« naissance », définition dans le dictionnaire Littré

naissance

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

naissance

(nê-san-s') s. f.
  • 1Qualité, condition de l'être qui vient à la vie. La naissance d'un fils. On a fêté le jour de sa naissance. Le registre des décès et des naissances. Au milieu de leur camp tu reçus la naissance, Corneille, Cinna, V, 1. Je crains de le haïr si j'en tiens la naissance, Corneille, Héracl. V, 2. Vous ne vous trouvez au monde que par une infinité de hasards ; votre naissance dépend d'un mariage, ou plutôt de tous les mariages de ceux dont vous descendez, Pascal, Disc. sur la cond. des grands, I. La naissance a des marques indubitables de notre commune faiblesse : nous commençons tous notre vie par les mêmes infirmités de l'enfance, Bossuet, Gornay. Délaissée de toute la terre dès ma naissance, Bossuet, Duch. d'Orl. On sait qu'Érostrate, pour immortaliser son nom, mit le feu à ce fameux temple [d'Éphèse] qui en fut entièrement consumé ; c'est le jour même de la naissance d'Alexandre le Grand, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. XI, p. 36, dans POUGENS. Voilà ce qui m'amène, et non l'impatience D'apprendre à qui je dois une triste naissance, Racine, Iphig. II, 1. Dans quel sein vertueux avez-vous pris naissance ? Racine, Esther, III, 4. Et l'instant de notre naissance Fut pour nous un arrêt de mort, Lamotte, Odes, t. I, p. 497, dans POUGENS. Le nombre des naissances [en une année commune], multiplié par 34, donne toujours à peu près la somme des habitants, Voltaire, Mœurs, 185. Le total des naissances à Paris étant, pendant ces cinquante-huit années, de 1 074 367, et le total des morts 1 087 995, Buffon, Probab. de la vie, Œuv. t. X, p. 546. Je coûtai la vie à ma mère, et ma naissance fut le premier de mes malheurs, Rousseau, Confess. I. La nature n'est qu'une succession de naissances et de morts, Diderot, Claude et Nér. II, 23. Les déclarations de naissance seront faites dans les trois jours de l'accouchement à l'officier de l'état civil du lieu, Code Nap. art. 55.

    Naissances masculines, le nombre de garçons nés ; naissances féminines, le nombre de filles nées.

    Donner la naissance, donner naissance à un enfant, le mettre au monde. Savez-vous seulement qui vous donna naissance ? Chénier M. J. Œdipe roi, II, 2.

    Il se dit aussi des animaux. La naissance d'un poulain, d'un veau.

