« sauver », définition dans le dictionnaire Littré

sauver

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Fac-simile de l'édition originale du Littré (BNF)

sauver

(sô-vé) v. a.
  • 1Tirer hors de péril, mettre en sûreté, avec un nom de personne ou objet personnifié pour régime direct. Josué sauva Rahab courtisane, et la maison de son père avec tout ce qu'elle avait, Sacy, Bible, Josué, VI, 25. Quand il [Dieu] voulut sauver la ville de Béthulie, Bossuet, Reine d'Anglet. Vous verrez avec quelle prudence elle traitait les affaires ; et une main si habile eût sauvé l'État, si l'État eût pu être sauvé, Bossuet, ib. Comment est mort cet homme puissant qui sauvait le peuple d'Israël ? Fléchier, Turenne. Lorsque avec jugement et avec fierté il sauvait les restes des troupes battues à Mariendal, Fléchier, ib. Sauvons-le malgré lui de ce péril extrême, Racine, Baj. IV, 7. Tout est perdu, seigneur, si vous ne nous sauvez, Racine, Iphig. III, 7. Tout ce que peut faire un grand homme d'État et un grand capitaine, Annibal le fit pour sauver sa patrie, Montesquieu, Rom. 5. Les Romains, ajoutait-il [Napoléon], donnaient des couronnes civiques à ceux qui sauvaient des citoyens ; le duc de Trévise [laissé à Moscou] en méritera autant qu'il sauvera de soldats, Ségur, Hist. de Nap. IX, 6.

    Avec un nom de chose pour régime direct, et de personne pour régime indirect. Vous m'avez sauvé l'honneur. Qu'il eût volontiers sauvé la vie au brave comte de Fontaines ! mais il se trouva par terre parmi ces milliers de morts dont l'Espagne sent encore la perte, Bossuet, Louis de Bourbon. N'y aurait-il pas moyen de me sauver les deux cent mille francs ? je vous parle à cœur ouvert, Marivaux, le Legs, 10.

  • 2Être cause de salut, en parlant d'une chose qui sauve. L'opération sauva le patient. Merci voit sa perte assurée ; ses meilleurs régiments sont défaits ; la nuit sauve les restes de son armée, Bossuet, Louis de Bourbon.
  • 3Il se dit simplement pour préserver. N'attaquez plus ma gloire avec tant de douleurs, Et laissez-moi sauver ma vertu de vos pleurs, Corneille, Hor. II, 5. Quelque maligne joie en son cœur s'élevait, Dont sa gloire indignée à peine le sauvait, Corneille, Pomp. III, 1. Sauve-moi de l'affront de tomber à leurs pieds, Corneille, Rodog. V, 4. Sauvez-moi des Romains, je suis encore à vous, Corneille, Sophon. III, 6. Je m'en vais… me disposer à faire demain mes pâques : il faut au moins tâcher de sauver cette action de l'imperfection des autres, Sévigné, 15 avr. 1672.

    Sauver de, avec un infinitif. La reine a sauvé la folle [une femme qui passait pour folle] d'être chassée, Sévigné, 22 octobre 1677.

  • 4Procurer le salut éternel. Sauver son âme. Il n'y a rien ici de rude pour elle, puisque Dieu la sauve par le même coup qui nous instruit, Bossuet, Duch. d'Orl. Je viens, dit Jésus-Christ, comme un voleur… comme un voleur, dites-vous, indigne comparaison ? n'importe qu'elle soit indigne de lui, pourvu qu'elle nous effraye, et qu'en nous effrayant elle nous sauve, Bossuet, Mar.-Thér. Pour être sauveur, rien ne lui paraît [à Jésus] difficile ; pour être sauvés, tout nous devient impossible, Bourdaloue, Myst. Circoncision de J. C. t. I, p. 67.
  • 5Empêcher d'être perdu. Le navire a échoué, on a sauvé les marchandises. Prends soin, je te prie, de m'en sauver le plus que tu pourras [des plats servis à table], pour le renvoyer au marchand, Molière, l'Avare, III, 15. J'y trouvai [dans la rue, pendant un incendie]… plusieurs meubles et vaisseaux d'argent qu'on sauvait chez lui [l'ambassadeur de Venise], Sévigné, 20 févr. 1671. Voulez-vous sauver quelque chose de ce débris si universel, si inévitable ? donnez à Dieu vos affections, Bossuet, Duch. d'Orl. Et tout ce que des mains de cette reine avare, Vous avez pu sauver et de riche et de rare, Donnez-le…, Racine, Ath. V, 1.

