« consentir », définition dans le dictionnaire Littré

consentir

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

consentir

(kon-san-tir), je consens, nous consentons ; je consentais ; je consentis ; je consentirai ; consens, consentons ; que je consente, que nous consentions ; que je consentisse ; consentant, consenti v. n.
  • 1Se rendre à un sentiment, à une volonté, à une obligation. C'était consentir en même temps à l'extinction de la religion, de l'alliance et du sacerdoce, Bossuet, Variat. 5e avertissement, § 24. Croyez-vous… Que ma foi, mon honneur, mon amour y consente ? Racine, Iph. IV, 6. Non, tu ne mourras point, je n'y puis consentir, Racine, ib. I, 1. Il pourra consentir à ce double hyménée, Corneille, Agésil. II, 5.

    Consentir à, avec l'infinitif. Et quelque grand malheur qui m'en puisse arriver, Je consens à me perdre afin de la sauver, Corneille, Cinna, II, 1. Peut-être à m'accuser j'aurais pu consentir, Racine, Phèd. IV, 5. Toutes les fois que l'on consent aux vraisemblances, on se met certainement en danger de se tromper, Malebranche, Recherches, VI, 1.

    Consentir de, avec l'infinitif. Fait si bien qu'à la fin sa compagne consent De lui prêter sa hutte, La Fontaine, Fabl. II, 7. Je puis me plaindre à vous du sang que j'ai versé, Mais enfin je consens d'oublier le passé, Racine, Andr. IV, 5. César lui-même ici consent de vous entendre, Racine, Brit. II, 1. Perrault l'antipindarique Et Despréaux l'homérique Consentent de s'embrasser, Boileau, Épigr. 29. D'autres consentent d'être gouvernés par leurs amis, en des choses presque indifférentes, La Bruyère, IV.

    Consentir avec que et le subjonctif. Mais je veux consentir qu'elle soit pour une autre, Molière, Mis. IV, 3. Elle consent [la Société de Jésus] qu'ils gardent leur opinion, pourvu que la sienne soit libre, Pascal, Prov. 1. Nous consentons que de tous les devoirs qu'il [l'Évangile] vous prescrit, vous ne vous croyiez obligés d'observer que ceux…, Massillon, Carême, Évidence de la loi. On consent que vous borniez là toute votre piété et que vous laissiez tout le reste comme douteux, Massillon, ib. Nous consentons que vous soyez le juge entre nous et l'incrédulité, Massillon, Carême, Doutes sur la rel. Le peuple, par déférence pour le sénat, consentit même qu'on rétablît le consulat, Vertot, Révol. rom. liv. VII, p. 189. S'il le faut, je consens qu'on lui parle de moi, Racine, Andr. IV, 1. Je consens que mes yeux soient toujours abusés, Racine, Phèd. V, 7.

  • 2 Terme de marine. Se courber sous un effort. Cette vergue a fortement consenti. Un vaisseau a consenti dans toutes ses parties pendant l'échouage, quand toutes les liaisons en sont larguées.
  • 3 Terme didactique. Participer, concourir à la production d'un résultat. Hippocrate a dit que tout, dans le corps humain, conspirait et consentait.
  • 4 V. a. Terme de droit. Consentir la vente d'une terre, un traité, une hypothèque. Consentir l'impôt. Pour contracter une société, toutes les parties la doivent consentir, Patru, Plaid. VI, dans RICHELET.

    Dans le langage général, accorder. Il [le trône] est à l'un de nous, si l'autre le consent, Corneille, Rodog. II, 4. Le consentiras-tu cet effort sur ma flamme ? Corneille, ib. III, 3. Partez, je le consens, Corneille, D. Sanche, IV, 5. Mais je mourrai plutôt que de consentir rien, Molière, D. Garcie, I, 5. L'amitié le consent, si l'amour l'appréhende, Corneille, Rod. IV, 1.

    PROVERBE

    Qui ne dit mot consent, c'est-à-dire, garder le silence, ne pas faire d'objection peut passer pour un consentement.

REMARQUE

1. L'usage constant des auteurs est de dire : je consens que… et non : je consens à ce que : ainsi, je consens que tu ailles, et non à ce que tu ailles.

2. Les grammairiens ont essayé de distinguer consentir à et consentir de, avec un infinitif, disant que consentir de veut dire ne pas s'opposer, et consentir à, donner son consentement, mais l'examen des exemples des auteurs ne permet guère de faire ces distinctions.