  • 2Naissance se dit, en physiologie, d'une manière générale pour indiquer l'apparition d'un corps organisé qui n'existait pas. La naissance des rudiments du poulet dans l'œuf fécondé. La naissance du tubercule dans le poumon.
  • 3Origine par le sang, par la famille. Je vous ai vu pour elle [Albe] autant d'indifférence Que si d'un sang romain vous aviez pris naissance, Corneille, Hor. I, 1. Plus la haute naissance approche des couronnes, Plus cette grandeur même asservit nos personnes, Corneille, Rodog. III, 3. Ma naissance suffit pour régner après vous, Corneille, Héracl. I, 3. Un pur hasard sans nous règle notre naissance, Corneille, Othon, II, 2. Ne rougissez-vous point de mériter si peu votre naissance ?… non, non, la naissance n'est rien où la vertu n'est pas, Molière, Don Juan, IV, 6. Le mal à craindre d'un sot, qui succède par droit de naissance, Pascal, Pens. V, 3, édit. HAVET. Il est vrai qu'il faut honorer les gentilshommes, mais non pas parce que la naissance est un avantage effectif, Pascal, ib. V, 2 ter. Issue de cette race, fille de Henri le Grand et de tant de rois, son grand cœur a surpassé sa naissance, Pascal, Reine d'Anglet. Sous prétexte qu'elle serait de moindre naissance, Pascal, Lett. abb. 249. Justin, de bonne naissance, Pascal, Hist. I, 11. L'on a trouvé [par les ancêtres] le moyen de distinguer les naissances illustres d'avec les naissances viles et vulgaires, et de mettre une différence infinie entre le sang noble et le roturier, Pascal, Gornay. N'allait-elle pas gagner tous les cœurs, c'est-à-dire la seule chose qu'ont à gagner ceux à qui la naissance et la fortune semblent tout donner ? Pascal, Duch. d'Orl. Je n'ai pas besoin de vous dire que c'est Dieu qui donne les grandes naissances, les grands mariages, les enfants, la postérité, Pascal, Mar.-Thér. L'avantage d'une haute naissance, Pascal, Louis de Bourbon. Oui, quoi que le vulgaire en pense, Rousseau, la plus vile naissance Donne du lustre à la vertu, Lamotte, Odes, t. I, p. 526, dans POUGENS. Les mortels sont égaux, ce n'est point la naissance, C'est la seule vertu qui fait la différence, Voltaire, Fanat. I, 4. Et Séide et Palmyre ignorent leur naissance, Voltaire, ib. III, 11.
  • 4 Absolument. Noblesse. C'est un homme de naissance, qui a de la naissance. Songez… Que Rome vous permet cette haute alliance, Dont vous aurait exclus le défaut de naissance, Corneille, Nicom. I, 2. …J'entends et je voi D'où vient que tu t'es fait secrétaire du roi ; Il fallait de ce titre appuyer ta naissance, Boileau, Sat. X. S'il est heureux d'avoir de la naissance, il ne l'est pas moins d'être tel que l'on ne s'informe plus si vous en avez, La Bruyère, II. Son exemple encourageait quiconque avait du mérite sans naissance, Voltaire, Russie, I, 12. Qu'y a-t-il de plus ridicule qu'un grand seigneur devenu gueux, qui porte dans sa misère les préjugés de sa naissance ? Rousseau, Ém. III. J'avais des ressources, et votre mère avait de la naissance, Diderot, Père de famille, II, 6. Le défaut de naissance vous ferme en France le chemin aux grands emplois, Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie.
  • 5Les bonnes et les mauvaises qualités avec lesquelles on est né. Quoique une heureuse naissance eût apporté de si grands dons à notre prince, il ne cessait de l'enrichir par ses réflexions, Bossuet, Louis de Bourbon. Une si heureuse naissance la rendit d'abord la passion de tout ce qu'il y avait de vertueux, Fléchier, Mme de Mont.

    En ce sens, il vieillit. On dit plutôt aujourd'hui naturel.

  • 6Dans le langage théologique, la seconde naissance, la régénération par le baptême. La grâce sera toujours dans le monde, et aussi la nature… et ainsi il y aura toujours des pélagiens et toujours des catholiques, et toujours combat, parce que la première naissance fait les uns, et la grâce de la seconde naissance fait les autres, Pascal, Pens. XXIV, 12 ter.
  • 7 Fig. Origine, commencement. La naissance d'un État, d'une ville. Séjanus, dans la naissance de sa fortune, ne se voulait pas faire connaître par des cruautés, Perrot D'Ablancourt, Tacite, dans RICHELET. Impatients désirs d'une illustre vengeance Dont la mort de mon père a formé la naissance, Corneille, Cinna, I, 1. Et ne savez-vous pas, avec toute la France, D'où ce titre d'honneur a tiré sa naissance, Et que la vertu seule a mis en ce haut rang Ceux qui l'ont jusqu'à moi fait passer dans leur sang ? Corneille, Menteur, V, 3. Je sais que ton État, encore en sa naissance, Ne saurait sans la guerre affermir sa puissance, Corneille, Hor. I, 1. La république faible encore et dans sa naissance, Bossuet, Hist. III, 6. Telle a été la naissance des Frères de Bohême, Bossuet, Var. XI, § 173. Désigner chaque secte par celui dont elle tirait sa naissance, Bossuet, Hist. II, 12. Vous redoutez un mal faible dans sa naissance, Racine, Brit. III, 1. Faites, dans sa naissance, admirer votre empire, Racine, Alex. V, 3. …Avant donc La naissance du monde et la création, Racine, Plaid. III, 3. Son empire [de Dieu] a des temps précédé la naissance, Racine, Ath. I, 4. Une naissance de passion trop faiblement rejetée, une occasion de périls trop fréquentée, Massillon, Carême, Tiéd. 2.