    Il se dit des personnes en un sens analogue. Le roi son fils n'a rien trouvé de plus ferme dans son service que ces catholiques si haïs, si persécutés, que lui avait sauvés la reine sa mère, Bossuet, Reine d'Anglet.

    Fig. Vouloir sauver la chèvre et le chou, vouloir ménager des intérêts différents ou opposés.

  • 6Sauver une chose à quelqu'un, faire qu'il ne la subisse pas. Je vous le dis encor, sauvez-moi cette honte, Corneille, Théod. III, 5. Troïle est utile à ceux qui ont trop de bien… il leur sauve la peine d'amasser de l'argent, La Bruyère, V. Nous ne manquerons pas de joueurs, sur ma parole ; et ton mari nous sauvera les amendes, Dancourt, Bourg. à la mode, III, 7. Cela suffit ; je vais vous sauver sa visite, Destouches, Philos. marié, I, 4. Est-ce qu'on désoblige Madame quand on lui rend service, et qu'on lui sauve les reproches de toute sa famille ? Marivaux, Marianne, part. VII. Je lui ai sauvé la Bastille [au libraire Jore] ; mais je n'ai pas été fort éloigné d'y aller moi-même, Voltaire, Lett. Formont, 10 déc. 1731. Il devint pour moi une espèce de gouverneur qui me sauva beaucoup de folies, Rousseau, Confess. V. Au toit du pauvre il [le chansonnier Béranger] répand l'allégresse, à l'opulence il sauve des ennuis, Béranger, Tailleur.

    En cet emploi, on dit souvent aussi éviter ; c'est mal parler (voy. la REM. à ÉVITER).

  • 7Conserver intact. On sauve en quelque façon la suite de l'histoire sainte, Bossuet, Hist. I, 7. Et je tâche en fuyant de sauver mon devoir, Quinault, Pausan. I, 7. Les dernières paroles de l'empereur à Lauriston furent [à Moscou] : Je veux la paix, il me faut la paix, je la veux absolument ; sauvez seulement l'honneur, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 9.
  • 8Justifier. Quelque excuse qu'on allègue, on ne peut sauver cette action. Qui peut croire que M. de Paris, que M. de Chartres, avec qui je suis uni dans tous les actes publics, me fussent contraires en secret, jusqu'à détourner M. de Cambrai d'approuver mon livre, qu'ils ont eux-mêmes approuvé, jusqu'à s'unir pour sauver le sien qu'ils rejetaient avec moi comme plein d'erreurs ! Bossuet, Remarques sur la réponse de M. de Cambrai, avant-propos. Il sauvait son ignorance par un aveu libre et ingénu, qui, pour dire le vrai, ne devait pas coûter beaucoup à un homme plein de talents, Fontenelle, Renau.
  • 9Pallier, masquer ce qu'il y a de défectueux. Ils ont travaillé à sauver les inconvénients de ce système, Bossuet, Variat. Préf. Voyez que l'on vous amuse, non-seulement en vous proposant des questions hors de propos, mais encore en sauvant une erreur par une autre, au lieu de les condamner toutes deux, Bossuet, 2e instr. pastorale, 11. C'est qu'un abîme en attire un autre ; on ne tombe dans ces excès que pour sauver d'autres excès où l'on était déjà tombé, Bossuet, Var. XV, 81. Les anciens avaient imaginé je ne sais combien de cercles différemment entrelacés les uns dans les autres, par lesquels ils sauvaient toutes ces bizarreries [résultant de l'opinion que la terre était au centre du mouvement des corps célestes], Fontenelle, les Mondes, 1er soir. Virgile …dans ses Géorgiques, où il sauve le fond de sa matière, qui est tout à fait sèche, par des digressions fréquentes et souvent fort agréables, Fontenelle, Mond. Préf. On ne pouvait excuser de telles promesses [de Louis XII à Maximilien] que par le dessein de ne les pas tenir ; c'était sauver une imprudence par une honte, Voltaire, Ann. Emp. Maximilien, 1504. Le plus grand effort de l'art consiste souvent à sauver la difficulté, Diderot, Pensées sur la peint. Œuv. t. XV, p. 175 dans POUGENS. Où tout doit être pressenti, préparé, sauvé, montré, annoncé, Diderot, Salon de 1767, Œuv. t. XIV, p. 128. Ces hardiesses [en poésie], lorsqu'elles sont bien sauvées, comme les dissonances en musique, font un effet très brillant, Chateaubriand, Génie, II, I, 3.

