« office », définition dans le dictionnaire Littré

office

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office [1]

(o-fi-s') s. m.
  • 1Devoir de la vie. Le ciel plus propice M'envoie un compagnon en ce pieux office, Corneille, Pomp. V, 1. Il [le roi] m'envoie Faire office vers vous de douleur et de joie, Corneille, Hor. IV, 2. Si votre main puissante Voulait favoriser jusqu'au bout deux mortels, Ensemble nous mourrions en servant vos autels ; Clothon ferait d'un coup ce double sacrifice ; D'autres mains nous rendraient un vain et triste office, La Fontaine, Phil. et Bauc. On vit tomber de leur propre poids ces mains fatales à l'erreur [scellant la révocation de l'édit de Nantes] qui ne devaient plus servir à aucun office humain, Fléchier, le Tellier. N'est-ce pas la foi qui conduisit madame la Dauphine dans tous les offices de la vie chrétienne ? Fléchier, Dauphine. Vous le savez, pieuse confidente de ses aumônes secrètes [Mme de Miramion], qui lui rendez aujourd'hui les offices publics d'une sainte amitié…, Fléchier, Lamoignon. La probité dans les offices de la vie civile, Fléchier, I, 273.

    S. m. pl. Les Offices, livre de Cicéron, traitant des devoirs. Ajoutons que nous n'avons aucun traité de morale qui approche de ses Offices [de Cicéron] ; et ce n'est pas faute de liberté que nos auteurs modernes ont été si au-dessous de lui en ce genre, Voltaire, Triumvirat, notes. On n'a pas besoin de savoir les Offices de Cicéron pour être honnête homme, Rousseau, Ém. V.

  • 2Fonction, rôle, destination. C'est l'office d'un roi d'en purger sa contrée [des vices], Garnier, Bradam. I, 2. Il y a fait l'office de juge, Corneille, Hor. Examen. À quel étrange office, amour, me réduis-tu ? De faire accueil au vice et chasser la vertu ? Rotrou, Vencesl. I, 2. Les trois que Dieu destine à ce pieux office, Boileau, Lutr. I. Lui-même [Dieu] il nous traça son temple et son autel, Aux seuls enfants d'Aaron commit ses sacrifices, Aux lévites marqua leur place et leurs offices, Racine, Ath. II, 4. Les femmes allument du feu et se distribuent dans les différents offices dont elles étaient chargées, Fénelon, t. XXI, p. 468. D'un office d'ami simplement je m'acquitte, Regnard, Fol. amour. III, 2. Vous pouvez m'employer, monsieur, à tout office, Regnard, Ménechmes, II, 2. Son office [de la pénitence] est de rétablir dans l'état naturel ce que le péché avait renversé, Massillon, Panégyr. Magd. Les esclaves [chez les Germains] n'avaient point d'offices dans la maison ; ils rendaient à leur maître une certaine quantité de blé, Montesquieu, Esp. XV, 10.

    Faire son office, produire l'effet naturel. Le sang fait son office et le roi s'attendrit, Rotrou, Vencesl. V, 3. Scapin : La tendresse paternelle fera son office. - Argante : Elle ne fera rien, Molière, Fourber. I, 6.

    Faire office de, l'office de, tenir lieu, remplacer. L'âne à messer lion fit office de cor, La Fontaine, Fabl. II, 19. Nous l'avons vu, frappé de ces murmures importuns qui interrompent les oraisons des fidèles et troublent dans la maison de Dieu le vénérable silence des saints mystères, se lever avec indignation, et, faisant l'office des anciens diacres de l'Église, ordonner qu'on fléchît les genoux, Fléchier, Duc de Mont. Tant d'autres malheureux dont j'ai causé les maux Font déjà dans mon cœur l'office des bourreaux, Racine, Théb. V, 6. Les juges [de la vehme] prononçaient sans jamais confronter les témoins et l'accusé, souvent sans les interroger ; le plus jeune des juges faisait l'office de bourreau, Voltaire, Ann. Emp. Charlemagne, 788.

    Faire l'office de, suffire pour mettre à effet. Tirons au sort, c'est la justice, Deux pailles en feront l'office, La Fontaine, Joc. Hélas ! il ne me faudrait guère prier pour me faire pleurer présentement [pour le départ de Mme de Grignan] : un tour de mail sur le soir en ferait l'office, Sévigné, 21 oct. 1671.

