« aider », définition dans le dictionnaire Littré

aider

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aider

(ê-dé)
  • 1 V. a. Donner de l'aide. Aider quelqu'un de ses conseils, de sa bourse. Ainsi donc aidez-moi. Il l'aida à sortir d'embarras. Cette méthode aide la mémoire. Le télescope aide les astronomes dans leurs découvertes. Parlez, mes frères, parlez ; je ne suis ici que pour aider vos réflexions, Bossuet, Anne de Gonz. Hercule, lui dit-il, aide-moi ; si ton dos A porté la machine ronde, Ton bras peut me tirer d'ici… Hercule veut qu'on se remue ; Puis il aide les gens…, La Fontaine, Fab. VI, 18. Comptez-vous pour rien de servir votre roi, de l'aider dans tous les biens qu'il veut faire et de rendre tant de peuples heureux ? Fénelon, Tél. XI. En quels lieux sommes-nous ? aidez mes faibles yeux, Voltaire, Zaïre, II, 3. Au lieu d'aider la grâce contre la tentation, vous aidez la tentation contre la grâce même, et vous détruisez celle-ci par l'autre, Bourdaloue, Carême, p. 229. Remettez à leurs bras les communs intérêts, Et n'aidez leurs desseins que par des vœux secrets, Corneille, Cinna, I, 2.
  • 2 V. n. Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir. Il parut sensible à l'attention que j'eus de lui aider à sortir du bateau, Rousseau, Prom. 2. Dans nos études, quand mon thème était fini, je lui aidais à faire le sien, Rousseau, Confess. liv. I. Serait-ce quelque chose où je vous puisse aider ? Molière, Méd. malgré lui, I, 5. Télémaque, voyant Mentor qui lui tendait la main pour lui aider à nager, ne songea plus qu'à sortir de l'île fatale, Fénelon, Tél. VII. J'aidai au Rhodien à se relever, Fénelon, Tél. v. Ils lui aidaient à tromper le roi, Fénelon, Tél. III. Les hommes ne peuvent par leurs délibérations établir aucun bien effectif, si les femmes ne leur aident à l'exécuter, Fénelon, t. XVII, p. 5. Dois-je demeurer auprès de mon fils pour avoir soin de ses affaires et lui aider à gouverner ses États ? Mme Dacier, Odyss. XIX. Il est toujours bien aise qu'on lui aide à se défaire de cette estime, Fléchier, Serm. I, 347. Le pape ne l'avait-il pas conjuré plusieurs fois de lui aider à porter le faix du monde chrétien ? Fléchier, Panég. I, p. 198. Nous [les prêtres] sommes à Dieu, appelés à lui aider, Fléchier, Serm. II, 254. Sans lui tendre la main et lui aider à sortir de cet abîme, Massillon, Car. Lazare. Ne point aider au mérite, faire servir la piété à son ambition, La Bruyère, 13. [Vous] Aiderez aux Romains à faire essai d'un maître, Corneille, Sertor. III, 2. Pour aider à mon frère à vous persécuter, Corneille, Nicom. I, 1.
  • 3En parlant des choses. Il fallait, en fuyant, ne pas abandonner Le fer qui dans ses mains aide à te condamner, Racine, Phèd. IV, 2. Par mon commandement, la garde en fait de même, Et, se tenant cachée, aide à mon stratagème, Corneille, Cid, IV, 3. Le meuble et l'équipage aidaient bien à la chose, La Fontaine, Fab. VII, 15. Découvrir quels sont en nous les penchants qui ont aidé aux occasions et facilité nos chutes, Massillon, Conf. Retr. curés. C'est une de ces choses à la vérité desquelles on est bien aise d'aider, et qui persuadent, parce qu'on y est favorable, Fontenelle, I, 25. Je ne sais où je vous ai vu ; votre mémoire aidera peut-être à la mienne, Fénelon, Tél. VIII.
  • 4Aider à la lettre, pénétrer un sens qui n'est pas manifeste. On comprend le passage, mais il faut aider à la lettre. Cette façon de parler vient de ce que, dans les manuscrits, il y avait des abréviations qu'il fallait déterminer par le sens. Au figuré, aider à la lettre, c'est ou bien entrer dans l'intention de celui qui écrit, qui parle, ou bien altérer la vérité soit pour tromper, soit pour amuser.