    Sauver une contradiction, concilier deux passages, deux propositions contraires.

    Sauver les défauts de la taille d'une personne, cacher, par la manière de l'habiller, quelque défaut qui est dans sa taille.

  • 10 Terme de musique. Sauver une dissonance (voy. DISSONANCE).
  • 11 Terme de scolastique. Sauver les apparences, expliquer les phénomènes selon les principes de quelque hypothèse.

    Fig. Sauver les apparences, ne rien laisser paraître au dehors qui puisse blesser ou scandaliser. Tous ceux qui ont passé le Styx après moi m'ont assuré que tu n'as pas même sauvé les apparences, Fénelon, Dial. des morts anc. Romulus, Tatius. Pourquoi cherchez-vous toujours à mettre quelques raisons spécieuses de votre côté … et sauver, pour ainsi dire, encore les apparences avec Jésus-Christ ? Massillon, Carême, Salut.

    On dit dans un sens analogue : Sauver les dehors. Que tu perds lâchement de ruse et d'artifice, Pour… sauver les dehors d'une adroite vertu, Dont aux yeux éblouis tu parais revêtu ! Corneille, Perthar. IV, 4.

  • 12 Familièrement. Sauver le premier coup d'œil, ne pas laisser paraître l'étonnement, l'impression désagréable que cause la première vue d'une personne laide ou mal faite.

    Il faut sauver le premier coup d'œil, se dit d'une personne qui ne plaît pas au premier aspect, mais qui plaira quand on l'aura vue davantage. Le roi avait une impatience extrême de savoir comme elle [la Dauphine] était faite ; il envoya Sanguin comme un homme vrai et qui ne sait pas flatter : Sire, dit-il, sauvez le premier coup d'œil, et vous en serez fort content, Sévigné, 13 mars 1680.

  • 13Au jeu de paume, sauver la grille, sauver le dedans, parer les coups qui poussent la balle dans la grille ou dans le dedans.

    Sauver à quelqu'un la grille, le dedans, lui faire l'avantage de ne pas compter ce que l'on gagne quand on place la balle à la grille ou au dedans.

  • 14 Terme de jeu de billard. Sauver à quelqu'un une blouse, deux blouses, etc. lui faire l'avantage de ne pas compter les points que l'on gagne en faisant la blouse, les deux blouses, etc.
  • 15 Terme de jeu de trictrac. Sauver la bredouille, empêcher l'enfilade.
  • 16Se sauver, v. réfl. Se mettre en sûreté, à l'abri. Se sauver d'un péril. Sauvez-vous d'une vue à tous les deux funeste, Corneille, Poly. II, 2. Plus cruel que les Lombards même, il [Constant] ne vint à Rome que pour en piller les trésors : les églises ne s'en sauvèrent pas, Bossuet, Hist. I, 11. Après s'être sauvée des flots, une autre tempête lui fut presque fatale : cent pièces de canon…, Bossuet, Reine d'Anglet. J'adorerais un dieu sans force et sans vertu, Reste d'un tronc par les vents abattu, Qui ne peut se sauver lui-même ? Racine, Esth. II, 9. Quoi ! Pyrrhus, je te rencontre encore… Percé de tant de coups, comment t'es-tu sauvé ? Racine, Andr. V, 5. C'est une étrange chose que l'amour, répondit-elle en riant ; il se sauve de tout, il n'y a point de système qui lui puisse faire du mal, Fontenelle, Mond. 5e soir.

    Se sauver de quelqu'un, échapper à son souvenir qui nous obsède. Je ne sais où me sauver de vous ; notre maison de Paris m'assomme encore tous les jours, et Livry m'achève, Sévigné, à Mme de Grignan, 24 mars 1671.