  • 3Bureau. Il existe à Paris plusieurs offices de publicité, de correspondance, etc. Les correspondances internationales tombées en rebut doivent être rendues, sans frais, à l'office expéditeur, Commiss. internat. des postes, Paris 1863, p. 140.
  • 4 Terme de diplomatie. Avis, message, pièce. Tous les offices que j'avais passés sur ce sujet… cette légation n'avait point d'autre cause que de passer des offices en faveur des Vaudois, M. de Bordeaux, envoyé auprès de la reine d'Angleterre, dans GUIZOT, Hist. de la rép. d'Anglet. t. II, p. 591 et 592.
  • 5Assistance, service. Ce malheur me rend un favorable office, Corneille, le Ment. I, 2. À moi bien plus qu'à lui vous rendiez cet office : Vous sauviez Antigone en sauvant Polynice, Rotrou, Antig. I, 4. Vous me rendrez un merveilleux office, La Fontaine, Mandr. Mme de Vins nous servira dans cette maison [de Pompone] ; sans cela, je vous avoue que je serais inconsolable de vous priver des petits offices que je vous pourrais rendre, Sévigné, 26 juill. 1675. Il me semble que, si j'étais avec vous, je lui rendrais [à sa petite-fille Pauline] de grands offices, rien qu'en redressant un peu votre imagination, Sévigné, 22 févr. 1689. Un fils consacré à Dieu… s'acquitte courageusement de son devoir [avertir son père de l'approche de la mort]… il trouve ce qu'il espérait, un chrétien préparé à tout, qui attendait ce dernier office de sa piété, Bossuet, le Tellier. Le ministre… en faisant connaître les hommes capables de remplir les grandes places, et en leur rendant à propos des offices qu'ils ne savaient pas, Bossuet, ib. Les a-t-il jamais amusés [ses amis] par des caresses, quand ils ont attendu de lui des offices effectifs ? Fléchier, Duc de Mont. Un fils osa rendre ce triste office à son père [l'avertir de sa mort prochaine], Fléchier, le Tellier. Mes mains ne purent lui refuser ce cruel office, Fénelon, Tél. X.

    Faire office, s'est dit pour rendre de bons offices, s'employer pour. Le plus qu'il [un prince] pouvait, c'était de recommander ses serviteurs à son favori, et de faire office pour ceux qu'il aimait, Guez de Balzac, De la cour, 7e disc.

    Bon office, service, assistance. Je vous devrai beaucoup pour un si bon office, Corneille, Hor. IV, 2. Je me suis donc rendu moi-même un bon office, Corneille, le Ment. V, 4. Je vous prie de me rendre vos bons offices, c'est ainsi qu'il faut s'exprimer en pareil cas, non-seulement avec ceux qui sont au-dessus de nous, mais même avec nos égaux, Caillères, Bon et mauvais usage, p. 68, dans POUGENS. Tout oser pour rendre de bons offices, Hamilton, Gramm. 5. Il vous offre ses bons offices auprès du roi de France, Hamilton, ib. 7. Vos bons offices pour lui sont un bienfait pour moi ; souffrez que je partage la reconnaissance, Voltaire, Lett. en vers et en prose, 58.

    En un sens opposé. Mauvais office, action, parole destinée à desservir quelqu'un, à lui nuire. S'il me rend près de vous tant de mauvais offices, Rotrou, Vencesl. I, 1. Il n'y a point de mauvais offices qu'elle n'ait tâché de rendre à l'un et à l'autre, Sévigné, 14. Je ne vous ai point rendu de mauvais offices auprès du roi, Maintenon, Lett. à M. de Villette, 9 avril 1682. Pour prévenir les mauvais offices qu'il avait à craindre, Fénelon, Tél. XII.

  • 6 Anciennement. Certains emplois, certaines charges avec juridiction. Création d'offices. Suppression d'offices. L'office de chancelier, de connétable. Un office de judicature. Un office de finance. Je sais combien d'argent vous coûte votre office, Et comment aujourd'hui s'exerce la justice, Boursault, Mots à la mode, sc. 1. Le mot de charge ne doit point exclure celui d'office, quoiqu'ils signifient la même chose ; on dit un office de la maison du roi, un office de judicature, un office de finance, Caillères, Bon et mauvais usage, p. 65, dans POUGENS. Se priver de quelques terres était peu de chose ; renoncer aux grands offices, c'était perdre la puissance même, Montesquieu, Espr. XXXI, 7. Un office qu'il [le souverain] vend est proprement un emprunt dont il paye l'intérêt sous le nom de gages, Condillac, Comm. gouv. II, 11. Les titres de duc, de comte, étaient d'abord des offices à vie, Voltaire, Mœurs, 98. Des roturiers qui avaient acheté chèrement des offices, Voltaire, Russie, II, 7. Ils n'ont, dit-il [Commines], souci de rien, parlant des Français de son temps, sinon d'offices et états… les choses ont peu changé ; seulement cette convoitise des offices et états, curée autrefois réservée à nobles limiers, est devenue plus âpre encore, depuis que tous y peuvent prétendre, Courier, Lettre II.