    Dieu aidant, avec l'aide de Dieu.

  • PROVERBES

    Aide-toi, le ciel t'aidera, c'est-à-dire, il faut soi-même s'évertuer.

    Dieu aide à trois sortes de personnes, aux fous, aux enfants et aux ivrognes.

    À qui se lève matin Dieu aide et prête la main.

  • S'AIDER, v. réfl.

  • 1Chacun s'aide soi-même. Je saurai m'aider.
  • 2S'aider de, se servir. Il s'aide de toutes ses armes. Qui ne peut s'aider de ses membres. [Il] Crut qu'il fallait s'aider de la peau du renard, La Fontaine, Fab. III, 3. On ne connaît point la hauteur d'une étoile ; elle est, si j'ose ainsi parler, immensurable ; il n'y a ni angles, ni sinus, ni parallaxes dont on puisse s'aider, La Bruyère, 16.
  • 3S'aider, s'assister réciproquement. Aidons-nous mutuellement, La charge des malheurs en sera plus légère, Florian, Aveugle et Paralyt. … mêlant nos douleurs, Nous nous aidions l'un l'autre à porter nos malheurs, Racine, Brit. I, 3.

REMARQUE

Aider veut la préposition à et l'infinitif : aider quelqu'un à payer ses dettes ; aidez-lui à soulever ce fardeau.

SYNONYME

AIDER à QUELQU'UN, AIDER QUELQU'UN. Les grammairiens ont essayé d'établir une distinction entre ces deux emplois, disant que aider à quelqu'un, c'est partager personnellement le travail, la peine de quelqu'un, tandis que aider quelqu'un est plus général et se dit de toutes les espèces d'aide. Mais, quand on examine la locution, Dieu aide aux fous et aux enfants, et la phrase de Bossuet. On doit s'aider les uns aux autres, il est clair que nulle différence n'est sensible. Et en effet, tout ce qu'il y a de différent, c'est que, dans l'un des cas, aider est verbe neutre, et dans l'autre, verbe actif.

HISTORIQUE

XIe s. Prudhon i ot pour son seigneur aider, Ch. de Rol. III. Et lui aidez et pour seigneur tenez, ib. XXVI. Si lui trouvez qui très bien lui aiut, ib. LX. Chrestientet aidez à soutenir, ib. LXXXVII. Respont li quens : Car lui alons aider, ib. CXXV. Contre Franceis [je] lui sui venut aider, ib. CLXXXIX. Dient Franceis : Dames Deus nous aït, ib. CCXLIII. Il s'escria : Aïez nous, Mahom, ib. CCLXVI. Aït vous Deus qui onques ne mentit, ib. CXXXVIII.

XIIe s. Celui aidiez et s'honneur li gardez, Roncisv. p. 18. J'en seroie aïdans, ib. p. 27. Se m'aït Dex, ib. p. 29. Si m'aiderez de [contre] Rollant le marquis, ib. p. 30. Guenes repond : Bien i poez aidier, ib. p. 35. Son bon auberc lui aident à vestir Si home liege, ib. p. 55. [Vous] Qui de baston en estor vous aidez, ib. p. 65. Les oz [armées] s'aprosment, Dex soit as nos [aux nôtres] aidans, ib. p. 135. Mout ovre [opère] bien cui dame Dex aïue, ib. p. 147. Quant du poing ne du bras [je] ne me puis plus aider, ib. p. 195. Diex ! quant crieront outrée, Sire, aidiez à pelerin, Pour qui [je] sui espouvantée ; Car felon sont Sarazin, Couci, Dame de Faiel. Ne nuls, fors vous, ne l'en peut bien aidier [aider en cet objet], Quesnes, Romancero, p. 102. Mais [que] cil en ait l'honeur cui Dex voudra aidier, Sax. IV. Bien lui sisrent [lui furent séantes] les armes, si s'en sut bien aidier, ib. IV. Se vostre homme vous vuelent par droite foi aidier, ib. VI.

