« secrétaire », définition dans le dictionnaire Littré

secrétaire

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secrétaire

(se-kré-tê-r' ; la prononciation ancienne était segrétaire ; quelques-uns l'ont encore aujourd'hui ; beaucoup de gens prononcent à tort sécretaire ou sècretaire) s. m.
  • 1Anciennement, confident, celui à qui l'on confie ses secrets. Vous [devins], qui des puissants dieux êtes les secrétaires, Gombauld, Danaïdes, I, 2. Tu seras de mon cœur l'unique secrétaire, Et de tous mes secrets le grand dépositaire, Corneille, Ment. II, 6.
  • 2Celui dont l'emploi est de faire ou d'écrire des lettres, des dépêches pour une personne à laquelle il est attaché. Secrétaire des commandements d'un prince. II, 6. Avez-vous eu le soin de voir mon secrétaire ? Allez lui demander si je sais votre affaire, Racine, Plaid. II, 8. Il [M. de Créci] avait eu d'abord auprès de Louis XIV une place de secrétaire du cabinet, qui mettait tous les jours le monarque à portée de le sonder et de le juger, D'Alembert, Éloges, L. Verjus.

    Par extension, être le secrétaire de quelqu'un, servir à quelqu'un de secrétaire, écrire pour lui une lettre ou toute autre chose. M. le chevalier a un peu mal à la main droite, il ne vous écrira pas longtemps, je m'offre d'être son secrétaire, Sévigné, 474. Je n'aime point à avoir des secrétaires qui aient plus d'esprit que moi ; ils font les entendus, je n'ose leur faire écrire toutes mes sottises, Sévigné, 8 avr. 1676. Au rigoureux Boileau j'écrivis l'an passé ; Je ne sais si ma lettre avait pu lui déplaire, Mais il me répondit par un plat secrétaire [Clément, auteur d'une réponse de Boileau], Voltaire, Ép. à Horace.

    Fig. Celui [Aristote] qu'on a eu raison d'appeler le secrétaire de la nature, vu qu'il semble qu'elle-même lui ait dicté ce qu'il a écrit de toutes ses opérations, La Mothe le Vayer, Vertu des païens, II, Aristote. Quelqu'un [Balzac, d'après Moreri] a dit que Charron n'était que le secrétaire de Montaigne… en effet, il a pris beaucoup de sentences philosophiques, mot pour mot, des Essais, Anal. de Bayle, t. IV, p. 189. Je ne prétends point avoir d'opinion à moi ; je dois être le secrétaire de ceux qui ont des lumières et du goût, Voltaire, Lett. d'Argental, 31 août 1761.

    Secrétaire de la main, nom, sous l'ancienne monarchie, de celui qui écrivait ou transcrivait les lettres du roi ou de la reine, en imitant plus ou moins bien l'écriture du prince.