    Se préserver. Une âme de rocher ne s'en fût pas sauvée [d'aimer une belle femme], Corneille, le Ment. II, 5. Ils se sauvent tout ensemble de la folie et de l'erreur, Pascal, Prov. II. La reine s'est sauvée de ces défauts, Fléchier, Mar.-Th. Charles de Sainte-Maure se sauva, par la miséricorde de Dieu, de cette corruption commune [ne pas se dire la vérité les uns aux autres], Fléchier, Duc de Mont. Tant il est difficile aux plus grands hommes et même aux plus modestes, de se sauver des illusions de l'amour-propre, Voltaire, Œdipe, lett. 4. Perdre sa jeunesse, sa beauté, ses passions, c'est le vrai malheur ; voilà pourquoi tant de femmes se font dévotes à cinquante ans, et se sauvent d'un ennui par un autre, Voltaire, Dial. 3.

  • 17Faire son salut éternel. En sauvant le prochain, vous vous sauverez vous-même, Bourdaloue, 4e dim. après Paq. Dominic. t. II, p. 63. S'engageant dans ces emplois avec une incapacité absolue, comment pourra-t-il s'y sauver ? Bourdaloue, Dim. de la Septuagés. Dominic. t. I, p. 371. Peu de gens se sauvent, parce qu'on ne peut comprendre dans ce nombre que deux sortes de personnes : ou celles qui ont été assez heureuses pour conserver leur innocence pure et entière ; ou celles qui, après l'avoir perdue, l'ont retrouvée dans les travaux de la pénitence, Massillon, Carême, Petit nomb. des élus.
  • 18Se tirer d'embarras. La cour romaine se sauvait par des équivoques, Voltaire, Mœurs, 48.
  • 19S'échapper. Il se sauva de prison. Vous allez voir par la nouvelle d'aujourd'hui, comme le roi d'Angleterre s'est sauvé de Londres, apparemment par la bonne volonté du prince d'Orange, Sévigné, 503. Je ne te retiens plus, sauve-toi de ces lieux, Racine, Andr. IV, 5. On a trouvé une clef en dedans de la petite porte du parc, par où sans doute elle s'est sauvée ; ainsi tout prouve que c'est sans violence, Genlis, Théât. d'éduc. Zélie, V, 10.

    Se sauver à la nage, s'échapper en nageant. Je me sauve à la nage et j'aborde où je puis, Boileau, Disc. au roi.

    Fig. et familièrement. Se sauver à travers les broussailles, se sauver par les vignes, par les marais, se tirer d'embarras comme on peut.

  • 20Prendre la fuite. Se sauver à toutes jambes. Un soldat qui se sauve quand il faut combattre est puni, Voltaire, l'H. aux quarante écus, sur les moines.

    Elliptiquement, sauve qui peut, se sauve, se tire du péril qui pourra. Les premiers qui dans l'aile de gauche de Miranda crièrent sauve qui peut et la débandèrent…, Louvet de Couvray, Mém. p. 67, dans POUGENS.

    Fig. Le duc de Villeroi a écrit ici des lettres dans le transport de sa douleur, qui sont d'une telle force qu'il les faut cacher ; il met au premier rang de toute sa fortune d'avoir été aimé de ce héros [Turenne], et déclare qu'il méprise toute autre sorte d'estime après celle-là : sauve qui peut, Sévigné, 204. Quelquefois de fâcheux arrivent trois volées, Qui du parc à l'instant assiégent les allées ; Alors sauve qui peut…, Boileau, Ép. VI. Ce monde-ci est un vaste naufrage ; sauve qui peut ; mais je suis bien loin du rivage, Voltaire, Lett. Cideville, 28 janv. 1754.

    Substantivement. Ce fut un sauve-qui-peut général (avec traits d'union).