    Charge de la maison du roi et des princes. Les offices de la chambre, de la garde-robe.

    En titre d'office, et, plus ordinairement, à titre d'office, avec la qualité que donne un office. L'un en titre d'office exerçait un brelan, Régnier, Sat. X. Au temps de Charlemagne, il y avait des confesseurs dans les armées ; Charles en avait un pour lui en titre d'office, Voltaire, Mœurs, 21. Les Juifs eurent, au lieu de médecins, des exorcistes en titre d'office, qui chassaient les esprits malins avec la racine…, Voltaire, Dial. XXIV, 3.

    Fig. La maréchale d'Humières se retira dans une maison borgne au dehors des Carmélites du faubourg St-Jacques, et s'y fit dévote à titre d'office, Saint-Simon, 13, 14.

    N'avoir ni office ni bénéfice, n'avoir aucun revenu certain.

    Terme de droit canon. Bénéfice sans juridiction. Office claustral.

    Procureur d'office ou fiscal, se disait, dans les juridictions seigneuriales, de celui qui faisait les fonctions du ministère public.

  • 7En parlant d'un avoué, on dit office. Cet avoué vendra bien son office, car il a une excellente clientèle.
  • 8Au palais et dans le langage général, d'office, sans en être requis et par le seul devoir de la charge. Le juge a informé d'office. On s'attend qu'ils [les prédicateurs] reprendront les mauvaises mœurs ; on dit qu'ils le font d'office, et l'esprit humain indocile y fait moins de réflexion, Bossuet, Panégyr. Ste Cather. 3. Un dominicain qui l'assistait [Calas] d'office sur l'échafaud, dit qu'il voudrait mourir aussi saintement qu'il est mort, Voltaire, Lett. d'Argental, 27 mars 1762.

    Nommé d'office, nommé par le juge, par le tribunal. Avocat nommé d'office pour défendre un accusé qui n'avait point de défenseur. Les trois experts seront nommés d'office, à moins que les parties ne se soient accordées pour les nommer tous les trois conjointement, Code Nap. art. 1680.

    Fig. Faire quelque chose d'office, faire quelque chose sans en être requis. C'est un homme né pour des allées et venues, pour écouter des propositions et les rapporter, pour en faire d'office et en être désavoué, La Bruyère, II.

  • 9Le saint office, la congrégation de l'inquisition établie à Rome ; le tribunal de l'inquisition. Familier du saint office. Il [Giudice] était de la congrégation du saint office, Saint-Simon, 473, 40. Le pape Paul III, après avoir convoqué le concile de Trente, en 1545, nomma neuf savants personnages pour travailler à la réforme de la discipline ecclésiastique ; ce fut ce qui donna lieu à l'établissement de la congrégation du saint office ou de l'inquisition, Dumarsais, Lib. égl. gall. part. II, max. 17. Quand ils en seront là, ils ne chercheront pas le système du monde dans des passages de l'Écriture mal entendus ; et, pour savoir à quoi s'en tenir sur ce sujet, ils préféreront l'observatoire au saint office, D'Alembert, Ab. de la crit. Œuv. t. IV, p. 258, dans POUGENS.
  • 10Service divin qui se célèbre en public avec les cérémonies qui doivent y être observées. Assister à l'office, aux offices. Entendre, dire l'office. L'office de la nuit, du matin, du soir Quelle fureur, dit-il, quel aveugle caprice, Quand le dîner est prêt, vous appelle à l'office ? Boileau, Lutr. I.

    Se dit aussi de la manière de dire l'office qui change chaque jour. On fait l'office du dimanche, l'office d'un tel saint. Aujourd'hui l'office est double, semi-double, ou simple. On récite de longs offices, et ces offices tout divins sont composés et remplis des plus beaux sentiments de foi, Bourdaloue, 5e dim. après la Pentecôte, Dominic. t. II, p. 478. Je dis l'office de la Vierge : quoique ce soit avec de grandes distractions, c'est toujours un temps destiné à Dieu et passé avec lui, Maintenon, Lett. à l'abbé Gobelin, 11 déc. 1674. Cet office qu'il a composé pour l'adorable sacrement de nos autels, Massillon, Panég. St Thomas.

