« revers », définition dans le dictionnaire Littré

revers

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

revers

(re-vêr) s. m.
  • 1La partie, le côté opposé à ce qu'on est convenu de considérer comme le côté principal, le mieux fait, le plus naturel ou celui que l'on regarde le plus habituellement. Le revers d'une tapisserie. Le revers d'un coteau. Voyons qui de nous deux, plus aisé dans ses vers, Aura plus tôt rempli la page et le revers, Boileau, : Épît. II. Nous avons, au huit de mai, plus de cent pieds de neige au revers du mont Jura, Voltaire, Lett. d'Argental, 8 mai 1773. Les revers de l'Arabie heureuse sont, comme partout ailleurs, plus escarpés vers la mer d'Afrique, c'est-à-dire vers l'occident, que vers la mer Rouge, qui est à l'orient, Buffon, Add. théor. terr. Œuv. t. XII, p. 404.

    Fig. …ôtez d'entre les hommes La simple foi, le meilleur est ôté ; Nous nous jetons, pauvres gens que nous sommes, Dans les procès en prenant le revers, La Fontaine, Belph. Il est juste maintenant de considérer le revers des choses, et de montrer que l'histoire moderne pourrait encore devenir intéressante, si elle était traitée par une main habile, Chateaubriand, Génie, II, III, 5.

  • 2Le revers de la main, le côté opposé à la paume. Puis me donnant deux petits coups du revers de main sur la joue, il me dit d'être sage, Rousseau, Confess. II. Marthe ! dis-je, est-il vrai ? - Se levant à ma voix, Et s'essuyant les yeux du revers de ses doigts : Trop vrai ! Lamartine, Joc. prol.

    Un coup de revers, ou, simplement, un revers, coup porté avec le revers de la main. Ha ! que ne puis-je d'un revers Accompagner ces petits vers ! Scarron, Mazarinades, t. I, p. 296, dans POUGENS. Fort bien, pour châtier son insolence extrême, Il faut que je lui donne un revers de ma main, Molière, Tart. II, 2.

    Fig. Juges aveugles et précipités, que n'attendez-vous la fin du combat avant d'adjuger la victoire ? viendra le revers de la main de Dieu, qui brisera comme un verre, qui fera évanouir en fumée toute ces grandeurs que vous admirez, Bossuet, Sermons, Visitat. 3.

    Un coup de revers, un revers, signifie aussi coup donné de gauche à droite avec un instrument, avec une arme quelconque tenue de la main droite. Le héros d'un revers coupe en deux l'animal, La Fontaine, Fianc.

    Frapper de revers, frapper de gauche à droite avec une arme, un bâton, etc. que l'on tient de la main droite.

    Fig. Donner des coups de revers, donner des revers, faire manquer quelque chose, châtier quelqu'un. N'allez pas… Donner de vos revers au projet que je tente, Molière, l'Ét. II, 1. Quand on veut forcer la nature et Dieu même pour lui dire en face qu'on [les mystiques] ne se soucie pas du bonheur qu'on trouve en lui, il donne des coups de revers terribles à ceux qui osent lui dire que c'est là l'aimer, Bossuet, Lett. quiét. 270. Ce n'est pas qu'à mon tour je n'aie un nombre infini de désagréments, et que tous les jours ces femmes ne cherchent à renchérir sur ceux que je leur donne ; elles ont des revers terribles, Montesquieu, Lett. pers. 9.

    Un revers de satire, satire qui retombe sur celui qui l'a faite. Car enfin il faut craindre un revers de satire, Molière, Éc. des f. I, 1.

  • 3Revers de fortune, ou, simplement, revers, événement malheureux qui change une bonne situation en une mauvaise. Ce cœur si généreux rend si peu de combat, Et du premier revers la fortune l'abat ! Corneille, Cinna, IV, 6. Mais moi… Qui, d'emplois en emplois, vieilli sous trois sultans, Ai vu de mes pareils les revers éclatants, Racine, Bajaz. IV, 7. Les revers de la fortune épargnent souvent, lorsqu'on les craint le plus ; et souvent ils accablent, lorsqu'on les mérite et qu'on les prévoit le moins, Hamilton, Gramm. 8. Ce fut là le dernier de trente ans de revers, Voltaire, Zaïre, II, 1. Souvent la vie passagère de l'homme s'use dans les revers, Staël, Corinne, II, 3. Les revers ont soufflé sur la fleur de son âge, Masson, Helvét. VI.

    Demi-revers, revers, insuccès qui n'est pas complet. Si elle [une pièce] avait eu un plein succès, j'aurais déclaré qu'elle était de vous ; si elle avait eu un demi-revers, je l'aurais prise sur mon compte, Marmontel, Cont. mor. Connaiss.

  • 4Les revers d'un habit, les deux parties d'un habit qui se croisent sur la poitrine, et dont le haut est renversé. À ton revers j'admire une reprise, C'est encore un doux souvenir, Béranger, Mon habit.

    Se disait de la partie des manches qu'on retrousse, et qui s'appelle aujourd'hui parement.

  • 5Revers de botte, le haut de la tige d'une botte, lorsqu'il paraît se rabattre et montrer le côté du cuir qui n'est pas noirci. Bottes à revers.
  • 6Dans les monnaies et les médailles, le côté opposé à celui où est la tête. Le czar s'empressant de la ramasser [une médaille frappée devant lui à la Monnaie de Paris], il se vit gravé sur cette médaille, avec une Renommée sur le revers, posant un pied sur le globe, et ces mots de Virgile si convenables à Pierre le Grand : vires acquirit eundo, Voltaire, Russie, II, 8.

