Art p. IV.
  • 6 s. m. et f.Personne versée soit dans l'érudition, soit dans les sciences. Les curieux et savants ont pour objet l'esprit, Pascal, Pens. XXV, 181, édit. HAVET. Les faux savants ne sont pas les seuls qui veulent paraître ne rien ignorer ; presque tous les hommes ont ce défaut, principalement ceux qui ont quelque lecture et quelque étude, Malebranche, Rech. vér. IV, 8. C'est cette savante Qu'estime Roberval, et que Sauveur fréquente, Boileau, Sat. X. Il est vrai qu'il faut craindre de faire [des filles] des savantes ridicules, Fénelon, t. XVII, p. 4. Un savant illustre qui est populaire et familier, c'est presque un prince qui le serait aussi, Fontenelle, Leibnitz. Les savants du premier ordre auraient peine à le devenir, s'ils n'étaient passionnés pour leur science, et possédés par un goût supérieur à tout, Fontenelle, Bernoulli. Cette savante [Mme Dacier], n'étant encore que Mlle Lefèvre, avait dédié un livre au roi qu'elle ne pouvait lui présenter, personne n'osant l'introduire auprès d'un prince qui ne voyait point sans indignation un sujet assez téméraire pour être d'une autre religion que la sienne, D'Alembert, Éloges, Fléchier, note 8. Quatre cent soixante savants qui s'étaient réfugiés dans des montagnes avec ce qu'ils avaient pu emporter de leurs bibliothèques, furent pris et expirèrent au milieu des flammes, Diderot, Opin. des anc. philos. (Chinois). Les savants, qu'on appelle aussi érudits, ont joui autrefois d'une grande considération ; on leur doit la renaissance des lettres ; mais, comme aujourd'hui on ne les estime pas autant qu'ils le méritent, le nombre en diminue trop, et c'est un malheur pour les lettres, Duclos, Consid. mœurs, 11. Il y a un autre ordre de savants qui s'occupent des sciences exactes, on les estime, on en reconnaît l'utilité, on les récompense quelquefois ; leur nom est cependant plus à la mode que leur personne, Duclos, ib.

    Savant en us, savant qui a une teinte de pédantisme, à cause que, anciennement, les érudits latinisaient leurs noms et leur donnaient la finale us. Oui, je suis un savant charmé de vos vertus, Non pas de ces savants dont le nom est en us, Molière, Fâch. III, 2. Permettez-moi de vous représenter qu'aujourd'hui même encore ce ne sont point, comme vous vous le figurez, les Schrévélius, les Pérarédius, les Ménagius, ni, pour me servir des termes de Molière, les savants en us, qui goûtent davantage Homère, Horace, Cicéron, Virgile, Boileau, Lett. à Perrault. Vous n'êtes point savant en us ; D'un Français vous avez la grâce ; Vos vers sont de Virgilius, Et vos épîtres sont d'Horace, Voltaire, Poés. mêl. 200.

    Demi-savant, homme dont les connaissances sont superficielles. Des demi-savants qui sont de tous les sots les plus importuns aux yeux d'un homme sensé, Condillac, Art. de rais. I, 8. La charlatanerie, qui sait se mettre à la portée des ignorants ou des demi-savants, se prêter à leurs préjugés comme à leurs intérêts, Condorcet, Duhamel.

REMARQUE

Au XVIe siècle et au XVIIe, on écrivait sçavant, sçavamment, sçavoir, par une fausse analogie avec science, ou une fausse dérivation du latin scire.

SYNONYME

SAVANT HOMME, HOMME SAVANT. Un savant homme est un homme dont la mémoire est remplie de beaucoup de choses. Un homme savant est un homme versé dans quelque matière particulière de l'érudition, ou des sciences proprement dites.

HISTORIQUE

XVIe s. Il falloit s'enquerir qui est mieulx sçavant, non qui est plus sçavant, Montaigne, I, 142. Il est sçavant jusques aux dents, il a mangé son breviaire, Oudin, Curios. franç.

ÉTYMOLOGIE

Forme participielle du verbe savoir.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SAVANT.
3Ajoutez :

Je n'en suis pas plus savant, ce que vous venez de me dire ne m'apprend rien.