  • 3Secrétaire d'ambassade, celui qui est nommé par le gouvernement pour faire et pour écrire les dépêches de l'ambassade.
  • 4Celui qui rédige par écrit les délibérations de quelque assemblée. Les secrétaires du Corps législatif. La fonction du secrétaire [de l'Académie française] est d'écrire les résolutions et d'en tenir registre, signer tous les actes, garder tous les titres et tous les papiers de l'Académie, et expédier des certificats à ceux du corps qui ont besoin de justifier qu'ils en sont, Pellisson, Hist. de l'Acad. franç. II. La charge de secrétaire perpétuel n'avait encore vaqué depuis l'établissement de l'Académie que trois fois ; et M. Conrart avait succédé à M. de Mezeray, et à celui-ci M. l'abbé Regnier, D'Olivet, Hist. Acad. t. II, p. 32, dans POUGENS. En 1713 il [M. Halley] fut choisi pour être secrétaire de la Société royale, place dont les fonctions consistent principalement à rassembler et à publier avec choix les ouvrages qui ont été présentés à la compagnie par ses membres, Mairan, Éloges, Halley. Jean ou John Milton, longtemps maître d'école à Londres, puis secrétaire, pour le latin, du parlement nommé le Croupion, Voltaire, Dict. phil. Samson. Le secrétaire d'une académie doit non-seulement avoir une connaissance étendue des différentes matières dont l'académie s'occupe, mais posséder encore le talent d'écrire, perfectionné par l'étude des belles-lettres, la finesse de l'esprit, la facilité de saisir les objets et de les présenter, enfin l'éloquence même, D'Alembert, Œuv. t. III, p. 280. Les éloges historiques sont en usage dans nos académies des sciences et des belles-lettres, et, à leur exemple, dans un grand nombre d'autres ; c'est le secrétaire qui en est chargé, D'Alembert, ib. p. 277.
  • 5Secrétaire d'État, titre de chacun des ministres qui ont un département et qui contresignent les ordonnances du souverain. On l'avait fait ministre et secrétaire d'État sur sa mine, Hamilton, Gramm. VII. M. de Pontchartrain, qui, en qualité de secrétaire d'État ayant le département de la maison du roi, était chargé du soin des académies, Fontenelle, Hist. Acad. scienc. Œuvr. t. V, p. 25, dans POUGENS. Ils [les secrétaires d'État] se sont fait appeler monseigneur, titre qu'on ne donnait autrefois qu'aux princes et aux chevaliers ; et les secrétaires du roi ont été relégués à la chancellerie, où leur unique fonction est de signer des patentes, Voltaire, Mœurs, 98. Cette charge de secrétaire d'État est restée sans interruption dans la famille des Phelippeaux pendant 163 ans, Voltaire, Louis XIV, Secrétaires d'État.

    Anciennement. Secrétaires d'État, officiers de la couronne, au nombre de quatre, dont chacun, dans le mois de son ministère, expédiait les grâces, conduisait à l'audience les députations envoyées au roi ; c'est par ses mains que passaient les dépêches du roi et celles qu'on adressait au roi. Les secrétaires d'État, qui n'ont originairement d'autres droits que de signer les expéditions, et qui ne pouvaient les rendre authentiques qu'autant qu'ils étaient clercs du secret, secrétaires notaires du roi, sont devenus des ministres et des organes tout-puissants de la volonté royale toute-puissante, Voltaire, Mœurs, 98.

  • 6Secrétaire général du conseil d'État, d'un ministère, d'une préfecture, employé supérieur qui a principalement la charge de garder les archives, d'entretenir la correspondance et d'expédier les actes du conseil d'État, d'un ministère, d'une préfecture.
  • 7Secrétaire d'une mairie, celui qui est chargé de tenir les registres de la mairie et d'en donner des extraits.

    On dit de même, dans les places de guerre : secrétaire de la place ; et au palais, secrétaire du parquet.

  • 8Secrétaires du roi, officiers qui dressaient les lettres expédiées en chancellerie. La charge de secrétaire du roi anoblissait. Je t'entends, et je voi D'où vient que tu t'es fait secrétaire du roi, Boileau, Sat. X. C'est à un édit de cette année [1482, 22 décembre] qu'on doit rapporter la forme du collége des secrétaires du roi, telle à peu près qu'elle est aujourd'hui, Duclos, Œuvr. t. III, p. 316. Nicolas Malebranche naquit à Paris, le 16 août 1638, d'un secrétaire du roi, Diderot, Opin. des anc. philos. (Malebranchisme).
  • 9Secrétaire général de la marine, fonctionnaire placé près de l'amiral jusqu'en 1792, depuis 1795 près du ministre, et chargé d'attributions diverses dont la nature et le nombre ont souvent varié. Le sieur de Valincourt ayant été nommé secrétaire général de la marine, l'intention du roi est qu'à l'avenir vous lui adressiez les procédures des prises…, Lett. de Pontchartrain, 17 déc. 1692, dans JAL.
  • 10Anciennement, par plaisanterie, secrétaire de Saint-Innocent, écrivain public, celui qui écrit pour ceux qui ne savent pas écrire (jadis beaucoup d'écrivains publics se tenaient au cimetière des Innocents, à Paris). Dedans Saint-Innocent il se fit secrétaire ; Après, montant d'état, il fut clerc d'un notaire, Corneille, Illus. com I, 3.
  • 11Se dit de manuels contenant des modèles de lettres à l'usage des personnes qui n'ont aucune habitude de l'art d'écrire.
  • 12Bureau sur lequel on écrit, et dans lequel on serre des papiers. Secrétaire à cylindre. Forcer un secrétaire
  • 13Oiseau de l'ordre des rapaces, dit aussi messager, auquel le nom de secrétaire vient de la longue huppe raide qu'il porte à l'occiput, ce qui lui donne une grossière ressemblance avec les employés de bureau, qui avaient l'habitude, quand on se servait de plumes d'oie, de placer leur plume à leur oreille (falco serpentarius, L.).