    Il s'est dit aussi en un sens analogue pour les protestants. Le dessein était [chez les protestants anglais du temps d'Élisabeth] de dresser un office pour la communion dont les expressions fussent si bien ménagées, qu'en évitant de condamner la présence corporelle, on réunît tous les Anglais dans une seule et même Église, Bossuet, Variat. X.

    Le petit office de la Vierge, ou les petites heures de Notre-Dame, l'office abrégé de la Vierge.

    Prière particulière qui se dit en l'honneur de chaque saint. Quand on canonise un saint, on lui assigne en même temps un office particulier. L'office de saint Louis.

    L'office des morts, certaines prières que l'Église a réglées en commémoration des morts.

    Prière que chaque ecclésiastique doit dire tous les jours, c'est-à-dire les heures du bréviaire (en ce sens, il se joint ordinairement avec l'adjectif possessif). Je n'ai pas dit tout mon office aujourd'hui, j'en suis à vêpres.

    Livre d'office, livre qui contient les prières chantées ou récitées au service divin.

  • 11Art de préparer ce que l'on met sur la table pour le service. Ce domestique sait bien l'office. Elle entend la cuisine et l'office, Rousseau, Ém. V.

    La classe de domestiques qui mange à l'office dans une maison. Un office nombreux.

  • 12Les Offices, gli Uffizii, grand et célèbre musée à Florence. On dit aussi la galerie des Offices.

REMARQUE

Au mot office, l'Académie écrit saint office sans trait d'union ; mais à saint, à congrégation, à inquisition, à qualificateur, elle écrit saint-office avec un trait d'union.

HISTORIQUE

XIIIe s. Ne vous affiert pas tex offices, [tel office ne nous appartient pas], la Rose, 7911. Il les doit penre [prendre] et emprisonner, de son office, Beaumanoir, I, 38. Li baillis, de s'office, pot bien debouter l'avocat, qu'il ne soit oïs en avocation devant lui, Beaumanoir, V, 15.

XIVe s. Qui adonc veïst gent de court, Chascuns à son office acourt, Machaut, p. 85. Les supplians et plusieurs autres nobles ont usé de office de magesté et bouté les feux es maisons et es villes d'icelles communes et plat pays, Du Cange, officium. Je di que nul, pour raison de office publique ne autrement, ne peut estre obligié à pechier, Oresme, Eth. 163.

XVe s. Avant la consecration, le roi fit là devant l'autel tous les jeunes chevaliers nouveaux ; et en après fit-on l'office de la messe, Froissart, II, II, 74. Lequel Nicolas dist à icellui Henry, que, se il ne chastioit sa femme, il le mettroit à l'office, qui est à entendre, à la court de l'eglise, Du Cange, officium. Tel perdoit ses offices et estatz pour s'en estre fuy… et furent donnés à autres qui avoient fui dix lieues plus loing, Commines, I, 4. Cappitaine de Callais et autres grosses offices, Commines, III, 4. Et chevaucherent bien armez, et sembloit bien qu'ils eussent bon vouloir de faire leurs offices, Commines, I, 6.

XVIe s. Il le renvoya en sauf conduyct, chargé de dons, chargé de graces, chargé de toutes offices d'amitié, Rabelais, Garg. I, 50. Plus il va en avant, et mains [moins] il s'ennuye de faire vostre office, et mains le veult laisser faire à nuluy, Marguerite de Navarre, Lett. 125. Quand Cesar parle des offices de sa profession, de sa vaillance, Montaigne, I, 57. Et m'eust semblé l'office du serviteur estre de…, Montaigne, I, 59. J'en veois envers qui c'est temps perdu d'employer un long soing de bons offices, Montaigne, II, 85. Il feroit tourner les affaires du costé des Carthaginois, lesquelz pour ceste office luy seroient amis, Amyot, Timol. 2. Rendre l'office d'amitié qu'il devoit, Amyot, Pélop. et Marcel. 6. Selon la maniere qu'ilz avoient de proceder à l'election dudict office, Amyot, Arist. 1.

ÉTYMOLOGIE

Provenç. offici ; espagn. oficio ; ital. uffizio ; du lat. officium, de ob, et facere, faire.