SYNONYME

CONSENTIR, ACQUIESCER. Consentir, c'est, étymologiquement, tomber d'accord. Acquiescer, c'est, étymologiquement, se mettre en repos à l'égard de quelque chose. Dans le consentement, il y a conformité de sentiment ; dans l'acquiescement il y a conformité de volonté. Un père consent au mariage de son fils. Un chrétien acquiesce à la volonté de Dieu.

HISTORIQUE

XIe s. Dist au paien : Deus tout mal te consente, Ch. de Rol. CXXII. Par ta mercit, se tei plait, me cunsent [accorde moi] Que…, ib. CCXXIV.

XIIe s. Se Deus [Dieu] de gloire repairer me consent, Ronc. p. 15. Ne lui font mal, car Dex ne leur consent, ib. p. 95. Consentez moi et droiture et honor, ib. p. 108. Et Diex pourquoi le consent [pourquoi Dieu y consent-il] Qu'il se veut si bien mentir [qu'on veuille mentir] ? Couci, IV. Quant de lui [d'elle] sont tuit mi penser, Moult me plaist ce que me consent [elle m'accorde], ib. p. 121. Sire, ce dist Girarz, se Dex le me consant, Jà d'endroit le message n'i perderez neant, Sax. XX. Par tut [il] li aidera là ù raisons consent, Th. le mart. 58.

XIIIe s. La bele lui respont : Ja Diex ne le consente, Qu'en soignentage [concubinage] soit usée ma jouvente, Audefroi le Bastard, Romancero, p. 22. Se nostre sire le velt consentir, Villehardouin, XII. Diex consent mainte gent traïson à fournir, Berte, LXIII. Je verrai se c'est voirs, se Diex l'a consenti [permis], ib. LXXXIX.

XIVe s. Si comme ceulz qui se consentent et tiennent une opinion des mouvemens du ciel ou d'autre speculacion, Oresme, Eth. 271.

XVe s. Nulle guerre entre elles [les villes de Flandre] ne se pouvoit mouvoir, si leur sire le comte ne le consentoit, Froissart, II, II, 52. Le comte a consentu, et sont issus de son hostel ceux ou aucuns qui ont fait si grand outrage, Froissart, II, II, 61. Il chargeoit ces gens l'avoir fait consentir au duc Philippe ceste restitution, Commines, I, 2. À quoy pour riens ceulx de la ville ne se fussent consentis, Commines, V, 14. Le dit duc Phelipe consentit estre mis sus [qu'on levât] de ses gens, Commines, I, 2. Dieu ne luy vouloit consentir ceste grace que de recevoir ce saige conseil, Commines, V, 8.

XVIe s. Si menterie en mes propos je mets, Je me consens qu'il face que jamais Je ne le voye, Marot, IV, 54. Les assemblées d'iceux sont conventicules profanes, avec lesquelles il ne seroit non plus licite de consentir, que de renoncer Dieu, Calvin, Instit. 843. Elle qui se consentoit d'estre trompée, Marguerite de Navarre, Nouv. VII. Euinenes n'y consentit, qu'Antigonus ne luy eust…, Montaigne, I, 26. Ce seroit faire tort à la bonté divine, si l'univers ne consentoit à nostre creance, Montaigne, II, 148. Homere a esté contrainct de consentir que Venus feust blecée au combat de Troye, Montaigne, III, 7. Ilz aimerent mieux luy consentir de bonne voulunté ce qu'il leur demandoit que d'attendre qu'ilz y fussent contraintz par force, Amyot, Thés. 28. Sagement il faut poiser ces choses et embrasser ce qui consent [est d'accord] à la parole de Dieu, Sleidan, f° 2. Plusieurs bestes et plantes estrangeres consentent de vivre parmi nous avec soin requis, De Serres, 458.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. consentir, cossentir ; espagn. consentir ; ital. consentire ; du latin consentire, de cum, et sentire, sentir, penser.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

CONSENTIR. Ajoutez :
5Être d'accord avec. Tous les biens ont même but, qui est de consentir à nature, Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne.
6 S. m. Le consentir. Ce n'est pas le sentir, mais le consentir qui nous rend coupables, Fénelon, Lett. spirit. 136.