    Fig. Le loup paraît être modelé sur la même forme que le chien ; cependant il n'offre tout au plus que le revers de l'empreinte, Buffon, Morc. choisis, p. 233.

    Fig. et familièrement. Le revers de la médaille, le mauvais côté d'une chose, d'une personne.

    Le revers de la médaille, renversement où ce qui était en devant est mis en arrière. Nostradamus… a prédit dans ses vers, Qu'en l'an deux mil, date qu'on peut débattre, De la médaille on verrait le revers, Béranger, Nostrad.

    Toute médaille a son revers, toute chose a un mauvais côté.

  • 7Revers de pavé, partie inclinée du pavé, depuis les maisons jusqu'au ruisseau.

    Double revers, se dit d'une route ou d'une rue pavée qui a son ruisseau dans le milieu.

  • 8 Terme de fortification. Revers de la tranchée, côté opposé à celui qui regarde la place.

    Revers du fossé, bord extérieur opposé à celui de l'enceinte. Les Russes se firent tuer pendant une demi-heure sans quitter le revers des fossés, Voltaire, Charles XII, 2.

    On appelle quelquefois, mais improprement et par abus, revers de la tranchée, le côté extérieur du parapet.

    Revers de l'orillon, partie de l'orillon vers la courtine.

  • 9 Terme de guerre. On voit, on prend, on bat à revers ou de revers une troupe, un ouvrage de fortification, quand on est passé en arrière du prolongement du front ou de la face de cette troupe, de cet ouvrage. Ayant observé des endroits d'où l'on voit à revers une bonne partie de leurs dehors, Pellisson, Lett. hist. t. I, p. 301. Le prince de Conti prit à revers le retranchement du front, Saint-Simon, 12, 139. Il [le duc d'Orléans] acheva de découvrir sur les lieux à revers tout ce qu'il avait déjà aperçu en éloignement, Saint-Simon, 162, 132.

    Prendre de revers, occuper une position d'où l'on dirige obliquement son feu contre le dos de l'ennemi.

  • 10 Terme de marine. Manœuvres de revers, celles qui sont placées sous le vent.

    Partie de la muraille d'un bâtiment qui est en surplomb.

    Palan de revers, celui qui fait effort sur le garant d'un autre palan.

    Revers d'arcasse, portion de voûte de bois faite à la poupe d'un vaisseau, soit pour un simple ornement, ou pour gagner de l'espace.

    Revers de l'éperon, la partie de l'éperon comprise depuis le dos du cabestan jusqu'au dos de la cagouille.

HISTORIQUE

XVe s. Il demanda aux aultres deux s'ils vouloient jouster… telle fut leur adventure que Lyonnel les abatit à revers enmy la prée, Perceforest, t. II, f° 35. Le suppliant respondi à icellui Mace, qu'il faisoit que revers paillart, de ce qu'il l'appelloit revers gars, Du Cange, reversatus. Il montoit au revers d'une grande eschelle dressée contre un mur tout au plus hault, sans toucher des pieds, mais seulement sautant des deux mains ensemble d'eschelon en eschelon, armé d'une cotte d'acier, Boucic. I, 6. Mais je luy tranchy une jambe D'ung revers jusques à la hanche, Villon, Arch. de Bagn.

XVIe s. Ils se couvrent les testes aulcunes foys de bonnetz à quatre gouttieres ou braguettes ; aultres, de bonnetz à revers ; aultres, de mortiers, Rabelais, Pant. V, 11. Luy qui estoit advisé, tascha de s'asseurer par le revers de ce qui l'avoit cuidé ruiner, Amyot, Eum. 3. Je n'estime pas que… mais au revers je pense que…, Amyot, Com. refrén. la col. 26. Trois mil et plus les champs furent couvers Des corps meurdris de tailles et revers, Marot, J. V, 135. Le revers [l'opposé] de la verité a cent mille figures, Montaigne, I, 37. Ce nom lui sembla trop revers [dur, difficile à prononcer], Montaigne, I, 344. Tout ce qui vient au revers du cours de nature, Montaigne, IV, 287. Elle [Claude de France] donna un terrible revers à l'esperance du poure comte de Sault, et la renversa du tout, Carloix, VI, 37. Il jouoit très bien à la paulme ; aussi disoit on les revers de M. de Nemours, Brantôme, Cap. franç. t. III, p. 2, dans LACURNE.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. revers, inverse, rebours, envers ; espagn. reverso ; ital. riverso ; du lat. reversus, retourné, de re, et versus, tourné (voy. VERSION).

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

REVERS. Ajoutez :
11 Terme d'architecture. Revers d'eau, partie inclinée, en chanfrein, d'une corniche, d'une plinthe, d'un cordon, etc.
12Signature du revers, engagement par lequel les officiers français pris à Sedan ne partageaient pas le sort de leur troupe et restaient libres, mais s'obligeaient à ne pas reprendre de service contre la Prusse pendant toute la durée de la guerre ; on a expliqué cette expression, en s'appuyant sur ce que cette clause spéciale se trouvait sur le revers de la feuille contenant les conditions générales de la capitulation. Le général Lebrun : Cette clause était certainement attentatoire à l'honneur des officiers français, et elle a eu des conséquences déplorables pour les malheureux qui ont signé le revers… cette clause relative aux armes conservées ne concernait que les officiers qui consentaient à signer le revers, Gaz. des Trib. 14 fév. 1875, p. 150, 2e col.