    Donner naissance, causer, produire. Le désir si vif et si inutile de connaître l'avenir donna naissance aux oracles des païens, D'Alembert, Éloges, Dumarsais.

    Prendre naissance, prendre sa naissance, avoir naissance, commencer à apparaître, à être produit, à se former. Tes desseins n'ont pas naissance Qu'on en voit déjà le bout, Malherbe, II, 2. Ces sentiments [supprimer tous les actes de demande à Dieu], en général, prennent leur naissance de l'orgueil naturel, Bossuet, Ét. d'orais. I, 13. La Jérusalem visible avait fait ce qui lui restait à faire, puisque l'Église y avait pris sa naissance, Bossuet, Hist. II, 7. L'idolâtrie, si nous l'entendons, prenait sa naissance de ce profond attachement que nous avons à nous-mêmes, Bossuet, ib. 11. Ce fut là que prit naissance cette amitié durable qui a vieilli avec nous, Marmontel, Mém. III.

    Naissance de la verdure, des fleurs, le moment où la verdure, les fleurs commencent à pousser.

    Naissance du jour, le moment où le jour commence à paraître. Et n'a point respecté la naissance du jour, Rotrou, Antig. V, 5.

  • 8Le point, l'endroit où commence une chose qui se prolonge ensuite en une certaine direction. La naissance d'une branche. La naissance d'une feuille. Ce fleuve porte bateau tout près de sa naissance. La naissance de la gorge dénuée de plumes, Buffon, Ois. t. XII, p. 379.

    Terme d'anatomie. La naissance d'une artère, le point d'où elle se détache du cœur ou d'une autre artère.

  • 9 Terme de construction. L'endroit où commence à paraître une voûte, une poutre, un corbeau, etc.

    Synonyme de pierre d'attente ou harpe.

    La naissance d'une colonne, le commencement du fût.

    Terme de maçonnerie. Naissance, bande d'enduit ou de plâtre faite en raccordement. Naissance d'enduit, certaines plates-bandes au circuit des croisées ou ailleurs.

  • 10De naissance, loc. adv. En naissant, en venant au monde. Elle lui demanda s'il était aveugle de naissance, Buffon, Anne de Gonz. On ne tombe pas dans les vices qu'il [le peuple romain] fit éclater sous ses maîtres, sans quelque défaut de naissance dans le cœur, Chateaubriand, Génie, IV, VI, 13.

HISTORIQUE

XIIIe s. Il semerent chans, et planterent vignes, et firent fruiz de neissance, Psautier, f° 134.

XVIe s. Depuis le triste point de ma fresle naissance, Et que dans le berceau, pleurant, je fus posé, Desportes, Œuvres chrétiennes, Sonnets, 1. Si la fin d'un travail d'un autre est la naissance, Desportes, ib. 13.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. naissensa, naysensa, naisquenza ; catal. naxensa ; anc. espagn. nascencia ; ital. nascenza ; du lat. nascentia, qui vient de nascens, naissant. L'ancienne langue disait aussi nation au sens de naissance.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

NAISSANCE. Ajoutez : - SYN. NAISSANCE, ORIGINE., Naissance se dit du pays où l'on est né ; origine, du pays où nos ascendants sont nés. Vicencio Carducho, Eugenio Caxes et Angelo Nardi, ces trois artistes, peintres ordinaires du roi [Philippe IV], étaient Italiens soit de naissance, soit d'origine, J. Dumesnil, Hist. des amat. ital. p. 66.