« finir », définition dans le dictionnaire Littré

finir

Définition dans d'autres dictionnaires :

Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

finir

(fi-nir) v. a.
  • 1Conduire à achèvement, à terme. Finir un ouvrage. Finir un procès. Finir un discours.
  • 2Mettre fin à, faire cesser. Rien ne peut m'empêcher de finir ma misère, Mairet, Mort d'Asdrub. v, 2. Je vous rends Aristie et finis cette crainte Dont votre âme tantôt se montrait trop atteinte, Corneille, Sertor. v, 6. Il est tout à fait disgracieux de finir sa vie avec des gens avec qui on ne l'a pas commencée, Maintenon, Lett. à Mme de Caylus, 1705. Finissant là sa haine et nos misères, Racine, Andr. III, 6. Il faut finir des Juifs le honteux esclavage, Racine, Athal. IV, 3. Votre Oreste au berceau va-t-il finir sa vie ? Racine, Iphig. I, 1. Finissez vos passions, commencez à vivre pour l'éternité, Massillon, Carême, Samarit. … J'annonce aux nations Que je finis le meurtre et les proscriptions, Voltaire, Triumv. V, 5.

    Finir le cours de, mettre un terme à. Ils se persuadent qu'ils pourront éteindre leurs passions, finir le cours d'une vie désordonnée, Massillon, Car. Lazare.

    Finir son cours, avec un nom de chose pour sujet, cesser. Je sentis que ma haine allait finir son cours, Racine, Andr. I, 1.

    Finir un verre, un plat, etc. achever de boire, de manger ce qui restait dedans. Il finissait toujours la coupe dont elle avait bu la moitié, Staël, Corinne, XV, 3.

    Dans le langage trivial, finir quelqu'un, achever ce qu'on est en train de lui faire. Un coiffeur dira : Quand j'aurai fini monsieur, ce sera votre tour.

  • 3Avec un nom de chose pour sujet, être la fin, le terme. La période qui finit son discours est admirable. L'instant qui va finir sa vie. La paix finit la haine, Corneille, Rodog. I, 6. Une mort qui prévient et finit tant de pleurs, Racine, Baj. III, 1. La conversion finit nos vices, n'éteint pas nos passions, Massillon, Car. Inj. du monde.
  • 4Mettre la dernière main. Finir un ouvrage.

    Terme d'arts. Exécuter avec beaucoup de soin, d'une manière minutieuse. Le peintre, dit-on, aurait pu finir davantage ces carnations, Fénelon, Exist. I, 89.

    Absolument. Ce peintre finit trop. Il ne sait pas finir.

  • 5 Terme de manége. Finir un cheval, achever son éducation.
  • 6 V. n. Ne pas continuer de faire ou de dire. Les chicaneurs ne veulent jamais finir. Cet enfant ne finira pas si on ne le châtie, faites-le donc finir. La reine de Suède, ayant écouté une longue harangue, dit qu'il fallait qu'elle donnât quelque chose à l'auteur, à cause qu'il avait fini, Colomesii opuscula, p. 114, dans RICHELET. La comtesse : Finissez, monsieur, finissez ; ah ! l'odieuse contestation. - Hortense : Oui, finissons ; je vous épouserai, monsieur, il n'y a que cela à dire, Marivaux, le Legs, sc. 17. Ah çà ! mademoiselle, finirez-vous ? convient-il à une jeune personne de parler ainsi de mariage ? Genlis, Théât. d'éduc. la Bonne mère, I, 2.

    Il se construit avec de et l'infinitif. Finir de parler, de jouer. Soyez, soyez Alcide en finissant de l'être, Rotrou, Herc. mourant, IV, 1.

    En finir, mettre fin à quelque chose, et d'ordinaire à une chose longue et ennuyeuse. Ces deux partis sont également bons, puisqu'ils en finissent, Staël, Corinne, XII, 2. Finissez-en, nos frères de Belgique ; Faites un roi, morbleu ! finissez-en, Béranger, Belges.

    En finir avec quelqu'un, prendre un parti décisif, rompre avec lui.

    Il n'en finit jamais, se dit d'un homme qui fait toute chose avec lenteur.

    Ne pas finir, ne pas cesser de parler sur un sujet. Elles ne finissaient point sur ce sujet, Sévigné, 486. Nous ne finissons point sur votre chapitre, Sévigné, 121.

    Ne pas finir à, avec un infinitif, ne pouvoir achever de. Je voudrais vous faire connaître tous les hauts faits de cet homme extraordinaire, mais je ne finirais pas à vous les raconter.

  • 7Prendre fin, arriver à son terme. Le sermon finissait. Son bail finit à Pâques. Mon aïeul, dont partout les hauts faits retentissent, Voudra bien qu'avec moi ses descendants finissent, Corneille, Pulch. V, 3. Vous souvient-il des fantaisies qui vous prennent quelquefois de trouver qu'il y a des mois qui ne finissent point du tout ? Sévigné, Lett. 25 mai 1780. Comptons donc comme très court, chrétiens, ou plutôt comptons comme un pur néant tout ce qui finit, Bossuet, Letellier. Il est ainsi, chrétiens : tout ce qui se mesure finit ; et tout ce qui est né pour finir n'est pas tout à fait sorti du néant où il est sitôt replongé, Bossuet, Duch. d'Orl. Comment souffrirons-nous… Que le jour recommence et que le jour finisse Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice ? Racine, Bérén. IV, 5. Je vous embrasse du fond de mon trou, avec une tendresse qui ne finira qu'avec moi, mais qui finira bientôt, Voltaire, Lett. d'Argental, 14 oct. 1767. …Dans le sombre avenir Mon âme avec effroi se plonge ; Et je me dis : ce n'est qu'un songe Que le bonheur qui doit finir, Lamartine, Méd. II, 10.