  • 21 Familièrement. Se retirer promptement. En passant par devant la chambre d'Angélique, j'ai vu un jeune homme avec elle, qui s'est sauvé d'abord qu'il m'a vue, Molière, Mal. imag. II, 10. Mon Dieu, je me sauve, il est midi trois quarts, Genlis, Théâtre d'éduc. Tendresse matern. sc. 2. Je ne veux pas être témoin de ce que vous allez lui dire ; je me sauve, Picard, Manie de briller, II, 16.
  • 22Se réfugier en un lieu, y chercher un asile. Pendant que le choléra était à Paris, nous nous sauvâmes à la campagne. Toute l'Irlande est au roi [Jacques II], il eût bien fait de s'y sauver, Sévigné, 513. Déjà prenait l'essor, pour se sauver dans les montagnes, cet aigle dont le vol hardi avait d'abord effrayé nos provinces, Fléchier, Turenne.
  • 23Se dédommager. Un marchand qui vend à bas prix, se sauve sur la quantité. André : Hélas ! je suis fils d'un paysan, je l'ai été moi-même. - Hassan : Bon ! c'est sur ceux-là que je me sauve, Chamfort, Marchand de Smyrne, sc. 10.

SYNONYME

SAUVER QUELQUE CHOSE à QUELQU'UN, ÉPARGNER QUELQUE CHOSE à QUELQU'UN. Sauver, épargner quelque chose à quelqu'un, c'est l'en dispenser, l'en préserver. Ces deux locutions ont un sens extrêmement voisin. La seule nuance qu'on y remarque, c'est que épargner implique davantage l'idée de ménagement, et sauver celle de préservation.

HISTORIQUE

IXe s. Si salvarai eo [je] cist meon fradre Karlo, Serment.

XIe s. [Qu'ils] Salvent le rei e gardent la reïne, Ch. de Rol. CXCI.

XIIe s. Mais ore en convenoit un sul à mort livrer Al piler del mustier, pur le pueple salver, Th. le mart. 149. Por pecheors salver e mettre à salvaison, Rou, V. 4407. Il salt [qu'il sauve] Marsile et son barnage, Ronc. p. 121.

XIIIe s. Hé las ! se nuls se doit sauver [faire son salut] dolans, Quesnes, Romancero, p. 93. Si celui qui fait hommage, si comme est dessus dit, ou chief seignor, a fait avant hommage en ligesse à homme ou à femme, qui ne soit homme dou chief seignor, il le doit sauver [réserver] à l'hommage faire, pour ce que nul qui est homme d'autruy ne peut après faire hommage à autre, se il ne sauve son premier seignor, Du Cange, salvare. Li filz Dieu glorieus, par li sien nom saintisme, Me doint, se il li plaist, par toute ceste rime, Li loer, moi sauver, edefier mon prisme [prochain], J. de Meung, Test. 31.

XIVe s. Aussi comme se superhabundance et deffaute corrumpissent la bonté de l'œuvre et le moien [le juste milieu] la salvast, Oresme, Eth. 44.

XVe s. Saulve soy qui peult, Gerson, Harangue au roi Charles VI, p. 17.

XVIe s. Il feut impossible de la sauver [elle en mourut], Montaigne, I, 101. Pour se sauver de continuelles et curieuses recherches qu'on faiseit de luy, Montaigne, I, 138. C'estoit à se saulve qui peuit, Carloix, V, 25. Quelques Troyens, s'estant sauvez de l'espée, s'embarquerent sur des vaisseaux qu'ilz trouverent d'adventure au port, Amyot, Rom. 1. Si n'y eut rien qui la sauvast qu'elle ne fut promptement mise à mort que les prieres de la fille du roy, Amyot, ib. 4. Si par cas d'adventure elles [les vestales] rencontrent quelque pauvre criminel que l'on mene à la mort, elles luy sauvent la vie, Amyot, Numa, 18. Il se jetta dedans la riviere du Tybre, et se sauva à nage jusques à l'autre rive, Amyot, Public. 32. Quant à ses biens, ses amis en destournerent et sauverent une bonne partie, Amyot, Thém. 48. Les uns se sauverent de vistesse… ilz [les Romains] envoyerent ceulx qui s'estoient sauvez à fouir, en la Sicile, Amyot, Marcell. 18. En quoi faisant, il sauva la ville d'estre saccagée, Amyot, Flamin. et Philop. 6. Les larmes de l'enfant eussent sauvé la mere ! Ronsard, 673. L'empoisonneur se sauva à la fuitte, et ainsi fut-il descouvert, Grevin, Impost. des diables, 50.

ÉTYMOLOGIE

Wallon, sâvé ; provenç. et espagn. salvar ; ital. salvare ; du lat. salvare, dénominatif de salvus, avec le sens causatif.