XIIIe s. Et cil de Constantinoble leur venoient aidier en barges et en nés [nefs], Villehardouin, LXXII. Et cil qui l'avoient aidié à eschaper, Villehardouin, XLII. Or somes nous honis se nos ne leur aidons à prendre, Villehardouin, XLVIII. Onques gens ne se aidierent plus asprement sor mer, Villehardouin, XCVI. S'aidoient li uns l'autre contre les Arabis, Berte, v. L'autres fut fleüteres, mout s'en sut bien aidier, ib. X. Aïde Diex, fait-ele, qui feïs mer salée, ib. XLVI. Ha Diex ! disoit chascuns, Sainte-Marie aïue, ib. CXXXVIII. Et li apostoles le fist escumeniier par toute crestienté et tous ses aidans en toute maniere, Chr. de Rains, p. 157. Car art aide moult à nature, ib. 13804. Se de riens vous i puis aidier, Jà ne m'en quiers faire prier, ib. 2815. Li sous-aagiés se pot aidier de ce qu'il n'estoit pas en aage de fere creantement ne convenence, Beaumanoir, XII, 35. Voz jurés, se Dix vos ahit, et li saint, et les saintes paroles qui sunt en cest livre, Beaumanoir, XL, 6. Et moult de gent dient que le conte eust foulé la royne et le roy, se Dieu n'eust aidié au roy à cel besoing, Joinville, 202. Entre les autres, li manda que il estoit prest de li aidier à conquerre la terre sainte, et de delivrer Jherusalem de la main aus Sarrazins, Joinville, 211. Aides au droit, et soutien la querelle du poure jeusques à tant que la verité soit desclairiée, Joinville, 301.

XIVe s. Et avecques ce elle aide à faire et establir et composer loys humaines justes et proffitables, Oresme, Eth. Prol. Car fiance n'aront, selon m'entencion, Que li un doie l'autre aidier à son beson, Guesclin. 15776. … Dieu dit : Aide toy, je te aideray ; Ou ce senon, je te fauldray ; Car cilz qui aidier ne se veult En grant poverte enfin se treult [trouve], le Livre des trois Rois.

XVe s. Et, si Dieu m'aist, le courage m'en sied trop bien que nous en viendrons à notre dessus…, Froissart, I, I, 17. Et le convint retraire pour le vilain horion, et porter au logis, ainsi que celui qui ne se put depuis aider ni armer de grand temps, Froissart, I, 102. Malgré le propre roi et tous ses aidans, Froissart, I, I, 22. Le roy et son conseil monstroient de luy vouloir aider, Commines, VII, 1. Je ne pense pas que fussiez si peu courtois, que vous n'aidissiez à garder mon honneur, Louis XI, Nouv. XVIII.

XVIe s. Retirez-vous, et nous ayderons ici à Panurge, Rabelais, Pant. II, 25. Ainsi m'aid' Dieux, Marot, J. V, 244. Mais il [le roi aux échecs] est tant de vous fortifié, Que tous perdrons du mat l'intelligence, Aïdant Dieu, vous et ma diligence, Saint-Gelais, p. 80. Cela ayderoit à continuer, Montaigne, I, 15. Homme, pour n'estre aydé que de l'experience et du naturel, d'un jugement bien net, Montaigne, I, 256. Ils se sont aydez de l'eloquence plus que des armes, Montaigne, I, 380. Ma façon n'ayde rien à la matiere, Montaigne, III, 36. Il luy aida à gouverner et ordonner son royaume, Amyot, Num. 2. Le jour de devant il avait receu un coup de pied de cheval en la cuisse, et encore qu'il ne se peust pas bien aider, il se feit neantmoins amener un cheval, Amyot, P. Aem. 32. Sa langue lui estoit un util, dont il se sçavoit très bien aider à faire de belles et grandes choses, Amyot, Arist. et Caton comp. 4. Aristides aida Themistocles son ennemy capital en ses plus beaux actes, Amyot, ib. 11. Si luy pria de la vouloir aider à faire la cuisine, Amyot, Philop. 3. La fortune aide aux hommes courageux, Ronsard, 601. Un gentil cœur aide tousjours autruy, Ronsard, 640.

ÉTYMOLOGIE

Picard, aidier ; Berry, aïder, ajider ; provenç. adjudar, ajudar, agudar ; espagn. ayudar ; ital. aiutare (voy. AIDE). On dit souvent à Paris et dans les environs aïder en trois syllabes. Ménage, qui a noté aussi cette prononciation, recommande de prononcer aider en deux syllabes.