« pli », définition dans le dictionnaire Littré

pli

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

pli

(pli) s. m.
  • 1Ce qu'on fait à une étoffe, à du linge, etc. lorsqu'on les met en un ou plusieurs doubles. Faire un pli à une étoffe, à une feuille de papier. Manchettes plissées à petits plis.

    Remettre une étoffe dans ses plis, la replier de la même manière qu'elle avait été pliée par le fabricant.

    Cet habit ne fait pas un pli, il est juste à la taille.

    Fig. et familièrement. Cela ne fait pas un pli, pas un petit pli, pas le moindre pli, cela est sans difficulté. Que la chose ne ferait pas le plus petit pli, Genlis, Parvenus, t. I, p. 299, dans POUGENS.

    Fig. Donner un bon pli à une affaire, la tourner de la sorte qu'elle ait une issue favorable.

  • 2 Terme de couture. Diminution de l'ampleur ou de la largeur d'une étoffe, d'un ruban, d'un papier, en mettant l'étoffe en deux ou en trois. Petit pli, grand pli, pli double, pli rond. En couture, le pli rond se fait en mettant l'étoffe en trois, à gauche, en ne changeant pas l'étoffe de côté, c'est-à-dire l'étoffe toujours à l'endroit, puis en répétant le même pli à droite. Le pli double se fait en mettant deux plis l'un sur l'autre exactement.
  • 3La marque qui reste à une étoffe, etc. pour avoir été pliée. On a fait des cornes à ce livre ; on en voit toujours les plis.

    Faux pli, pli fait à une étoffe, soit avec le fer, soit parce qu'elle a été mal pliée, à un endroit où il ne doit pas y en avoir.

    Cette étoffe a pris son pli, les plis qui y sont demeureront toujours.

    Fig. Il ressemble au camelot, il a pris son pli, c'est-à-dire il ne changera plus de manière de vivre, de penser, etc. Il [le naturel] se moque de tout ; certain âge accompli, Le vase est imbibé, l'étoffe a pris son pli, La Fontaine, Fabl. III, 18.

    Donner le pli à un vêtement, le porter quelque temps pour que les plis s'accommodent aux formes du corps. Il les porte [des habits] d'abord, pour y donner le pli, et je les use après, LEGRAND, Famille extrav. sc. 11

  • 4Manière de plier une lettre, pour la fermer. La forme, le pli, le cachet, l'adresse, tout dans cette lettre m'en rappelle de trop différentes, Rousseau, Hél. VI, 7.

    Enveloppe de lettre, de paquet, etc. Je vous envoie sous ce pli…

    Pli cacheté, lettre secrète, qui ne doit être ouverte, à la mer, qu'en certain lieu indiqué d'avance, ou dans certaines circonstances prévues.

  • 5Il se dit de la manière dont un vêtement s'accommode aux formes du corps. Combien des cheveux noués négligemment par derrière et des draperies pleines et flottantes à longs plis sont agréables et majestueuses ! Fénelon, Éduc. filles, 10. Lorsque l'habit jaloux qui cache ton amante Descend, glisse à longs plis sur sa taille élégante, Delille, Trois règnes, III. Zéphir vient se jouer dans ses flottants habits, Et la pudeur craintive en arrange les plis, Delille, Hom. des ch. I.

    Il se dit, en peinture et en sculpture, des sinuosités des draperies. Dans une draperie, il faut principalement avoir égard à l'ordre des plis.

  • 6Ce qui ressemble aux plis d'une étoffe, etc. La peau de cet animal fait des plis sur le cou. Que jamais la gloire ne creuse Sur ce front blanc le moindre pli, Lamartine, Épit. Nul souci sur son front n'avait laissé son pli ; Tout folâtrait en elle, Lamartine, Harmon. IV, 10. Et l'on peut distinguer bien des choses passées Dans ces plis de mon front que creusent mes pensées, Hugo, F. d'aut. I.
  • 7L'endroit où une chose solide fait comme un pli.

    Le pli du bras, le pli du jarret, l'endroit où le bras, le jarret se plient.

    Terme de manége. Le pli de l'embouchure, l'endroit de la brisure du mors de bride.

    Chez le cheval, pli du paturon, cavité qui se remarque à la face postérieure du paturon.

    Mettre un cheval dans un beau pli, voy. PLIER, n° 3.

    Terme de botanique. Nom donné à des lignes saillantes, droites ou sinueuses, qui s'aperçoivent sous le chapeau de certains champignons.