    Ne pas finir, n'avoir point de borne, être infini. Une félicité qui ne finit point.

  • 8Être terminé, se terminer. Le mur finit en tel endroit. Ce mot finit par une voyelle. Ils croyaient que le monde finissait où finissait leur île, Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virg.

    Familièrement, ne pas finir, avoir une longueur démesurée. Deux mains pâles et décharnées dont les doigts ne finissaient point, Marivaux, Marianne, 6e partie. Les bras de cette Hébé ne finissent point, Diderot, Salon de 1767, Œuv. t. XV, p. 126, dans POUGENS.

  • 9Finir en, avoir l'extrémité conformée en… Sa queue est longue de quatorze pouces, elle est couverte de poils noirs, et finit en pointe, Buffon, Quadrup. t. XII, p. 160, dans POUGENS.
  • 10Avoir une certaine issue. Je doute que cela finisse bien. Le règne de Louis XIV finit par des revers. Tout cela finirait par une perfidie ! Racine, Baj II, 5.

    Il se dit des personnes en un sens analogue. Ce jeune homme finira mal. Victor : Et de longtemps, je pense, il ne se mariera. - Justine : Vous verrez que lui-même il finira par là, Collin D'Harleville, Chât. en Esp. II, 1.

    Finir par, avec un infinitif, arriver à la longue à un terme. Quoique pauvre, il finira par payer. Il a fini par se marier à l'âge de cent onze ans, Buffon, Suppl. à l'Hist. nat. Œuv. t. XI, p. 131.

  • 11Mourir. Corisbé, je vous prie, et vous aussi, Phénice, De me faire un plaisir avant que je finisse, Mairet, Sophon. v, 5. Il aima mieux finir par une action de courage que de lâcheté, Perrot D'Ablancourt, Tacite, Hist III, 11. Il n'est personne presque qui ne meure avant de l'avoir exécutée [la résolution de changer] ; les plus déréglés même souhaitent de finir saintement, Massillon, Carême, Imp. fin. Vous avez vu, madame, finir votre ami, que vous aviez déjà perdu ; c'est un spectacle bien triste ; vous l'avez supporté pendant plus de deux années, Voltaire, Lett. Mme du Deffand, 5 déc. 1770. Ainsi finit, à vingt-quatre ans, une princesse également célèbre par l'esprit, la beauté, les grâces, la folie et les vices, Duclos, Mém. rég. Œuv. t. v, p 399. Finir comme mon frère est un sort assez beau, Chénier M. J. Gracques, III, 1. Mais il ne faut pas qu'on ignore Qu'en chantant le cygne a fini, Béranger, Ma dern. chans.
  • 12Se finir, v. réfl. Prendre fin, cesser. Là est le terme du voyage ; là se finissent les gémissements ; là s'achève le travail de la foi, Bossuet, le Tellier.

    S'accomplir. Ce que promirent les prophètes Aujourd'hui se finit en lui, Régnier, Hymne.

    Familièrement. Achever sa toilette. Une dame dit à sa femme de chambre qui l'habille : Descendez, je me finirai moi-même.

HISTORIQUE

XIe s. Ses barons [il] mande pur son conseil fenir, Ch. de Rol. X.

XIIe s. Li emperere a sa raison [discours] fenie, Ronc. p. 10.

XIIIe s. Quant ferme fu la pais et la guerre fenie, Audefroi le Bastard, Romancero, p 12. Et leur traïson pert [paraît] ains qu'il puissent fenir [venir à bout de leur projet], Berte, LXIII.

XIVe s. Et qui avecques ce vouldroit adjouster que ces choses durassent pour toute sa vie et que il finisist sa vie en œuvre de vertu, Oresme, Eth 26.

XVIe s. Pourquoy sera puni un meurtrier, qui a tué celui auquel Dieu avoit fini [déterminé] la vie, Calvin, Instit. 149. Et en pleurs finent leur vie, laquelle estoyt de raison finir en joye, Rabelais, Pant. III, 48. Où que vostre vie finisse, elle y est toute, Montaigne, I, 88. Les stoïciens, qui donnent aux ames une vie au delà de celle-cy, mais finie, Montaigne, II, 307. Tout terme qui finit n'a pas longue durée, Ronsard, 658.

ÉTYMOLOGIE

Picard, finer ; Berry, fénir ; provenç. fenir ; catal. finir ; ital. finire ; du latin finire. L'ancien français, pour éviter l'i dans deux syllabes consécutives, disait fenir, verbe d'ailleurs peu usité, celui qui l'était le plus était finer, dérivé directe ment du substantif finis, fin, et appartenant à la 1re conjugaison.