« prochain », définition dans le dictionnaire Littré

prochain

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

prochain, aine

(pro-chin, chè-n') adj.
  • 1Qui est dans le voisinage. Les meurtriers sortirent de la ville par la porte qui se trouva la plus prochaine, Malherbe, dans MÉNAGE. À ces mots, l'ours s'en va dans la forêt prochaine, La Fontaine, Fabl. V, 20. Furieuse, elle vole, et sur l'autel prochain…, Racine, Iph. V, 6. De son appartement cette porte est prochaine, Racine, Bérén. I, 1. Je viens de le laisser dans la chambre prochaine, Montfleury, Femme juge et part. IV, 1.

    Fig. Ne confiez plus votre cher argent à ceux qui vivent aux dépens d'autrui ; car, pour ces gens-là, rien n'est plus prochain que l'argent, Voltaire, Lett. d'Albertas, 1765 (sans autre date).

    Ce n'est pas à ces prochaines maisons, se dit pour exprimer une distance assez grande.

  • 2Il se dit du temps et des choses qui sont près d'arriver. Reçois le consulat pour la prochaine année, Corneille, Cinna, V, 3. Que Rhinberg et Wesel, terrassés en deux jours, D'un joug déjà prochain menacent tout son cours [du Rhin], Boileau, Ép. IV. J'ai lu dans ses regards sa prochaine vengeance, Racine, Mithr. IV, 2. Et qui de ma faveur se voudrait honorer, Si mon hymen prochain ne peut vous assurer ? Racine, Iphig. V, 2.

    Il se dit avec à. Et que pour retarder une heure seulement La nuit déjà prochaine à ta courte journée, Malherbe, I, 4.

  • 3 Terme de philosophie. Cause prochaine, celle qui est immédiate. Il est très vraisemblable que, si César n'ordonna pas la mort de Pompée, il fut au moins la cause très prochaine de cette mort, Voltaire, Triumv. notes. Les historiens n'indiquent ordinairement que les causes prochaines de la prospérité ou de l'adversité des États, Condillac, Étud. hist. I, 3.

    Terme de dévotion. Occasion prochaine, occasion de pécher qui est présente, ou occasion qui peut porter facilement au péché.

    Terme de théologie. Pouvoir prochain, pouvoir d'agir conformément à la volonté de Dieu, moyennant la grâce nécessaire pour lui obéir. Je le suppliai de me dire ce que c'était qu'avoir le pouvoir prochain de faire quelque chose : cela est aisé, me dit-il : c'est avoir tout ce qui est nécessaire pour la faire, de telle sorte qu'il ne manque rien pour agir, Pascal, Prov. I. Ainsi, lui dis-je, avoir le pouvoir prochain de passer une rivière, c'est avoir un bateau, des bateliers, des rames et le reste, en sorte que rien ne manque. Fort bien, me dit-il, Pascal, ib.

  • 4 S. m. Chaque homme en particulier, ou tous les hommes ensemble. Je m'acquitte parfaitement à votre égard du précepte d'aimer mon prochain comme moi-même, Sévigné, 528. Nous rions un peu de notre prochain ; il est plaisant ici le prochain, particulièrement quand on a dîné, Sévigné, 75. Les Juifs, qui voulaient bien avouer qu'ils devaient de l'amour à leurs prochains, mais qui ne pouvaient demeurer d'accord qu'ils dussent rien à leurs ennemis, Bossuet, Sermons, Charité frat. 1. On respectait bien la seule présence de saint Augustin, jusqu'à n'oser à sa table prononcer une parole qui pût offenser le prochain, Bourdaloue, 6e dim. après la Pentecôte, Dominic. t. III, p. 40. Chacun juge de son prochain avec liberté, Fléchier, Duchesse de Mont. Tout ce qui m'est extérieur, m'est étranger désormais ; je n'ai plus en ce monde ni prochain, ni semblables, ni frères, Rousseau, 1re prom. La crainte [chez les brames] de nuire à leur prochain, c'est-à-dire à tous les animaux, à tous los hommes, les occupe continuellement, Raynal, Hist. phil. V, 34.

    L'académie dit qu'il ne s'emploie qu'au singulier ; on voit que Bossuet s'est servi aussi du pluriel.

REMARQUE

Le peuple dit abusivement : c'est mon plus prochain voisin ; mais il faut dire : c'est mon plus proche voisin, Vaugelas, Rem. t. I, p. 147, dans POUGENS.

HISTORIQUE

XIIe s. Il vous ont desfié de [à] guerre moult prochaine, Sax. XX. Si metomes un terme prochain, ne demeurt guere [qu'il n'y ait pas de retard], ib. XXX. Deus me conseillera, qui tuz diz m'est prochiens, Qui l'orguillus abat, le poure oste des fiens [fumiers], Th. le mart. 97.

XIIIe s. Quand orendroit [elle] lui est si prochaine voisine, Berte, LVI. Jou cuit [je pense] qu'il soit prochain parant ; Car à merveille sont sanlant, Fl. et Bl. 1731. Il n'avoit nul illec qui n'eust de ses prochains amis en la prison, Joinville, 255.

XIVe s. Qui se vouldroit atendre à ses parents et as proceins et amis…, Oresme, Eth. VIII, 14.

XVe s. Et sembloit audit duc que la fille de son germain frere devoit estre par raison plus prochaine d'avoir la duché de Bretaigne après son decès, Froissart, I, I, 147. Le mardi prochain après le jour Saint-Michel, Froissart, I, I, 306.

XVIe s. Faictes dresser la collation en ceste prochaine hostellerye, Rabelais, Pant. IV, 4. L'hyver prochain [dernier], estant menacé par la fievre quarte de partir de ce monde, d'autant plus que la maladie me pressoit, je me suis d'autant moins espargné, Calvin, Instit. Épit. Toutes calomnies et detractions qui nuisent à nos prochains, Calvin, ib. 308. Il n'y a rien plus contraire à la foy, que conjecture ou autre sentiment prochain à doute et ambiguité, Calvin, ib. 453. Que le royaume de France s'en va peu à peu versant, et est prochain de faire une lourde cheute, Lanoue, I. La legereté dont plusieurs usent à detester leurs prochains, à cause du different de la religion, Lanoue, 67. Le mot de prochain s'estend indifferemment à tous les hommes… il suffit donc, à ce que quelqu'un soit nostre prochain, qu'il soit homme, Lanoue, 72. Solon mourut l'année prochaine d'après, Amyot, Solon, 67. Joseph engagé en un si apparent dangier et si prochain, Montaigne, II, 30. Souvent se plaint qui injurie son prochain, Génin, Récréat. t. II, p. 249.

ÉTYMOLOGIE

Proche. Le provençal prosman et l'italien prossimano suppose le latin fictif proximanus, allongement de proximus qui avait donné l'ancien français proisme, prisme.