HISTORIQUE

XIIIe s. Icist sains Jaques fu secretaires [ami particulier] nostre Seignor, Latini, Trésor, p. 71.

XIVe s. Que mau jour vous otroit [octroye] le [la] Vierge secretaire [confidente de Dieu], Baud. de Seb. I, 1018. …Sire, vous me deïstes, Quant secretaire me feïstes, Com nobles princes et entiers, Que vous m'aideriez volentiers, Se j'avoie necessité, Machaut, p. 78. Tous les eschevins, conseilliers et pairs s'en vont oudit eschevinage en leur lieu secretere [lieu de séance] ; et illecques assis ainsi que les sieges deportent…, Du Cange, secretum.

XVe s. Son chapelain qui lui estoit moult secretaire [confident d'un prince], Froissart, III, IV, 23. En telle maniere que vous dictes que je suis vostre secretaire [confident], dis-je que vous estes la mienne dessus toutes aultres, et pour ce vous diray je comment il m'en est, Perceforest, t. VI, f° 85.

XVIe s. Bois tristes et solitaires, De ma peine secretaires, Du Bellay, J. VII, 20, recto. Ces clers du secré furent contraints d'apporter une autre qualité au mot de secretaires, et s'appelerent secretaires des commandements, à la difference des autres ; ce qui fut continué en eux jusque vers la fin du regne de Henri II, lorsque nous traitasmes la paix avec Philippes roy d'Espagne vers l'an 1559, parce que ceux qui la negotierent, oyans que les secretaires des commandemens de l'espagnol s'appeloient secrestaires d'estat ; comme naturellement les François sont soucieux de nouveautez, nous quitasmes le mot de commandement en ces secretaires, et commenceasmes de les nommer secretaires d'estat, ainsi que nous les appellons encore aujourd'hui, ayans laissé ce qui estoit de nostre creu, Pasquier, Recherches, VIII, p. 681, dans LACURNE. Un brevet contre-signé de deux secretaires des commandements que l'on appelle aujourd'huy d'estat, Carloix, I, 32. Il [un seigneur breton retiré] oyt parler de son maistre une fois l'an, comme du roy de Perse, et ne le recognoist que par quelque vieux cousinage que son secretaire tient en registre, Montaigne, I, 333. Qui le prend en garde [un secret] le doibt tenir religieusement ; et, pour ce faire, estre bon secretaire, Charron, Sagesse, p. 491, dans LACURNE. Escoutez mon histoire… voilà Moulton qui a esté mon clerc ; mes successeurs usent de secretaires, d'autant qu'ils sont du monde, et nous n'en sommes plus, Moyen de parvenir, p. 69, dans LACURNE. En cette generale corruption de toutes bonnes façons, comme il n'y avoit jadis que les roys et princes souverains qui eussent des secretaires, et maintenant ils sont si abusivement communs à tous qui ont dos clercs pour escrire sous eux, Saint-Julien, Mesl. hist. p. 154, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Prov. secretari ; ital. secretario ; du lat. secretarius, de secretum, secret.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SECRÉTAIRE. Ajoutez :
14Celui qui a l'habitude d'écrire des lettres, synonyme d'épistolier. Feu M. du Maurier était un très habile homme, le meilleur secrétaire de son temps, et j'ai vu des lettres de lui pleines d'esprit et de jugement, Guez de Balzac, Lett. inédites, LXII, éd. Tamizey-Larroque.
15 S. f. Une secrétaire, une femme qui sert de secrétaire. Je mets dans votre troupe Mme du Janet et la secrétaire [Mlle Montgobert, qui écrivait souvent pour Mme de Grignan], Sévigné, à Mme de Grignan, 14 fév. 1680, dans Lett. inédites, éd. Capmas, t. II, p. 98.