    Terme de construction. L'angle rentrant d'un mur, par opposition à coude.

    Terme de tactique. Un pli de terrain, un enfoncement où une troupe peut se masquer. Un de ses officiers d'ordonnance, le prince d'Aremberg, vint l'avertir que, dans l'ombre de la nuit et des bois, et à la faveur de quelques plis de terrain, des Cosaques se glissaient entre lui et ses avant-postes, Ségur, Hist. de Nap. IX, 3.

  • 8Pli de câble, voy. ROUE de câble.

    Arrangement des manœuvres courantes, qui sont pliées généralement en roue ; chacun des tours ainsi formés.

  • 9 Fig. Habitude contractée et comparée à la marque persistante que le pli laisse dans une étoffe. Dans les âges suivants [après la jeunesse], on commence à prendre un pli ; les passions s'appliquent à quelques objets…, Bossuet, Panég. St Bern. I. Mais que de temps en temps vous l'y condamnassiez pour lui faire prendre le pli de la soumission, Maintenon, Lett. à Mme de la Viefville, 20 juin 1708. Il me semble que la plus grande utilité du théâtre est de rendre la vertu aimable aux hommes, de les accoutumer à s'intéresser pour elle, de donner ce pli à leur cœur, Fontenelle, Réfl. poét. Œuv. t. III, p. 173, dans POUGENS. Mon âme, n'ayant pas pris d'abord le pli que lui devait donner la mauvaise fortune, a toujours résisté à l'abaissement et à la sujétion où je me suis trouvée, Staal, Mém. t. I, p. 2. Il est toujours sage et avantageux d'encourager les hommes aux actes honnêtes : ils sont capables de prendre le pli de la vertu comme du vice, Duclos, Consid. mœurs, IV.

    Fig. Cet homme a pris son pli, les habitudes qu'il a contractées ne sont plus susceptibles d'être changées. Ne dit-on pas tous les jours : j'ai pris mon pli, je suis trop vieux pour changer ? Fénelon, Éduc. filles, v.

    On dit dans le même sens : le pli est pris.

    Ce jeune homme a pris un bon pli, un mauvais pli, il est déjà formé aux habitudes du bien, à celles du mal.

    On dit dans le même sens : donner un bon pli à la jeunesse.

  • 10 Fig. Les plis du cœur, et aussi les plis et replis du cœur, ce qu'il y a de plus secret dans le cœur. Vos yeux démêleront ses secrets sentiments, Et des plis de son cœur verront tout l'artifice, Voltaire, Zaïre, IV, 5.

HISTORIQUE

XIIe s. Les deus plois de l'aubert [il] li a fait desconfire, Sax. x.

XIIIe s. Vostre cemise me livrez, El pan desus ferai un ploit, Marie de France, Gugemer. Je ferai toutes metre en pli Vos barbacanes là drecies ; Jà si haut nes aurés drecies Que nes face [que je ne les fasse] par terre estendre, la Rose, 20936.

XVe s. Aussi Amours me prist au ploi De mon droit jouvent ; pour ce ploi [pour cela je plie] Tout ensi qu'il me voelt ployer, Froissart, Espin. amour. Car trop y a [dans les coiffures des femmes] d'espingles et d'arestes, De cheveulx mors, de bourriaux et de crestes, Et tant de plois et devant et derriere, G. Desch. Poésies mss. f° 328. J'ay pris ce ply, force est que le maintiengne ; Si seroit fort que jamais le changeasse, Chartier, Compl. Sur le bas du ply de leurs robes, Villon, Ball. des dames de Paris.

XVIe s. Car qui d'amours ne veut prendre le ply…, Marot, I, 161. De tes habits les plis ne sentent qu'ambre, Marot, IV, 287. Nos plus grands vices prennent leur ply de nostre plus tendre enfance, Montaigne, I, 107. Du ply du col, à fault de mains, il [un estropié] manioit…, Montaigne, I, 109. Attendant quel pli prendroyent les affaires de la cour et les mouvemenz de Paris, Lanoue, 545. Le ply du coulde, Paré, IV, 23. Le ply du jarret, Paré, ib. 31. Les mouvemens et plis du visage qui servent aussi au pleurer, comme les peinctres nous apprennent, Charron, Sagesse, I, 39.

ÉTYMOLOGIE

Voy. PLIER ; wallon, pleu ; provenç. pleg, plec ; anc. esp. pliego ; port. prege ; ital. piego. Ploi et pli sont le même mot prononcé différemment. Pli se dit, dans quelques provinces, d'une levée, aux cartes.